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[poètes] [Carte blanche] Dossier Eliot Weinberger, par Auxeméry

Par Florence Trocmé

Eliot Weinberger est né le 6 février 1949. Essayiste, éditeur et traducteur américain. 
Eliot Weinberger n’est pas poète lui-même, au sens où il serait l’auteur d’une œuvre poétique personnelle, mais il est un auteur au service de la poésie, et étant le traducteur d’œuvres de très haute lisse, et amateur plus qu’éclairé de poésie universelle (les Chinois, tant anciens que modernes, par exemple, tenant une large part dans ses affections), il a droit à notre reconnaissance. Il serait judicieux qu’un éditeur de chez nous se rende compte de la valeur de ses contributions et les fasse connaître aux lecteurs de langue française. 
« Je ne suis pas censé être poète, mais il m’arrive d’être inclus dans les anthologies en tant que tel, nous disait-il récemment. Ma participation préférée se trouve dans The Wisdom Anthology of North American Buddhist Poets … et la semaine dernière, j’ai découvert que je me trouvais dans une anthologie portant le titre d’Ecopoetry… Me voilà donc éco-poète bouddhiste. » 
Ses principales traductions sont celles d’Octavio Paz : Collected Poems 1957-1987, In Light of India (Lueurs de l’Inde), Sunstone (Pierre de Soleil) ; de Vincente Huidobro (Altazor) ; de Jorge Luis Borges (Seven Nights, et Selected Non-Fictions), de Bei Dao (Unlock, et The Rose of Time). Il a également publié une anthologie lui-même : American Poetry Since 1950 : Innovators & Outsiders, à laquelle fait allusion Nathaniel Tarn dans l’article que nous donnons ici. 
Ces travaux lui ont fait connaître la notoriété outre-Atlantique, après l’attribution du Nobel à Paz.  
Il a également publié un texte intitulé The Stars, qui se caractérise par une distribution typographique originale sur la page, et par le fait qu’il a demandé à des amis de lui fournir, simultanément, des versions en arabe, en chinoise, en hindi, en japonais et en maori – façon de s’inscrire au cœur de la correspondance entre langues, au cœur du divers-même, pour emprunter un concept à notre Segalen (à qui il a consacré une étude, en parallèle avec l’œuvre d’un photographe). 
Ses essais sont recueillis dans plusieurs volumes : Works on Paper(1986), Outside Stories (1992), Karmic Traces (2000), An Elemental Thing (2007), Oranges and Peanuts for Sale (2009), publiés chez New Directions. La caractéristique de ces essais est leur tonalité expérimentale très variée – tendant vers la « poésie documentaire en prose », selon ses propres termes. 
Ils sont aussi le lieu d’une parfaite liberté de parole soutenue par une langue d’une grande précision : dans Works on Paper, le travail de plusieurs années se concentre essentiellement sur la vision que l’Occident a de l’Orient (vues de l’Inde à l’époque de Christophe Colomb ; missions chrétiennes en Chine au XVIème siècle ; prostituées de Bombay ; théocratie tibétaine, ; bureaucratie confucéenne ; poésie des Tang…) et sur une analyse serrée des grandes figures de la poésie nord-américaine au XXème siècle (Charles Reznikoff, Ezra Pound, George Oppen, Clayton Eshleman, Langston Hughes) en conjonction avec les grands problèmes de l’heure – antisémitisme, bombe atomique, etc. ; dans Outsides Stories, les préoccupations de Weinberger vont de la fatwa lancée par le régime islamique d’Iran contre Rushdie à la considération du mythe de l’Atlantide, de l’histoire des Pèlerins qui ont fondé la Nouvelle Angleterre aux étudiants de la Place Tien An Men. Son souci permanent reste de lire les poètes (du Mexique au Japon) Sa méthode consiste à rapprocher le vieux fonds des mythes et des textes anciens avec les réalités parfois étranges autant qu’étrangères de notre temps ; dans Karmic Traces, son regard continue à scruter