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Déchéance ou boom culturel ?

Publié le 22 avril 2008 par Aurialie

Le centre Levada a organisé un sondage en avril pour savoir quels étaient les auteurs et réalisateurs les plus talentueux pour les Russes. Les réponses sont les suivantes :
- auteurs contemporains : Akounine et Dontsova (4%), Coelho (3%), Soljenitsyne (2%), Oustinova, King, Marinina, Pelevine et d'autres (1%)
- auteurs classiques : Pouchkine (4%), Tolstoï (3%), Dostoevski (2%), Cholokhov, Boulgakov, Lermontov, Tchekhov (1%), Shakespeare, Hugo, Dumas, London (- de 1%)
- réalisateurs : Mikhaïlkov (21%), Riazanov (8%), Spielberg (6%), Bondartchouk senior (5%), Kontchalovski (4%), Tarantino (3%), Besson (2%)

Une semaine plus tard, sans que cela n'est aucun rapport à priori, Newsweek publiait un article sur l'état de la culture en Russie. Alors que la culture underground prospère (pièce satirique des frères Presniakov, performance, vernissage dans des galeries multimédia, pièce de Victor Pelevine sur Lénine), la culture de masse en fait autant (programme télé mélangeant filles en bikini et char de l'armée, très fort succès du jeu "Qui veut gagner des millions ?", spectacles des vieux chanteurs de l'ère soviétique, reportages sans fin sur les journées de Medvedev et Poutine). La question est donc : déchéance ou boom culturel ?

Bien sûr, cette question peut être posée dans tous les pays : la "haute" culture ne concerne qu'une minorité, la majorité regarde la télévision. Mais en Russie, il y a une rupture stupéfiante entre une culture arty minoritaire et une culture d'État conformiste. De plus, la culture du spectacle (sitcom, romans policiers, astrologie, télévision) marginalise la voix des l'intelligentsia, autrefois respectée et influente, notamment au moment de la Glasnost.

L'article cite le cas, déjà mentionné ici, de deux chanteurs, contestataires et underground à l'époque soviétique, symbole de notre contemporaine, car ils ont pris deux chemins différents : Andreï Makarevitch chante au concert célébrant la victoire de Medvedev tandis que Iouri Chevtchouk déclare que "la stabilité de Poutine est la tombe de la créativité" suite à cette même victoire. Chevtchouk se voit maintenant interdit d'antenne, car producteur ou présentateur ne veulent prendre le risque de voir leur nom inscrit sur la blacklist du Kremlin. Il s'est donc mis en place un système insidieux qui récompense la conformité. Le présentateur Sergueï Dorenko, mis au placard après avoir apporté son soutien à un candidat anti-Kremlin aux élections ukrainiennes de 2004, a déclaré : "l'horizon de notre nation s'est resserré, l'esprit russe s'est fermé. Les intellectuels se sentent perdus." D'autant plus que des lois veulent encore limiter les espaces de parole libre.

Un expert du développement des adolescents estime que l'intention du gouvernement est de transformer les jeunes Russes en zombie afin qu'ils n'aient aucune pensée politique indépendante. Les quelques programmes culturels diffusés à la télévision ou à la radio sont tolérés par le gouvernement du fait de leur faible audience. La question est donc maintenant de savoir si la nouvelle génération d'auteurs comme Zakhar Prilepine va déterminer le futur intellectuel de la Russie ou bien si celui-ci va continuer de suivre un conformisme de masse.

L'art libre est une question très actuelle, un live journal intitulé ru_art_free (avec le slogan "in art we free !") a même ouvert cette semaine.

Image : Maiakovski et Rodtchenko - Lisez le journal La jeune garde via A Soviet poster a day


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