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L'Uruguay ouvre lui aussi le mariage aux couples de même sexe [Actu]

Publié le 11 avril 2013 par Jyj9icx6

L'Uruguay ouvre lui aussi le mariage aux couples de même sexe [Actu]

Plongée sur la Chambre des Députés,
pendant la séance d'hier


Hier, par un ample vote des députés, l'Uruguay est devenu le deuxième pays d'Amérique Latine à ouvrir le mariage aux couples de même sexe, ce qu'on appelle, en suivant l'exemple argentin, le "mariage égalitaire" (voir mon article du 15 juillet 2010 sur l'exemple argentin).
Comme en Argentine il y a trois ans, l'Eglise s'est opposée de tout son poids contre cette disposition mais avec beaucoup moins de résultat encore que de l'autre côté du Río de la Plata : le vote y avait été acquis à 33 oui contre 27 non au Sénat. Hier, à Montevideo et à la Chambre des Députés (après un premier vote positif au Sénat), le oui a obtenu 71 voix contre 21 sans abstention (mais certains élus avaient courageusement déserté l'hémicycle). Eu égard à la relative étroitesse de la majorité résultant des dernières législatives en faveur du Frente Amplio, le grand parti fédératif de la gauche à l'initiative de cette réforme du code civil, ce résultat donne à réfléchir : il s'avère que cette loi a obtenu l'appui d'une bonne partie de la droite (et donc de l'opposition). Pour des sociétés que l'on dit volontiers conservatrices et prisonnières de leur passé confessionnel, c'est une évolution puissante car elle balaie les arguments de l'anthropologie chrétienne et des acquis culturels qui semblaient beaucoup plus profondément ancrés... Les élites politiques au moins, sinon l'électorat de base, sont visiblement en voie de déchristianisation comme l'Europe occidentale depuis la fin de la seconde Guerre mondiale mais à une allure bien plus rapide.
C'est d'autant plus frappant que la nouvelle loi va modifier les règles onomastiques traditionnelles de toute l'aire hispanique : les enfants porteront désormais non plus le nom de leur père (le seul transmissible à leurs propres enfants) suivi de celui de leur mère comme c'est la tradition depuis la fixation des noms de famille à la fin du Moyen-Age, mais le nom des deux parents (homosexuels ou hétérosexuels, biologiques ou adoptifs) dans l'ordre choisi par ceux-ci ou par tirage au sort en cas de désaccord des époux. Cela promet des effets délétères pour l'identification des enfants et leur intégration psychique dans leur propre arbre généalogique, un des points auxquels en France les députés ont eu la sagesse de renoncer parce que c'est toute une conception historique et culturelle de la famille, qui nous relie à l'histoire de nos lignées mais aussi à l'histoire de notre pays et à son univers symbolique, qui s'effondre pour satisfaire une poignée de personnes qui impose ses vues et ses désirs à la grande majorité des gens qui procréent les enfants qu'eux vont adopter (si on en reste au stade de l'adoption, ce qui est peu probable à moyen terme). Cette atteinte à l'un des points de repère séculaires que produit une civilisation est aussi effarante que la sarabande multicolore du mouvement gay, lesbien et trans qui a assisté, dans des tenues de carnaval, à ce qui était tout de même une séance législative de grande conséquence. Pour ma part, je n'ai rien contre les vêtements colorés et fantaisistes mais il s'agissait tout de même de faire une loi qui modèle le noyau familial, pas d'adopter une nouvelle réglementation de l'industrie de la mode et de l'habillement.... La chose s'était passée avec beaucoup plus de dignité en Argentine, il y a trois ans, notamment du côté des pro-mariage gay, qui avaient plus de tenue (peut-être parce qu'ils étaient des pionniers à l'échelle continentale et qu'ils avaient conscience d'attirer l'attention du monde entier, ce qui bien sûr a peu de chance d'arriver à un pays comme l'Uruguay, qui se sait inconnu dans la conscience médiatique mondiale même quand son président fait d'énormes gaffes diplomatiques).
Dans la presse uruguayenne, je n'ai guère vu mentionner de groupes de pression catholiques qui auraient, comme cela avait été le cas lors de l'adoption de la loi sur l'avortement il y a juste six mois où des croyants avaient fait des rassemblements silencieux ou murmurant (chapelet) devant le Sénat ou investi les galeries de l'hémicycle pour prier constamment tout au long du débat et du vote. Comme si toute cette partie-là de la population, si mobilisée et si digne il y a six mois, se trouvait anesthésiée ou avait rendu les armes, au moment même où arrive à Rome un Pape rénovateur et sud-américain (certes argentin, ce qui peut avoir réveillée cette envie malsaine qu'un certain nombre d'Uruguayens ressentent parfois à l'encontre du grand voisin transfluvial)...
Avant son entrée en vigueur, qui n'aura pas lieu avant trois mois, la loi deva encore être amendée par le Gouvernement. Les députés ont en effet émis des réserves sur des détails de rédaction et diverses incohérences pratiques, or ce n'est pas eux qui peuvent procéder à ces corrections. Un peu étrange pour un corps législatif vu de nos vieilles démocraties. Ce sera donc le Gouvernement qui procédera à ce toilettage avant de lancer les décrets d'application.
Pour en savoir plus : Dans la presse uruguayenne : lire l'article de La Red 21 lire l'article de El País Dans la presse argentine : lire l'article de Página/12 lire l'article de Clarín lire l'article de La Nación

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