les horizons les plus divers : rêves Viking, rituels aztèques, mémoire hindoue etc., dans une optique où la poésie comme l’histoire ont leur mot à dire, et où l’acuité de la vue de l’essayiste le dispute à la largeur de son compas mental ; dans An Elemantal Thing, l’écriture se fait plus dense, parfois, et les textes abordent des sujets aux frontières de l’histoire, de l’ethnologie, de la poésie, de la philosophie (des Lacandons à Empédocle, d’une lecture de Blanqui par Walter Benjamin à une biographie de Mahomet traité selon une méthode proche de celle du poète Reznikoff). Nous traduisons ici un article de son ami Nathaniel Tarn, publié à l’occasion de la parution du cinquième recueil, Oranges & Peanuts for Sale, et en analysant les diverses facettes. 
Les articles politiques tiennent une part particulière dans cet ensemble, et sont extrêmement acerbes à l’encontre de la politique américaine intérieure et étrangère, surtout concernant la période de l’administration Bush. L’effondrement des Tours du World Trade Center (Weinberger a assisté à l’événement depuis les fenêtres de son appartement et a commencé sa réflexion dès le lendemain) a été le point de départ d’une série de textes recueillis dans 9/12 (Prickly Paradigm Press, 2003). Autres recueils : What I heard about Iraq (Verso, Londres, 2005) et What Happened Here : Bush Chronicles (New Directions, New York, 2005, et Verso, Londres, 2006), Muhammad (New York, Londres, 2006). 
Weinberger est l’auteur avec Octavio Paz d’un remarquable petit livre récemment réédité : 19 Ways of Looking at Wang Wei (Asphodel Press, première édition 1987). Les auteurs y présentent les différentes traductions disponibles parues dans le monde entier dans plusieurs langues (français, anglais, espagnol…) d’un poème du poète chinois de l’époque Tang, Wang Wei. Ce travail est introduit par la phrase : Poetry is that which is worth translating, « Poésie est ce qui mérite traduction » – invitation à un voyage dans le temps et les civilisations : « La grande poésie vit dans un état de perpétuelle transformation, de traduction perpétuelle : le poème meurt quand il n’a pas de lieu où aller. » 
Weinberger a également édité deux petites anthologies des traductions en anglais de poèmes chinois et japonais par Kenneth Rexroth : Written on the Sky et Songs of Love, Moon, & Wind (New Directions, 2009). Il est enfin l’auteur d’Una antologia de la poesia norteamericana desde 1950 (Editiones del Equilibrista, Mexico, 1992), et il est le premier écrivain U.S. à avoir reçu du gouvernement mexicain l’Ordre de l’Aigle Aztèque. 
Il collabore enfin régulièrement à la London Review of Books et à la New York Review of Books… 
On trouvera des traductions de quelques textes par Auxeméry : 
Sur le site alligatorzine : 
La Ville 
Les étoiles  
Obama contre Clinton – récapitulation
 
Là où vivent les Kaluli      
Sur le Zócalo
 
(repris dans La revue des ressources :  
Sur le site Œuvres ouvertes : 
« Pour sûr, dis-je » 
Dans la revue Action poétique, n° 136 (automne 1994) : 
Notes sur la poésie 
Signalons, enfin, le texte Oppen Then, repris en préface par Yves di Manno, à sa traduction de George Oppen, Poésie complète, Corti, 2011. 
[Auxeméry]

Poezibao propose ici tout un ensemble de traductions d’Auxeméry de et autour d’Eliot Weinberger, sous forme de fichiers PDF téléchargeables, pour un meilleur confort de lecture.  
James Laughlin : Téléchargement Eliot Weinberger, James Laughlin (trad. Auxeméry) 
Niedecker/Reznikoff  : Téléchargement Eliot Weinberger, Niedeker Reznikoff (traduction Auxeméry)
Un poème de Reznikoff :  Téléchargement Charles Reznikoff, Les Anglais en Virginie
Un article de Nathaniel Tarn :  Téléchargement Nathaniel Tarn Eliot Weinberger, Oranges Peanuts


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