Ce recueil est le fruit d’une
résidence d’écriture organisée en 2009 sur le territoire d’Artois et la commune
de Béthune. La poétesse syrienne Maram al-Masri a arpenté les rues de ces villes
du Nord de la France noyées dans la brume où les maisons se serrent les unes
contre les autres comme si elles cherchaient à se tenir chaud. Elle a découvert les fêtes foraines, les grandes places où bat le cœur de la cité, les jeux des
enfants, les bistrots, la pauvreté et la chaleur humaine. Elle a posé sur les
gens et les choses un regard plein de douceur et d’universalité car, comme le
dit si bien son éditeur, la poésie ne connait pas de frontières.
Très très longtemps que je n’avais
pas lu de poèmes. Il aura fallu une journée d’études à laquelle j’ai assisté la
semaine dernière pour que l’envie me reprenne. Il aura surtout fallu que j'y vois Maram a-Masri et que je l’entende susurrer ses textes en arabe de sa voix de velours pour que mon petit cœur
d’artichaut fasse boum. Quand elle a pris le micro et qu’elle s’est lancée, j’avoue,
j’ai eu les poils au garde à vous. En plus elle est belle Maram, vraiment belle !
Et quand elle « étale ses souvenirs et expose les épices de sa nostalgie,
odeur de cumin et de menthe », difficile de ne pas fondre. Alors forcément
en sortant je me suis précipité pour acheté un de ses livres. Je n’ai pas pu
assister à la séance de dédicaces qui a suivi mais ce n’est pas plus mal. Je me
connais, je serais resté planté devant elle la bave aux lèvres, incapable d’articuler
le moindre mot… mon image de marque (déjà pas très reluisante) en aurait pris
un sacré coup.
Soyons honnête, il serait injuste de s’arrêter uniquement sur le charme de
cette sublime poétesse. Les textes de Maram Al-Masri sont ciselés. J’aime cette
poésie en prose à hauteur d’homme, sans boursouflure et sans ostentation. J’aime
cette délicatesse, cette belle musicalité, le propos à la fois simple et imagé,
toujours parfaitement compréhensible. Chaque poème a d’abord été écrit en français
puis traduit en arabe par l’auteur. L’ouvrage est donc en version bilingue,
arabe sur la page de gauche et français sur la page de droite.
La robe froissée est un
magnifique recueil que j’ai dégusté avec gourmandise. Comme quoi il suffit
parfois de pas grand-chose pour faire de belles rencontres livresques et
reprendre goût à la poésie.
« En ce matin nordique
le soleil essuie ses vitres de la poussière de la nuit
en écartant les nuages épais
Il lâche ses cheveux qui tombent avec douceur
sur les épaules de la ville noyées de brume
comme un châle de dentelle
tissé par les femmes de l'usine
et les grands-mères »
La robe froissée
de Maram al-Masri. Éditions Bruno Doucet, 2012. 90 pages. 13,20 euros.