Nous nous souvenons tous du tollé soulevé chez nous par un dessin animé kowétien qui mettait en scène des personnages marocains : on nous montrait “que nos femmes sont très possessives ou que nos fonctionnaires sont cupides”. , comme je l’écrivais ici même.
Il faut dire que nous avons, parfois et sur certains sujets bien futiles, la sensibilité à fleur de peau : nous ne supportons la critique, même si elle est fondée, même si elle est simplement ironique, surtout si elle est ironique. Cela explique d’ailleurs que nous ayons si peu de caricaturistes et si peu d’imitateurs.
Je me demande comment réagiraient nos compatriotes – tous genres et espèces confondues – face à un ouvrage écrit par un arabe et qui aurait pour titre “Ces impossibles marocains”!
Si dans ce livre l’auteur, qui devrait très bien connaitre le Maroc, son histoire, sa société, sa sociologie, sa civilisation, avait décortiqué nos petits travers et nos grands défauts, comme l’a fait Louis-Bertrand ROBITAILLE dans “Ces impossibles Français“, paru chez DENOEL en janvier 2010, je crois que nous aurions été nombreux à crier au scandale, sinon au racisme .
En effet, L.-B. Robitaille, journaliste canadien, plus exactement québécois, correspondant à Paris du quotidien La Presse de Montréal depuis le début des années 1970, taille en pièces la réputation des français(e)s dans tous les domaines, tout au long de 381 pages, divisées en quatre parties, extrêmement bien documentées.
Présentant la France comme le pays de la frivolité, les français et les françaises comme les rois du l’esprit léger sinon dévergondé, le journaliste québécois met également en exergue le coté le gout des habitants de l’Hexagone pour le culture, la littérature, les arts et bien sûr la haute gastronomie.
Il ne rate pas l’occasion de gausser les habitants de l’Hexagone pour la douce nostalgie qui les berce dans de bien agréables souvenirs de la gloire passée de la France monarchiste. Les français rêvent encore de noblesse, de noms à particule tout comme ils méprisent l’argent qui accompagne la réussite professionnelle.
Autre angle sous lequel l’auteur taquine les français : celui de leurs ambivalences et là il ne manque pas matière à ironiser de façon très acide. Méditerranéens autant qu’européens, les français ne sont ni tout à fait partisans de l’autorité ni tout enclins à l’anarchie, d’où leur coté de râleurs éternels; Fanatiques de l’égalité, ils ne crachent pourtant pas sur les privilèges.
Pour finir, l’auteur épingle la France sur certaines de ses habitudes, étrangement différentes de celles des grands pays occidentaux, comme la célébration de la fête nationale autour du seul et unique défilé militaire du 14 Juillet à Paris, l’opposition entre Paris et la province, les difficultés pour ce pays d’accepter de se réformer avant de conclure sur la blessure freudienne de ces républicains régicides impénitents.
Malgré les charges très virulentes contre la France et ses habitant(e)s, la critique a été en général très élogieuse pour le livre de L.-B. Robitaille.
Marine de Tilly, critique littéraire de LE POINT termine son article su 25 octobre 2011 par un enthousiaste : “A lire d’urgence!”.
Olivier Jeandel, de la Librairie Carnets d’Asie, Alliance française de Bangkok trouve l’ouvrage “d’un ton souvent caustique sans être méchant, plein d’esprit, drôle et sérieux à la fois”.
Alors, que dire de plus de ce livre? Sinon en recommander la lecture et conseiller à chacun d’entre nous une éventuelle tentative d’analyser notre propre société à travers les filtres utilisés par l’auteur. Je suis sûr que l’exercice en vaudrait la chandelle en calmant bien des esprits et en renversant bien des idées reçues.