"A la télé quand une femme annonce à son mari qu'elle attend un bébé, il l'installe aussitôt dans un fauteuil confortable, et lui met un coussin dans le dos. Et puis il lui prend la main et l'embrasse très tendrement. Il veut savoir à quand ça remonte, pour quand est la naissance. Jill raconterait bien à Virgil qu'elle a dû se cacher dans son placard pour vomir dans la coupe à fruits."
Elles sont quelques jeunes adolescentes à se retrouver régulièrement près du lavomatique, dans cette Amérique profonde où le rêve est bien loin, et la seule ouverture sur le monde l'écran brillant de télévision. Trois d'entre elles sont déjà devenues mères, une autre soupçonne qu'elle va le devenir bientôt, et la solitude est à la lisière de la vie qu'elles se construisent naïvement. Elles ne se doutent pas, tout en jouant avec leur bébé, que rien n'est acquis, que des adultes de passage vont modifier leur destin, et que la vie ne tient qu'à un fil, bien fragile...
C'est le premier titre de Joyce Maynard que je lis, et l'admiration s'est ici mêlée au malaise... Malaise, car il m'a été difficile d'assister au supplice de la petite Mélissa, brutalisée par sa mère adolescente. Malaise, car cette Amérique sans espoir que l'auteure nous décrit n'est pas du tout attirante mais qu'il est évident qu'elle existe réellement. Et puis malaise aussi, parce que sur tout le récit règne une lourdeur, une atmosphère un peu glauque, que j'ai eu du mal à trouver plaisante. Mais admiration cependant, parce qu'il y a une certaine excellence tout de même dans ce portrait d'une étonnante vérité, et que la naissance du désir maternel chez les jeunes femmes y est subtilement croquée, les désillusions qui s'ensuivent également.
Une lecture choc dont il n'est pas aisé de se défaire.
Editions Philippe Rey - 19€ - 11 Avril 2013
Touchant et dérangeant pour Clara qui l'a lu d'une traite