Grégoire Delacourt, La première chose qu'on regarde, 2013.
C'est une bombe. Ce roman est une bombe. Une grenade lancée dans les conventions de la littérature, une explosion de mots, une oeuvre géniale.
Arthur, jeune mécanicien du nord de la France, est en train de regarder une série télé. Quand, soudain, on frappe à sa porte : c'est Scarlett Johansson. Au tout début, on se demande bien comment l'auteur va mener pendant 200 pages ce lancement audacieux. On se dit qu'on va vite s'ennuyer, que la narration aura vite épuisé tous les recours de l'original. Et puis, très rapidement, les choses prennent un autre tournant. Les personnages se creusent, gagnent en profondeur, et le récit s'enclenche. C'est parti. Impossible de vous en dire plus, ce serait trahir les ficelles de ce roman parfaitement bien construit. Car, du début à la fin, le suspense est total, l'écriture va crescendo.
Cette écriture qui transpire littéralement la poésie, tant dans sa tournure qu'à travers l'intertextualité que l'écrivain manie avec beaucoup de doigté. Pas de lourdeur, que des mots qui viennent à point, qui s'insèrent à une place qui leur est exactement dédiée. Là où cela devient magistral, c'est quand on se rend compte que l'auteur mêle allègrement cette poésie avec une ribambelle de référence contemporaines, pour donner un texte bourré de culture populaire et d'humour grinçant et tendre à la fois. Et le tout produit un roman coup de poing, une ode au contournement des apparences, au grattage du vernis et à l'exhumation de ce qu'il y a de plus fragile et de plus violent dans l'amour.