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Sortie d’une armoire, une robe accuse

Par Pmalgachie @pmalgachie
Sortie d’une armoire, une robe accuse Elsa s’avance vers la mort. Presque tranquillement. Sa vie a été pleine, ponctuée de publications et de succès. Mais le cancer l’a rattrapée et il ne lui reste qu’à profiter comme elle l’entend des dernières semaines, des derniers jours – quitte à se montrer joyeusement capricieuse. De temps à autre, une crainte surgit : elle n’est pas prête, dit-elle. Le plus souvent, elle essaie de ne pas y penser. D’autres y pensent pour elle. Les médecins, bien sûr. Et la famille. Surtout la famille : un mari, une fille, deux petites-filles, un homme et une majorité de femmes pour faire la lumière sur quelques épisodes du passé. Car le couple formé par Martti, artiste peintre réputé, et Elsa, auteure de livres de référence, n’est paisible que si on le considère de l’extérieur, sans creuser sous la surface. Une robe sortie d’une armoire sera le révélateur de tensions anciennes, longtemps cachées pour sauver l’amour, l’essentiel au fond. La robe qu’Elsa donne à sa petite-fille Anna appartenait à une autre femme : « C’est celle d’Eeva », dit Elsa. « J’ignorais qu’elle était restée dans le placard toutes ces années. » Ce n’est pas la première fois que des vêtements d’Eeva se retrouvent au mauvais endroit, signe d’une histoire moins fluide que prévu. Eeva était entrée dans la famille comme jeune fille au pair. Puis elle est devenue la maîtresse de Martti qui a failli tout quitter pour elle. Anna, désireuse de savoir et de comprendre, cherche les traces d’Eeva. Celle-ci fut une mère de substitution pour la fille d’Elsa, souvent absente en raison de ses activités. Des liens ambigus se sont noués avant de se distendre. Disparition d’Eeva. Jusqu’à la quête d’Anna, qui permet à Riikka Pulkkinen, romancière très douée, de faire renaître la jeune femme. De suivre son parcours, depuis les premiers moments de trouble en compagnie de Martti jusqu’à la fin de sa vie. L’armoire des robes oubliées est le deuxième roman de Riikka Pulkkinen, le premier traduit en français. Ses débuts en 2006, nous dit-on, avaient déjà été très bien accueillis par les lecteurs finlandais. Si Raja (La frontière) possédait quelques-unes des qualités de ce livre-ci, il n’est pas difficile de comprendre pourquoi. La finesse de l’approche dénote un sens aigu de la psychologie individuelle autant que collective. Tous les membres de la famille, et Eeva en sus, sont influencés par la compagnie des autres. Mais ils suivent leur propre chemin avec une volonté affirmée, même quand cela suppose des débuts de conflits. Qu’ils gèrent ensuite comme ils peuvent, c’est-à-dire au mieux. On s’attache à chacun, quels que soient les défauts qu’on découvre peu à peu. Ces personnages sont profondément humains, forces et faiblesses confondues dans des caractères clairement définis. Cette traduction, décidément, en appelle d’autres.

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