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Interview Flynt: « Je n’ai jamais rien fait dans le rap en fonction de la mode »

Publié le 09 juin 2013 par Wtfru @romain_wtfru

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C’est le genre de choses qui font plaisir. Quand un artiste intègre que l’on apprécie comme Flynt réussit à attirer un peu les spotlights, c’est un peu de la musique dans son ensemble qui y gagne. Avec le clip de « Mon Pote » dans lequel lui et Orelsan s’incrustent dans une trentaine de films culte, le rappeur parisien s’offre l’occasion de faire parler de lui et de s’ouvrir un champ d’action intéressant.
C’était donc l’occasion de l’interviewer pour connaître son ressenti sur ce buzz. Et parler de son parcours depuis J’Eclaire Ma Ville jusqu’à la sortir de son deuxième album, Itinéraire Bis, l’an dernier.

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En à peine une semaine, le clip de « Mon Pote » avec Orelsan atteint déjà les 800 000 vues. Comment vis-tu ce buzz ? Est-ce que c’est quelque chose à laquelle tu t’attendais ?
Je le vis très bien ! Qui s’en plaindrait ? On savait qu’on avait un clip original voire hors du commun entre les mains. On pensait bien qu’il allait faire un bout de chemin mais comme je ne suis pas de nature à m’enflammer, ni avant, ni après d’ailleurs, je n’en ai pas fait des tonnes avant sa sortie, ni après. Ce à quoi je ne m’attendais pas c’est cet engouement immédiat, ce raz de marée et le fait qu’énormément de médias en ont parlé, même les plus improbables dans mon cas comme Gala ou Télé Loisirs. Ce clip a véritablement crée l’événement le jour de sa sortie. Orelsan y est pour beaucoup vu son énorme nombre de fans. Et le fait que le clip s’adresse aussi aux cinéphiles a clairement fait la différence car tout le monde aime le cinéma.

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Comment est venu l’idée de ce clip ?
C’est Francis Cutter, le réalisateur du clip, qui a eu cette idée. C’est un ami de longue date de Nodey qui a conçu le beat du morceau. Nodey m’avait présenté Cutter il y a 2 ans, on s’était croisé plusieurs fois. Il est le pote de mon pote en fait. Tout le mérite lui revient. Je lui ai fait une confiance aveugle, il sait ce qu’il veut, il sait où il va. C’est est un réalisateur génial. J’espère que ce clip lui ouvrira des portes. Chaque titre a sa propre histoire, celle de « Mon pote » est une belle aventure.

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Ton album « Itinéraire Bis » est sorti il y a plus de 8 mois, tu penses que la sortie de cette vidéo va lui permettre d’avoir une visibilité supplémentaire ?
Le 15 octobre 2012 précisément. Les clips sont faits pour ça. Avant la sortie, ils annoncent et après la sortie ils permettent de continuer à faire vivre et à faire parler d’un disque. Moi j’ai tout misé sur le live avec cet album. Mon but c’était de faire un maximum de concerts et j’ai réussi mon pari puisque je viens de boucler une première tournée de plus de 20 dates en France, Suisse et Belgique. Mais quand tu postes des vidéos de live tout le monde s’en fout. Quand j’ai posté la vidéo du live de «Mon pote » au Zénith de Caen il y a quelques mois, personne n’en avait rien à foutre. Quand on a rempli le New Morning en février dernier et qu’à la suite de ce super concert on poste les vidéos, à part ceux qui ont vécu le truc le jour J, tout le monde s’en tape.. Par contre, un clip intéresse beaucoup plus le public ! Alors oui ce clip va permettre de rappeler que mon 2ème album est dans les bacs ou de faire savoir qu’il existe. La preuve, vous ne m’avez pas sollicité à la sortie de mon album et aujourd’hui c’est ce clip qui vous amène à moi. 7 mois pour sortir un 2ème clip on ne peut pas dire que le timing soit excellent mais voilà un disque se travaille aussi sur la longueur.

