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trois fois rien, ou le dessin de bas étage

Publié le 04 juin 2013 par Laurentnoel

 Notes écrites  l’été dernier, oubliées, retrouvées, livrées aujourd’hui en l’état :

La touffeur n’empêche pas les énervements…

Un  : ce matin, petit déjeuner au soleil avec lecture du Monde. Mais pourquoi diable ce journal continue-t-il à publier les dessins de Plantu ? Je l’avais déjà évoqué dans un précédent billet à propos de Forain mais aujourd’hui,  son regard du jour sur l’actualité (édition du 14 août 2012) est encore plus calamiteux que d’habitude : incapable de caricaturer Fillon, il est obligé de lui faire porter une valise avec son nom grassement écrit  dessus. Qui peut bien rire, ou sourire, ou être touché par les dessins quotidiens de Plantu ?

Deux : promenade estivale sur la Toile. Je tombe sur les pages d’une artiste qui professait dans la région il y a des années. Curieux de connaître son évolution, j’avance dans son site, et y découvre une magnifique phrase d’Ingres : “Le dessin est l'honnêteté du peintre”. Tout irait bien si l’œuvre qui accompagne cette phrase n’était pas celle-ci. Je n’aurai pas l’indélicatesse d’ajouter un  commentaire.

Trois : une salle d’attente avec quelques exemplaires d’un magazine traitant de la pratique des arts. Dans un vieux numéro, une page sur la composition des Ménines de Velasquez signée d’un ancien animateur d’atelier de par chez moi, mais comme il y en a tant partout. Il recommande très sérieusement de lire l’organisation de la toile plan par plan… Evidemment je bondis, je relis, je cherche, tourne la page, reviens, espère, mais non, rien, aucune proposition de compréhension de la structure du tableau par, au contraire, l’oubli des plans successifs, par l’aplatissement de ces plans en un seul, celui de l’image. C’est pourtant là que la composition se révèle, bien au delà de la figuration. Il suffit par exemple de tirer la ligne qui joint les deux rosaces sombres gouttant du plafond et de la poursuivre vers le bas pour rencontrer le bras oblique d’un personnage, de prolonger les fuyantes (vers le lointain, donc) de la perspective pour atteindre paradoxalement les autres personnages situés au  premier plan et concorder avec leurs attitudes, de chercher à découvrir les lignes concourantes à celle du pied du chevalet  ou au contraire à la ligne directrice de la jeune fille agenouillée, d’en déduire les rythmes, d’y ajouter les correspondances entre le dos du châssis sur lequel travaille le peintre et les nombreuses surfaces rectangulaires de l’extrême fond de l’atelier. Et j’en passe. Une telle lecture structurelle illustre l’éternelle ambigüité  de la peinture : cette circulation incertaine, souvent troublante, du regard et de l’esprit  entre le plan de l’objet-tableau et la profondeur de l’espace représenté, comme une proposition de l’artiste au spectateur de dépasser la simple image pour aller vers la peinture, et comprendre que le dessin du tableau n’est pas qu’affaire de forme, de contour ou de sujet, mais aussi d’architecture d’une seule surface plane. Sans doute la vulgarisation recommande-t-elle de taire ce qui va un peu plus à l’intérieur de l’œuvre. D’un article de salle d’attente, fallait-il en espérer plus ?


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