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L’épine dans le coeur

Par Gicquel

[Critique DVD] L’épine dans le coeur

De 1952 à 1986, Suzette a sillonné les écoles des Cévennes en tant qu'institutrice.Devant la caméra de son neveu, Michel Gondry, elle raconte ses aventures quotidiennes et lui permet ainsi de découvrir une réalité familiale méconnue...

[Critique DVD] L’épine dans le coeur
"L'épine dans le coeur" de Michel Gondry

Avec : Suzette Gondry, Jean-Yves Gondry

Sortie le 02 avril 2013

Distribué par Editions Montparnasse

Durée : 86 minutes

Nombre de : 1

Film classé : Tous publics

Le film :

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Les bonus :

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 Ce Gondry, il sait tout faire. Des pubs, des clips (Stones, Björk, Radiohead…), et des films, « Eternal Sunshine of the Spotless Mind », « Soyez sympas, rembobinez », « The We and the I » ou « L’écume des jours »  attendu le 24 avril prochain.
Et puis ce documentaire « L’Epine dans le cœur » qui dépasse le cadre d’une simple retranscription du réelle et de l’effeuillage des souvenirs. Sa tante Suzette a été institutrice pendant plus de 30 ans dans les Cévennes. Il la convie à revenir sur ses pas pour parler d’elle et de son histoire. Mais au fil du récit, Suzette Gondry nous guide plus à travers la France rurale des années 50-60, qu’elle ne se révèle.

L'épine dans le coeur (4) © DR

Lorsque les harkis débarquent en 1962, cette femme d’avant-garde tient à ce que les jeunes filles soient aussi scolarisées. Une évidence qui échappera aux autorités, comme leur échappe l’importance de la culture dans la formation des jeunes. « Elle précédait les circulaires ministérielles » se souvient l’une de ses directrices. « Quand elles arrivaient ,on disait mais Suzette fait ça depuis longtemps ».
Aussi, quand pour les besoins du documentaire, la dame revient dans son coin perdu des Cévennes, où le cinéma a disparu, elle galvanise son petit monde qui lui improvise une projection nocturne, en plein air. Une séquence superbe,  et «bravo à la lucarne» comme elle chante  à la fin de la séance, en adressant un sourire complice au projectionniste.
La femme est lucide, déterminée, et peut-être malgré elle, la voici qui va maintenant se raconter, un peu, au plus proche de l’intime. Son fils Jean-Yves l’accompagne à travers ce documentaire, dans une relation où les fêlures apparaissent de plus en plus au grand jour. Des rapports conflictuels avec son père (« je ne voulais pas reprendre la scierie »), une homosexualité dont il est difficile de parler dans les années 60, et la mort du patriarche, qu’il traîne encore aujourd’hui comme un manquement à ses devoirs.

L'épine dans le coeur (2) © DR

Suzette l’écoute, rectifie, tente de rectifier. Les silences qui s’imposent portent tout le poids du seul échec patent. Ils n’ont jamais su se parler.
« Vous étiez vache » lui rappellent deux anciennes élèves, le sourire grand comme une tranche de bon pain. « Ca ne me fâche pas, c’était pour leur bien ». Une reprise de volée dans la ligne droite d’une personnalité à part entière. A voir et à revoir.

LES SUPPLEMENTS

  • Calendar Doodle – 1.50 mn

Un rapide montage de calendriers scolaires et leurs couches de griffonnages. Bof…

  • Animation Collection – 1.50 mn

Des animations en stop-motion réalisées par Valérie Pirson, conçues pour « L’épine dans le cœur » mais dont certaines ont été écartées du montage final. C’est un peu plus passionnant.

  •  Little Monsters – 2 mn

Un clip de Michel Gondry réalisé pour la chanson « Little Monsters » de Charlotte Gainsbourg, où des écoliers deviennent invisibles… La réalisation est superbe (les images du clip sont dans le documentaire ), la chanson me gonfle…

  • Harkis – 15 mn

Certains des étudiants de Suzette étaient les enfants de Harkis qui, après avoir combattu pour les Français pendant la guerre d’Algérie, se sont retrouvés en exil dans les Cévennes après l’indépendance. La séquence du documentaire se prolonge ici par d’autres rencontres, des images d’archives sur le témoignage des harkis qui se sentent toujours à part.

  • Techno Suzette – 5.53 mn

La première fois que Suzette a utilisé une caméra super 8, elle l’a utilisée comme un appareil photo, photographiant une image par plan ! Le résultat fut source de fous rires et moqueries pendant des années, mais Michel Gondry promit à sa tante de transformer ce « ratage » en réussite en le transformant en clip techno. C’est assez drôle.

En bref

Le film

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J’ai pensé à « Être et avoir » de Nicolas Philibert, mais aussi à « Yvette bon dieu » de Sylvestre Chatenay, l’esprit d’une France rurale en voie de disparition, une plongée dans l’école républicaine, et une exploration de la complexité des rapports familiaux… Gondry qui parfois se met en scène raconte une histoire de famille, qui ressemble à beaucoup d’autres familles. A voir et à entendre, c’est superbe

Les bonus

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Pour l’éclairage sur les harkis, et la manière dont Gondry récupère une bêtise de prise de vue , vieille de vingt ans pour en faire un court métrage très «in»...


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