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C’est l’occasion d’élargir ton public, tu en es conscient ou ça ne t’intéresse pas forcément, sachant que tu as déjà une fanbase assez solide ?
C’est exact, j’ai pour habitude de dire que j’ai un public en or, fidèle, généreux et qui connait mes lyrics par cœur ! Je pense que quiconque fait de la musique veut toucher le plus de monde possible et vendre le plus de disques possible, même un type 100% indépendant et autoproduit depuis le début comme moi. Je ne rappe pas pour une niche ou pour une catégorie de personne en particulier. Je représente ceux qui se sentent représentés, d’ où qu’ils viennent. Ca ne me déplairait pas que toute la France connaisse mes paroles et chante mes refrains ! Mais pour y arriver je ne vais pas faire ce qu’une radio impose ou ce que le public veut entendre. Comme je dis dans le titre « Haut la main » : « je veux faire du bif sans salir la profession ». J’ai des convictions, une façon de faire et de voir le rap qui m’est propre et que je défends. Je ne suis pas prêt à faire certaines choses pour être plus connu dans la musique et pour y gagner plus d’argent. Donc si ce clip permet à des personnes qui ne me connaissaient pas de me connaître et bien tant mieux car ce morceau je l’assume totalement. Orelsan et moi sur le papier, on est un peu à l’opposé dans l’industrie du disque et pourtant ce titre s’est fait parce qu’on s’entend bien. Il se trouve qu’on s’est rencontré par hasard et que le courant est bien passé. La première fois qu’on s’est vus il m’a dit que ça lui plairait qu’on fasse un track ensemble un jour et presque 2 ans plus tard quand j’ai voulu faire un morceau un peu plus léger sur mon album après avoir écrit des titres durs comme « J’ai choisi mon camp » « En froid » ou encore « Quand tu s’ras mort », j’ai pensé à lui de manière évidente. Il avait le style qu’il fallait pour le morceau que j’avais en tête. Tout s’est fait très naturellement et c’est le plus important à mes yeux. Si j’avais voulu me servir d’Orelsan comme d’une vitrine pour tenter de m’accaparer son public ou pour toucher les radios, j’aurais commencé par faire un refrain à ce morceau et je l’aurais sorti avant ou en même temps que mon album. J’aurais pu mettre le paquet sur « Mon pote » à l’époque de la sortie de mon album. J’ai envoyé « Haut la main » en premier extrait, puis Itinéraire bis en 2ème.. Alors si un nouveau public me découvre grâce à ce titre, ça ne me pose aucun problème et c’est même très bien car la façon dont ce titre a été crée, la façon dont il est sorti fait que je reste en phase avec mon discours et avec ce que j’ai toujours été.

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Il a fallu attendre 5 ans entre « J’éclaire Ma Ville » qui avait connu un très bon succès d’estime, et ce deuxième opus. Pourquoi tant d’attentes ? Manque de moyen comme on peut le comprendre sur « La
Ballade des Indépendants » ?
J’ai mis du temps à me remettre à écrire après J‘éclaire ma ville. Plus de 2 ans. J’ai dit beaucoup de choses dans cet album et j’ai eu besoin de recharger les batteries pour écrire de nouveaux titres. J’ai ressenti le besoin de vivre des choses pour pouvoir mettre ma vie en chanson. Et puis j’étais fatigué aussi, j’avais beaucoup travaillé pour sortir ce disque. Après J’éclaire ma ville, j’ai fondé un foyer, cherché et trouvé un nouveau job, tout ça a pris beaucoup de place e de temps dans ma vie. Et puis oui quand tu roules en indé, tout prend un peu plus de temps. Moi je me suis lancé dans mon nouvel album avec zéro euro. Et enfin il faut souligner que je suis très lent et peu productif, je n’écris pas à la commande ou en studio, j’écris quand ça vient et quand j’ai envie. Tout cela explique le délai qui s’est écoulé entre les 2 disques.

