Ah Pusher ! Ah, la trilogie danoise de Nicolas Winding Refn (Drive, Valhalla Rising...) sur 3 destins compromis dans le milieu de la criminalité de Copenhague... 3 parcours tragiques, en spirale, et croisés entre chacun des films... Ce Pusher-là est donc le remake du premier opus de cette trilogie, et est supervisé par Winding Refn lui même, puisqu'il en est le producteur exécutif. La rédaction était donc curieuse de se pencher sur cette version alternative, curieuse de voir si le projet se justifiait ou non, curieux de vérifier si ce Pusher-là avait réussi à récupérer l'incroyable noirceur de l'original, curieux de vérifier si un autre pouvait apporter sa pâte au petit chef-d'oeuvre danois... Veni, Vidi, pas Vici...
Dans l'absolu, ce Pusher n'est pas honteux. Il reprend assez fidèlement l'histoire et les personnages de la version Nicolas Winding Refn (NWR) et change le décor, substituant au ciel plombé danois et à la grisaille de sa capitale, l'énergie de la cité londonienne, milieux branchés inclus. Sorte de lifting social, donc, pour cette version, et ajout de quelques petits effets de réalisation, histoire de dynamiser un peu le rythme lent de NWR et son parti pris de traiter sa trilogie à la manière d'une chronique du quotidien. Si on ne connait pas l'original, ce Pusher semblera assez atypique, presque original dans sa structure, mais son rythme (tout droit hérité des choix stylistiques et scénaristiques de l'original) ne trouve plus ses justifications, implantées dans son ADN. Ce Pusher là s'en trouve donc structurellement déséquilibré, comme hybride, mais sans que le spectateur n'identifie l'origine de la curieuse impression mitigée qu'il laisse...
Remake fidèle, mais déconnecté de son modèle, Pusher alterne de bons moments avec des passages qui apparaissent comme déconcertants. C'est ce "prix de la fidélité" qui, paradoxalement, empêche ce remake de prendre de la hauteur. Son coté sombre se heurte à cette nouvelle approche, moins sombre et glauque que l'original, et Pusher se dérègle sur sa partie centrale. Pusher se teinte alors d'un aspect artificiel, quelquefois télévisuel, trop léger, et devient hétérogène. Trop lent au regard de sa nouvelle donne et trop glauque au regard de son nouveau décor, il laisse le spectateur dans l'expectative, alors que la cohérence de l'original prenait le spectateur en otage, lui ôtait son souffle et le malmenait grandement.
Au final ce remake laisse une impression mitigée, et c'est le manque de directions claires dans son déroulement qui l'emporte sur son côté atypique. L'original laissait le spectateur vidé par l'expérience à laquelle il assistait, expérience amplifiée de film en film par l'entremêlement de ses intrigues et personnages, il l'emmenait dans au coeur de drames profonds, violents et implacables en accompagnant ses victimes vers un mur, comme un compte à rebours vers la mort. Ce remake ne fait qu'effleurer cet aspect de son histoire, sa force n'est pas constante et au lieu d'immerger le spectateur, de le noyer sous les emmerdes de son personnage, il ne fait que lui proposer un destin certes tragique, mais incapable de faire naître la compassion. Ce Pusher-là n'est pas inintéressant, il est simplement inégal et décevant, et tout particulièrement au regard de son modèle. Avant de le jeter, avant de vous faire un avis, on ne saurait que vous conseiller de visionner la trilogie originale, juste énorme ! Mais en vous conseillant ça, on à bien conscience d'ôter à ce Pusher une bonne partie de ses quelques atouts... Mais après tout... Pusher n'est-il pas l'histoire d'une victime condamnée dès la première image ? Et si dans ce remake la victime n'était plus Frank, mais le film lui-même ? Il est de ces projets mort dans l'oeuf, on est en droit de se poser ici cette question : fallait-il remaker cette perle noire ? Etait-ce possible ? Nous pensons que non, peut-être aurez-vous un avis plus clément que celui de notre rédaction.
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