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FOAT : un danger pour la France ?

Publié le 30 mai 2013 par Edelit @TransacEDHEC

Marc Fiorentino, ancien trader et actuel patron de Monfinancier.com, révélait, le 23 mars 2012, la création d’un nouvel instrument financier permettant de spéculer contre la dette française. Retour sur la panique engendrée et son fonctionnement.

Un incontournable des présidentielles

Le candidat du Front de gauche Jean-Luc Mélenchon a été le premier à dégainer. Sans surprise, il a condamné ce nouvel instrument financier « qui va offrir des moyens considérables aux spéculateurs pour attaquer notre pays ». Pour lui, « ce nouvel instrument pour faire de l’argent sur le dos de notre peuple a aussitôt saisi par les ‘banksters’ qui ont déjà déclenché la crise de 2008″. EELV (Europe Ecologie Les Verts) a enchaîné, soulignant que « l’introduction de ces outils potentiellement nocifs est une régression porteuse de nouveaux risques ». « Il s’agit d’une attitude irresponsable, et d’un manquement à la ‘moralisation’ des marchés financiers prônée par le président-candidat Sarkozy ». Marine Le Pen a également dénoncé ce « fascisme doré, cette toute-puissance organisée des banques et des marchés financiers », pointant les coupables: Nicolas Sarkozy et François Hollande qui « laissent faire et se taisent ». Pourtant malgré les critiques plus ou moins vives émanant de l’ensemble de la sphère politique, le gouvernement français ne peut interdire la mise en place de cet instrument, surnommé FOAT, car celui-ci a été créé par une entreprise privée.

Une prophétie auto-réalisatrice ?

Le problème, avec ce genre de prédictions, c’est qu’elles risquent de s’avérer auto-réalisatrices. A force d’annoncer que les spéculateurs vont prendre la France comme cible, les investisseurs risquent effectivement de prendre peur et donc… de spéculer contre la France. Le pire n’est pas encore certain mais une chose est sûre: avec ce nouvel instrument, ils en ont désormais les moyens.

Mais qu’en est-il réellement? Ce nouvel instrument est-il vraiment dangereux ou bien les français ont-ils cristallisé leur rancœur contre la crise de la dette sur les FOAT ? Afin de répondre à cette question, il faut commencer par expliquer le fonctionnement de ce nouveau produit.

FOAT kesako ?

Ce nouvel instrument financier, baptisé « FOAT » et mis en place par Eurex une place boursière, permettra d’acheter ou revendre des contrats, par lesquels un investisseur s’engage à acheter (ou revendre) de la dette française. Ces contrats financiers corrélés à la dette française étant cotés, leur valeur fluctue en fonction de l’offre et de la demande. Il est donc possible de spéculer sur la dette française. Et, notamment, à la baisse car il est possible de vendre les contrats… avant de les acheter, comme c’est le cas pour les actions. On appelle ce principe la « vente à découvert ». Comment? Pour faire simple, il suffit de vendre un contrat à une certaine date en s’engageant à le payer en fin de mois, comme la loi le permet. Un intermédiaire « prête » ce contrat durant ce le laps de temps, moyennant rétribution. Si sa valeur a baissé avant la fin du mois, l’investisseur aura vendu plus cher qu’il n’a acheté. Et aura donc gagné de l’argent en pariant sur une baisse…

FOAT : un danger ?

Le produit est conçu pour spéculer contre la France mais il convient de nuancer. En effet, il est possible de jouer la dette française à la hausse comme à la baisse. La France peut donc aussi profiter de ce produit, tout dépendra des intentions des investisseurs. Si ce produit n’est pas arrivé plus tôt, c’est simplement que, jusqu’à présent, les évolutions des dettes française et allemande étaient étroitement liées sur les marchés. Un tel produit existant pour l’Allemagne, il n’était commercialement pas intéressant d’en créer un pour la France. Sauf que, depuis quelques mois avant la perte du AAA par la France, l’écart entre taux allemands et français s’agrandit. L’intérêt pour ce genre d’instrument est donc ravivé. Mais il y a longtemps déjà qu’il était possible de spéculer sur la dette de la France : au travers des CDS, ces contrats qui permettent de se couvrir contre le risque de faillite d’un Etat ou d’une entreprise. Il y avait également un marché de gré à gré pour acheter et revendre des obligations d’Etat. Par ailleurs, ce produit va permettre de mieux contrôler la spéculation. Paradoxalement, le fait d’avoir ce nouvel instrument va assainir les marchés financiers. Car le marché passait jusqu’à présent par les CDS qui ne sont pas réglementés. Si la France est attaquée, autant que ce soit au grand jour plutôt qu’en catimini. Néanmoins, la France peut souffrir de l’apparition de ce nouvel instrument. Déjà, les investisseurs prêtent depuis quelques semaines plus volontiers à l’Allemagne qu’à la France. L’arrivée de ce nouvel instrument ne peut qu’accentuer ce mouvement. D’autant que, comme le souligne Marc Fiorentino, il bénéficie d’un fort « effet de levier »: « Avec 50.000 euros, on peut vendre à découvert pour 1 million d’euros d’emprunt d’Etat français ». Les tendances, à la hausse comme à la baisse, seront donc accélérées.

AV


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