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Les Damnés: La Malédiction des Petrova – Chapitre XXVII

Par Artemissia Gold @SongeD1NuitDete

Klaus faisait frénétiquement les cent pas dans la grande salle en lançant à intervalle régulier un regard assassin sur le corps encore inconscient de la jeune femme qu’il n’avait pas réussi à réanimer. Il fulminait intérieurement en se demandant ce qu’Anya avait encore bien pu inventer. Si elle s’imaginait pouvoir s’en sortir en feignant un simple évanouissement elle se trompait lourdement. Elle s’était suffisamment jouée de lui comme cela. Alors qu’il s’apprêtait à tester une méthode de réveil plus radicale, la jeune femme rouvrit péniblement les yeux et tenta de se relever en s’appuyant l’assise d’un fauteuil. Elle regarda autour d’elle incrédule en voyant où elle se trouvait et sursauta en entendant la voix de Klaus gronder derrière elle :

-   Qu’est ce que tu croyais ? Qu’en me jouant cette comédie, j’allais te prendre en pitié ?

La jeune femme vacilla en se redressant sur ses jambes et enserra ses tempes de ses deux mains pour tenter de comprimer la douleur lancinante qui les frappaient.

-   Mais de quoi diable est-ce que tu me parles ? Comment j’ai atterri ici ? Et que s’est-il passé ?  demanda-t-elle en voyant la table renversée et le désordre qui régnait dans la pièce.

Klaus considéra la jeune femme en plissant les yeux. Furieux à l’idée qu’Anya lui jouait un nouveau tour, il gifla brutalement Véra qui, sous la violence du coup, perdit l’équilibre et retomba lourdement au sol. La sorcière mit quelques secondes à reprendre ses esprits et tenta difficilement de se redresser sur ses avant- bas. Encore abasourdie par le coup, elle ne parvint pas à se relever, elle recula en se traînant sur le sol de pierre en voyant le vampire s’approcher, effrayée par ce regard impitoyable qu’elle ne lui connaissait que trop bien et qu’il réservait généralement à ces victimes.

-   Ça suffit Anya ! tonna-t-il. Ce petit jeu a assez duré !

Véra écarquilla les yeux de surprise en entendant ces paroles et tenta de faire rapidement le point sur ses souvenirs embrouillés. Elle se revit fuir Anton dans les ruelles de Sofia, elle se souvint également l’avoir menacé, puis… plus rien. Elle se redressa et se releva furieuse en comprenant ce qui avait pu se passer :

-   L’espèce de salopard ! Je n’arrive pas à croire qu’il m’ait fait un coup pareil ! fulmina-t-elle devant le regard perplexe de Klaus qui reconnaissait soudainement les intonations de voix et le caractère emporté de Véra.

-   De quoi est-ce que tu parles ? demanda-t-il soupçonneux.

-   D’Anton ! Et de ses sorts tordus comme celui qu’il m’a lancé avec l’aide de ta fichue Anya, s’emporta-t-elle.

-   Qui a brisé le sort et où est-elle ? s’énerva-t-il en l’agrippant brutalement par les épaules.

- Je ne sais pas…je n’étais pas consciente, bredouilla-t-elle en lâchant un gémissement de douleur tant les doigts du vampire lui meurtrissaient la chair.

Klaus approcha son visage de celui de la sorcière paralysée par l’intensité du regard  scintillant de  colère  qu’il braquait sur elle :

-    Tu as intérêt à me la retrouver ou je te réserve le même sort qu’à Anton quand il débarquera ici, souffla-t-il avant de la repousser brutalement et de sortir de la pièce en écartant violemment les deux pans de la porte.

Véra resta un moment abasourdie, incapable de bouger. Elle restait immobile au milieu de la pièce dévastée, le souffle court. Une sourde colère, qu’elle ne chercha pas à contenir, l’envahit soudain. D’un geste, elle envoya les sièges, dont la plupart étaient  renversés au sol, rejoindre la table disloquée à l’autre bout de la pièce. Elle inspira profondément avant de quitter à son tour la pièce.

Au dehors, la nuit avait peu à peu envahi la forêt environnante, tapi dans les fourrés, Anton attendit patiemment que les ombres envahissent également la cour du château pour y pénétrer sans risque. Un sourire sarcastique apparut sur les lèvres du jeune homme en voyant  que la herse qui protégeait normalement l’entrée était levée.  Klaus était trop arrogant pour s’imaginer que quelqu’un puisse s’introduire chez lui sans son autorisation. Il lui simplifiait la tâche et il lui en fut presque reconnaissant.  Mais au moment où il s’apprêtait à passer sous la lourde grille, il se sentit soudain soulever de terre. Et avant qu’il puisse esquisser un quelconque geste, il se retrouva à nouveau dans la forêt acculé contre un tronc. Au travers de l’obscurité, presque totale maintenant dans les sous-bois, il distingua le visage d’Elijah. Encore abasourdi par ce déplacement forcé et rapide, il peina à reprendre son souffle :

-   Mais qu’est-ce que vous faites ? s’emporta-t-il en tâchant de reprendre une contenance.

-  A  mon grand regret, je vous sauve la vie, alors que j’ai moi-même une furieuse envie vous faire la peau pour avoir embarqué Anya dans vos stupides plans. Votre père a levé le sort.

-    Nous étions à deux doigts de réussir! reprit Anton dépité.

-   Vous étiez surtout à deux doigts de vous faire tuer, Anya et vous!

Anton jeta un regard soudain accablé vers le château tout proche.

