Loin de son image lisse de présentatrice télé, j’avais remarqué Virginie Efira comme actrice dans « Mon pire cauchemar », dans lequel elle tenait un rôle secondaire. Plutôt convaincante, j’avais regretté que son rôle penche un peu trop facilement dans le cliché dans la dernière partie du film. J’avais envie de la découvrir dans le rôle principal et cette petite comédie me semblait parfaite.
J’ai été agréablement surprise par le film qui m’a tout de suite captivée, avec un générique enlevé et dont la direction artistique est bien trouvée, et par le naturel de ses acteurs. Virginie Efira réussit à nous convaincre dans son personnage de quadragénaire un peu trop classique, et nous entraine avec elle dans son aventure dans des univers proches des comédies du genre. Si on y retrouve les codes et le canevas principal, c’est pour mieux les réinterpréter ou installer avec eux une certaine distance qui devient comique.
Car désormais qu’attend-on de ces comédies ? Un moment léger où une histoire d’amour improbable finit par marcher malgré tout ? Le réalisateur, David Moreau est habitué des films d’épouvante (« The eye », « Ils ») et propose ici une relecture de la comédie plutôt piquante et décalée. Son couple d’acteurs séduit d’emblée et nous entraine même s’il est peu probable qu’une telle rencontre se fasse.
Pour cela il adopte sciemment un sujet d’actualité, celui de la « cougar », plutôt peu traité en France mais devenu un classique aux Etats-Unis soit l’histoire entre une femme expérimentée et un homme beaucoup plus jeune qu’elle. Le thème est porté par un duo d’acteurs inattendus mais presque plausibles tant ils sont naturels, Virginie Efira qui laisse derrière elle son image de présentatrice de la Nouvelle Star et Pierre Niney de la Comédie Française. Suite à leur rencontre en avion, Alice qui travaille dans la presse féminine et Balthazar, étudiant en architecture, vont être amenés à se revoir. Au départ juste pour une formalité, mais bien vite Balthazar devient dans l’esprit d’Alice le moyen de mettre un peu de piment dans sa vie, et du même coup attirer l’attention de son patron de qui elle attend une promotion.
Le choix de ce thème semble presque un clin d’œil au milieu quotidien de la presse féminine d’Alice Lantins, puisque « cougar » est ce mot à la mode que l’on voit sur toutes les couvertures people.
Dans sa peinture de ce milieu, David Moreau parvient à brosser une image qui flirte avec la réalité et l’exagération, et où les moindres détails retiennent notre attention. On y trouve de faux-semblants empruntés à d’autres films, des patronnes despotiques et chics, des drames pour des erreurs imperceptibles de teintes de couverture, des clichés de personnages ou de soirées mondaines, ou la perte de la valeur des choses liée au monde du travail (Alice qui demande à Bathazar de s’excuser auprès d’une photographe qui vient d’être odieux avec lui sous prétexte qu’il ne la reverra plus). Et puis il y a certaines trouvailles qui nous font penser qu’on n’est pas dans une simple parodie du genre lorsque notamment, lors une réunion d’équipe ennuyeuse Alice lance nonchalamment le prochain sujet de Une du magazine « Sommes-nous toutes des mots-clés sur Youporn ? »
La réflexion sur l’âge est omniprésente puisqu’on voit un mélange des générations s’opérer un peu partout : le père de Balthazar qui fréquente une de ses anciennes camarades de lycée notamment. La question est ainsi directement posée, pourquoi la différence d’âge choque-t-elle plus quand c’est la femme qui est plus âgée ? Alice en perd ses repères, et apporte à Balthazar un plateau de petit déjeuner avec des céréales comme s’il était un petit garçon. Dans le fond, le franc-parler de ce dernier permet d’asséner quelques paroles bien senties dans le monde faux et brillant du quotidien d’Alice.
On se laisse porter avec facilité par cette histoire d’amour, par la révélation d’une femme un peu coincée, thèmes déjà vus et ici réinterprétés, mais en appréciant que cela puisse aussi bien s’appliquer à un film français, révélant un charmant duo d’acteurs, sans tomber dans les travers de la comédie pesante et attendue.
A voir :
20 ans d’écart, un film français de David Moreau (1h32)