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Tu es l’un des rares rappeurs qui ne surfent ni sur les nouvelles sonorités musicales ni s’enferme dans le moule stéréotypé « piano-mélo » sur lequel certains restent collés depuis dix piges. Tu te situes où par rapport à tout ça ? Quelles sont tes principales influences ?
Je n’ai jamais rien fait dans le rap en fonction de la mode, de ce que le public attendait où de l’âge de ceux qui achètent des disques. Je leur sers ce que je sais faire. Je ne me situe pas dans une « mouvance » en particulier mais si je devais définir mon rap je dirais que c’est un rap adulte et libre. Pour le choix des musiques, ma seule direction artistique c’est que les instrus défoncent et qu’ils fassent bouger la tête. J’ai mis 3 ans et demi pour trouver 13 instrus, c’est long. Je ne demande jamais à un beatmaker de travailler un son comme ci ou comme ça et je ne sollicite pas non plus les beatmakers « du moment ». Pour moi, « Itinéraire bis » est l’absolue continuité de « J’éclaire ma ville », je n’ai pas changé de direction artistique d’un pouce. Au final, je trouve que c’est plus fort que « J’éclaire ma ville ». Je suis très fier de ce disque et de la façon dont j’ai mené ma barque pour y arriver.

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Tu as l’air d’un électron libre capable d’inviter La Rumeur, Orelsan ou d’être l’une des têtes d’affiches de Can I Kick It?. C’est tout à ton honneur mais c’est pas trop dur de jongler entre différents genres sachant que les amateurs de rap sont souvent très fermés sur un style.
Je n’ai pas du tout le sentiment de jongler entre différents genres et je ne me pose pas du tout ce type de questions, j’aime certains raps de La Rumeur et certains raps d’Orelsan, ce n’est pas anormal pour moi. En ce qui concerne mes collaborations, tout est une question d’affinités, c’est ce qui déclenche tout, il n’y a pas de calcul ou de stratégie derrière.

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Et le futur, c’est quoi pour toi ? Est-ce que tu fais parti de ceux qui n’arrêtent jamais d’écrire et pense déjà à un nouveau disque ou tu préfères profiter de la sortie du dernier et le défendre encore
un petit moment ?
Actuellement je cherche du travail. J’avais démissionné de mon ancien poste pour sortir Itinéraire Bis et pour faire une tournée, c’est fait ! Et même si j’espère bien poursuivre les concerts à la rentrée et en faire le plus possible, la suite pour moi c’est de retrouver du taf. Ce n’est pas contraint que je recherche du taf ça a toujours fait partie de mon projet car j’ai aussi des ambitions à ce niveau et des projets pour ma famille donc j’espère trouver dans les meilleurs délais malgré une conjoncture défavorable. Généralement j’écris très peu, suis très rarement en studio. Je n’ai pas écrit une ligne depuis près d’un an maintenant, ça me fait un peu la même qu’après J’éclaire ma ville tu vois. Mais je rêve de sortir un 3ème album relativement rapidement et je n’ai pas pour projet d’arrêter le rap.

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Dernière question, tu fais souvent des références footballistiques. Le changement de cap de la Ligue 1 avec des Ibrahimovic, Pastore, Thiago Silva, Falcao, Rodriguez, ça t’inspire quoi ?
Je ne parlerai pas de changement de cap de la Ligue 1 puisque seuls Paris et maintenant Monaco voire une ou deux autres équipes peuvent s’offrir des joueurs très très chers en Ligue 1. Moi je suis content qu’on ait une grosse équipe à Paris, on attend depuis si longtemps l’équipe que la ville mérite ! Moi je veux voir Paris champion de France et jouer la Ligue des champions chaque année. On veut des joueurs de classe mondiale à Paris. Cette année on a été bien servi, on en redemande.

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Le clip de « Mon Pote »

Crédit photo: Meda
 

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