Depuis que le nouveau patron du Parti de l’Istiqlal Hamid Chabat a provoqué en duel - il n’y a pas d’autre mot pour décrire cette situation - son allié PJDiste le chef du gouvernement Abdellilah Benkirane, la situation politique au Maroc semble bloquée.
Mille et une raisons peuvent justifier, ou non, la position agressive du leader politico-syndicaliste à l’encontre de son compagnon de route.
Mais, en aucune façon, cette animosité – à la limite purement personnelle – ne doit être tranchée par un arbitrage royal : cela n’entre pas dans le cadre ni dans l’esprit de la constitution plébiscitée le 1er juillet 2011.
Cette constitution a ouvert une nouvelle voie vers une responsabilité accrue du gouvernement et de son chef face aux représentants de la nation.
Il est normal dans la vie politique d’un pays que les alliances se défassent : un accord politique a pour vocation de ne pas être figé mais soumis aux aléas et aux fluctuations de la conjoncture.
Et la constitution a prévu les cas où le chef du gouvernement se retrouverait en difficulté face au parlement.
Dans un premier temps, cela ne devrait en rien nuire “au bon fonctionnement des institutions constitutionnelles”, selon la formule utilisée par la loi suprême du royaume.
Une crise politique est une situation normale en démocratie, tout comme l’éclatement d’une majorité ou le retournement d’une alliance.
La situation trouve sa situation dans le titre VI de la constitution : “Des rapports entre les pouvoirs.” et plus exactement dans la section “Des rapports entre les Pouvoirs législatif et exécutif”.
Une simple lecture des différents articles de cette partie nous éclaire sur les différentes techniques prévues par la constitution pour affronter les différents cas de figure de crise politique.
Dans certains cas, le chef c du gouvernement a l’entière et totale liberté d’engager ces techniques:
Article 103.
Le Chef du Gouvernement peut engager la responsabilité du gouvernement devant la Chambre des Représentants, sur une déclaration de politique générale ou sur le vote d’un texte.
La confiance ne peut être refusée ou le texte rejeté qu’à la majorité absolue des membres composant la Chambre des Représentants. Le vote ne peut intervenir que trois jours francs après que la question de confiance ait été posée. Le refus de confiance entraîne la démission collective du gouvernement.
Dans d’autres cas, il revient aux représentants de la nations de prendre l’initiative :
Article 105.
La Chambre des Représentants peut mettre en cause la responsabilité du gouvernement par le vote d’une motion de censure. Celle-ci n’est recevable que si elle est signée par le cinquième au moins des membres composant la Chambre.
La motion de censure n’est approuvée par la Chambre des Représentants que par un vote pris à la majorité absolue des membres qui la composent.
Le vote ne peut intervenir que trois jours francs après le dépôt de la motion. Le vote de censure entraîne la démission collective du gouvernement.
Lorsque le gouvernement est censuré par la Chambre des Représentants, aucune motion de censure de cette Chambre n’est recevable pendant un délai d’un an.
Dans un cas comme dans l’autre, le chef du gouvernement d’une part et les partis représentés au parlement d’autre part prennent en main, en toute conscience et sans référer à aucune autre autorité ou pouvoir, leur rôle constitutionnel et se comportent en acteurs responsables de la vie politique du pays.
Alors, pourquoi ni Hamid Chabat ni Abdellilah Benkirane ne recourent-ils pas à l’application de la constitution et de ses règles pourtant éprouvées dans d’autres démocraties?
Manquent-il à ce point , l’un et l’autre, de courage politique au point de refuser les responsabilités prévues par le texte du 1er juillet 2011, pourtant appelées par les vœux de tous ceux qui aspiraient à une démocratisation de la vie politique du pays?