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[Critique] SOUS SURVEILLANCE

Par Onrembobine @OnRembobinefr
[Critique] SOUS SURVEILLANCE

Titre original : The Company You Keep

Note:

★
★
★
½
☆

Origine : États-Unis
Réalisateur : Robert Redford
Distribution : Robert Redford, Shia LaBeouf, Susan Sarandon, Stanley Tucci, Julie Christie, Nick Nolte, Chris Cooper, Terrence Howard, Richard Jenkins, Anna Kendrick, Brendan Gleeson, Brit Marling, Sam Elliott…
Genre : Thriller/Drame/Adaptation
Date de sortie : 8 mai 2013

Le Pitch :
Une activiste, membre du Weather Underground, célèbre pour avoir milité brutalement contre la guerre du Viet-Nam à la fin des années 60, est arrêtée par le FBI au terme d’une traque de 30 ans. Une arrestation qui intéresse tout particulièrement un jeune journaliste ambitieux, avide de percer à jour les secrets de ces activistes disparus dans la nature, après le meurtre accidentel d’un agent de sécurité. Son investigation le mène à s’intéresser à un avocat, père célibataire sans histoire, qui semble détenir un lourd secret en relation directe avec le Weather Underground…

La Critique :
37 ans après Les Hommes du Président, d’Alan J. Pakula, qui voyait Robert Redford et Dustin Hoffman incarner les deux journalistes ayant mis à jour le scandale du Watergate, Redford passe le relais. Ici, dans Sous Surveillance, sa neuvième réalisation, Redford est de l’autre côté. C’est lui le sujet de l’enquête et lui le vecteur de tous les mystères qui habitent le récit. Des mystères sur lesquels enquête Shia LaBeouf, qui pour sa part, incarne une version jeune de Redford, à savoir un homme ambitieux, courageux, un peu rebelle, acharné et charmeur.

Porté par une somme impressionnante d’acteurs connus et reconnus, entre l’ancienne et la nouvelle garde, Sous Surveillance prend rapidement des airs de bilan pour Redford. Il regarde dans le rétro, interroge sa société, constate et met en lien la politique d’aujourd’hui et celle d’hier. Pour cela, la légende fait marcher ses relations, côtoie des gueules burinées comme Nick Nolte, Chris Cooper ou Richard Jenkins, tandis qu’il pose un regard mélancolique et sage sur les turbulentes années 60.
En cela, Sous Surveillance est souvent passionnant. Passionnant, car il en dit long sur son réalisateur et sur son état d’esprit. Passionnant, car il s’appuie sur une écriture exigeante, rythmée et sur un rejet en bloc de tout sensationnalisme. Ne cherchez pas des poursuites en bagnoles, des fusillades, du sexe ou quoi que ce soit de vaguement spectaculaire dans Sous Surveillance. Tout se joue dans les joutes verbales, les regards et les affrontements idéologiques qui jalonnent la fuite en avant d’un fugitif en quête de vérité et de réhabilitation.
En toute logique, le dernier Redford s’adresse en majorité à un public mature, plus apte à s’intéresser à un thriller, qui par bien des aspects, peut se positionner quelque part entre une version posée du Fugitif et un thriller politique dans la veine des Hommes du Président.
Plein de mélancolie quant à l’époque qui vit sa gloire atteindre son paroxysme, mais aussi lucide sur sa condition actuelle de vétéran, Redford illustre un constat étonnamment pessimiste sur les conséquences des luttes socio-politiques d’antan ou encore sur l’état actuel de la presse. Les deux étant étroitement liés. En bon vieux mythe, Redford critique, mais le fait de manière plus douce qu’Eastwood par exemple. Toujours de gauche, Redford y va mollo et semble conscient de sa propre condition. Qu’elle soit physique, morale ou encore en ce qui concerne sa place dans le paysage cinématographique actuel. Il laisse l’action aux autres et ne cherche jamais à donner une image différente de celle que l’on se fait de lui. Toujours très classe, en forme et possédant un charisme intact, Redford est pertinent. Ou s’arrange pour l’être, quoi que l’on pense de sa propension à tourner le dos à certaines luttes. Car il a de bonnes raisons. Une bonne raison plutôt (la famille) qui justifie tout et souligne un petit peu plus le désir d’un homme de livrer une œuvre en adéquation avec ses convictions. Un homme qui n’a plus envie de se battre. Le cinéaste, du coup, ne fait pas dans l’esbroufe. Et comme il a du talent à revendre, ça fonctionne quand même.
Cela signifie-t-il que Sous Surveillance n’est pas engagé ? Pas le moins du monde. Redford ne condamne pas les idées -dans le cas présent celles de ce groupe violent engagé dans les 60′s contre la guerre du Viet-Nam-, mais les méthodes. Il dénonce avec sa dernière réalisation les débordements qui peuvent surgir d’un combat à priori noble. Des débordements qui peuvent mener à transformer le remède en poison presque aussi nocif que la maladie qu’il est censé combattre. Pour cela Sous Surveillance est plutôt burné. Même si, encore une fois, la méthode, plutôt douce, pourra décourager les spectateurs habitués aux productions plus dynamiques dans la forme.

Affirmant un classicisme qu’il n’a jamais renié, Robert Redford reste fidèle à lui même. Que ce soit dans le fond ou dans la forme. Il parvient même -comme il a pu le faire jadis avec Brad Pitt- à canaliser l’énergie du chien fou Shia LaBeouf, du coup surprenant de sobriété, pour conférer à son film une belle cohérence, elle aussi plutôt rare à une époque où tout doit aller à fond la caisse et exploser dans tous les sens. Sous Surveillance est à l’image de son réalisateur. Un peu hors du temps et désuet. Deux caractéristiques à double tranchant, car si elles donnent au long-métrage une bonne partie de son charme, elles l’empêchent aussi de décoller vers les sommets du genre. Précisément ceux que squattait Redford il y a quelques années.

@ Gilles Rolland

Sous-Surveillance-Redford
Crédits photos : SND


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