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Back (?) in London

Publié le 22 mars 2013 par Stéphane Kahn

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Bizarrement, je n’étais jamais allé à Londres. Bizarrement, je n’étais jamais allé en Angleterre. Enfin, si, un peu. C’était il y a un peu moins de trente ans, pour un voyage scolaire, en sixième. C’était en 1985 sûrement. En juin peut-être bien.

Je me souviens du goût des chips mangées sur le bateau, de la nausée, un peu, pendant la traversée. Puis au-delà, pas tant de choses. Là-bas, j’étais hébergé avec un copain blondinet (Ludo ou Ludovic, il me semble) dans une "famille", comme on disait. On jouait au foot dans le jardin, en fin d’après-midi. On avait cassé un carreau – je crois que j’avais marqué – on avait fait comme si de rien n’était, et le lendemain matin, quand notre hôte nous avait réprimandé, la barrière de la langue, face à ses reproches, maladroitement érigée, nous avait bien arrangé. Pourtant, je me souviens de la honte. Du rouge au front, des oreilles qui chauffent. De son regard, de son air déçu à l’heure de se dire au revoir. Y avait-il des enfants dans cette famille, je ne sais plus.

Plus tôt, en groupe, avec cette classe dont je ne me rappelle pas vraiment (ma première sixième alors, pas la deuxième – oui, j’ai redoublé), on avait visité Westminster, on avait vu Big Ben. On était allé, plus loin, mais où ?, dans un endroit avec des machines à sous. J’avais joué. À douze ans. Bizarre. Pas loin, un lac ou un étang. Je me rappelle avoir fait du pédalo. Ça m’avait plu. Quand, la semaine dernière, je proposais à Hélène, dans Hyde Park, d’en faire un tour (de pédalo), forcément, elle ne pouvait pas comprendre. On n’en a pas fait. La nostalgie a ses limites. Qu’avais-je rapporté de Londres ? Un torchon (immonde…) avec les monuments dessinés dessus, qui, longtemps, abrita de la poussière mon CPC464.

En 1985, à Londres, je ne m’intéressais pas aux disquaires, encore moins au rock anglais et à son histoire flamboyante. Le film Highlander, porte d’entrée vers un groupe local alors au sommet de la gloire, ne sortirait que l’année suivante. Connaissais-je Queen ? Avais-je déjà écouté Queen Live Killers, ce double vinyle emprunté à la discothèque (on ne parlait pas encore de médiathèque) et très vite copié sur cassette. Je ne sais plus. Je n’aime pas ne plus savoir. En 1985, pourtant, à Londres, j’ai acheté une cassette, je le sais. Une seule. Je l’ai encore. Dans un bac à vinyles de Brick Lane, j’ai revu cet album dimanche dernier. Sans doute s’en est-il vendu des pelletées là-bas. Pas de quoi être fier : c’était Fantastic !, le premier album de Wham !, disque qui n’était pas sorti en France et que j’étais trop content, en 1985, de trouver là-bas, moi qui était fou de Wake Me Up Before You Go-Go et de l’album Make it Big… Avais-je un Walkman sur place ? Avais-je écouté la cassette là-bas ou avais-je dû attendre le retour à Paris ? Je ne sais plus trop. Bizarre comme certains souvenirs de l’époque sont nets et précis (les films, les salles de cinéma où je les ai vus, par exemple) et comme ce voyage de quelques jours ne reflète aujourd’hui que quelques réminiscences nébuleuses.

Vingt huit ans sont passés sans que je retourne à Londres. J’en ai eu envie souvent. Mais l’occasion ne s’est jamais présentée. Je suis allé ailleurs. Londres demeurait une sorte de fantasme confortable car accessible. Trop accessible ? 40 ans. Un beau cadeau. Elle. Moi. Nous. J’y suis retourné. C’était évidemment comme si je n’y étais jamais allé. Pas grand-chose de commun entre moi aujourd’hui et le freluquet de douze ans. On n’est pas allé à Westminster. On a à peine aperçu Big Ben. On a snobé Buckingham Palace. Je m’en foutais. Par contre, j’ai vu Primrose Hill, Camden, Notting Hill, Brick Lane, la Tate Modern, Hyde Park, Regent Park. Tout ça d’un coup pour la première fois. J’ai marché sous la pluie. J’ai vu Baker Street. Je n’ai pas vu de coucher de soleil à Waterloo. Je suis ressorti du London Beatles Store sans avoir rien acheté. J’ai résisté au body AC/DC pour mon petit Lou. Je ne suis pas allé voir We Will Rock You ni Thriller ni Singing in the Rain (j’aurais aimé, quand même, voir l’une de ces trois comédies musicales mais j’ai trop tergiversé). Par contre, j’ai sali mes doigts dans les bacs à vinyles, profité de la liquidation du stock du HMV de Picadilly Circus (c’est toujours triste un magasin de disques qui ferme). C’était bien. C’était mieux que ça. Je m’en souviendrai mieux que la première fois, c’est sûr. Et quelque chose me dit que je n’attendrai pas 28 ans pour retourner là-bas.


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