-    C’est terminé Anton, rentrez chez vous. Votre père a sûrement besoin de votre aide pour contenir les deux furies avec lesquelles je l’ai laissé, lâcha-t-il avant de s’éloigner sous le regard perplexe du jeune homme.

-   Vous ne venez pas avec moi ?

-    J’ai deux trois choses à régler avec mon cher frère avant.

Elijah pénétra dans le vestibule plongé dans l’obscurité. L’écho de ses bottes sur le sol de pierre raisonna dans le silence. En passant devant la grande porte de la salle, dont les deux battants étaient largement ouverts, il regarda atterré le spectacle de la pièce dévastée et  réalisa alors qu’Anya avait sans doute échappé au pire.  Il n’y avait aucune trace de Klaus ou de Véra au rez-de-chaussée. Il gravit les marches qui conduisaient à l’étage et se dirigea vers la chambre de son frère. Il s’arrêta sur le bas de la porte. Debout devant une des fenêtres aux vitres brisées, se dessinait la silhouette du vampire qui lui tournait le dos. Les poings serrés le long du corps, il contemplait le clair de lune qui projetait à l’intérieur de la pièce un halo de lumière pâle. Dans l’une de ses mains, Elijah distingua une forme blanche dont il caressait la surface lisse :

-   Regardez qui revient au pire moment…, lâcha-t-il sans se détacher de sa contemplation.

-   Je vois que tu as profité de mon absence pour réaliser quelques travaux de démolition, ironisa Elijah en pénétrant dans la pièce.

-    Je ne suis pas vraiment d’humeur à plaisanter, Elijah. Tu savais ce qu’elle mijotait ?

-   Non, j’étais trop occupé à gérer les conséquences de tes actes irréfléchis, répondit-il.

Le vampire lâcha un bref ricanement et se retourna un sourire mauvais sur les lèvres :

-    J’en déduis que Noura fait partie des nôtres. Tu devrais me remercier pour le cadeau au lieu de me le reprocher. N’est-ce pas ce que tu voulais ?

Elijah se crispa, serra les mâchoires et tâcha de garder son sang froid devant l’arrogance exaspérante de son cadet.

-  Tu n’as pas idée de ce que tu as engendré et le jour où tu t’en rendras compte j’espère être au premier rang pour assister au spectacle. Transformer une sorcière en vampire n’a pas été une de tes idées les plus brillantes.

Klaus ne répondit pas immédiatement et porta son attention sur la pierre de lune qu’il avait gardée dans sa main avant de la remettre dans le coffret dans lequel il la gardait précieusement:

-   Il ne manquerait plus qu’elles s’y mettent à deux pour me pourrir la vie…, dit-il en replaçant le coffret dans la malle.

-   Elles deux, notre père, nos frères…et quelques sorciers aussi. En d’autres termes : il est plus aisé de compter tes alliés que tes ennemis.

Klaus se releva, s’approcha pour faire face à son aîné  et le dévisagea froidement:

-    Qu’est-ce que tu es venu faire ici au juste?

Elijah soutint un moment le regard bleu avant de répondre :

-   Rends-leur le grimoire des Petrova. Véra a traduit l’incantation qu’il te faut pour lever le sort, il ne t’est plus d’aucune utilité. Ce livre est plus important pour elles qu’il ne l’est pour toi. En échange, je tâcherai de convaincre Anya de ne plus tenter quoique ce soit pour récupérer la pierre.

La proposition  fut accueillie par un éclat de rire qui exaspéra Elijah :

-    Pourquoi irai-je négocier avec elles alors qu’il me suffirait de les tuer pour avoir enfin la paix ?

-    Premièrement parce que personne ne connait toutes les conditions nécessaires pour lever la malédiction. Il serait très imprudent de ta part de t’en prendre à leur famille avant de le savoir. Surtout qu’elles sont plus à même de le découvrir que toi. Et deuxièmement parce que ce livre contient un sort qui bridera définitivement les pouvoirs occultes  des Petrova  et cela, crois-moi, c’est réellement dans ton intérêt.

Klaus jeta un regard sceptique à son frère :

-   Et pourquoi feraient-elles une chose pareille ? Qui me dit qu’elles ne l’utiliseront pas contre moi ?

-  Ces pouvoirs sont à l’origine de tout ce désastre et ont  détruit leur famille. De plus, je le confierai à quelqu’un de confiance.

Klaus se détourna et se dirigea à nouveau vers la malle contenant le grimoire pour l’en sortir. Il passa une main sur la couverture en cuir et réfléchit un moment. L’idée de négocier avec elles lui étaient particulièrement répugnante mais il devait bien admettre mais que les arguments d’Elijah étaient des plus censés :

-   Très bien. Mais ce sera à deux conditions. Premièrement, si elles veulent récupérer le livre, elles devront m’apporter des réponses sur  les zones d’ombres qui planent sur cette malédiction et que cette chère Waleda a pris un malin plaisir à  emmener avec elle dans la tombe. Je veux savoir quel est le lien entre leur sang et la malédiction. Je remettrai le livre à ce moment là à Anya, et à elle seule. Je lui laisse le soin de choisir le lieu.

-   Et la deuxième condition ?

Klaus s’approcha à nouveau de son frère et garda un moment le silence avant de répondre :

-   Je te veux à mes côtés. Plus de trahison, plus de double jeu. Ces deux conditions ne sont pas négociables.

Elijah resta un moment interloqué par cette demande qu’il n’avait pas vu venir. Conscient de ce que cette décision impliquait comme sacrifice, le vampire se détourna et arpenta doucement la chambre avant de répondre :

-   J’ai ta parole que tu ne t’en prendras pas à Anya pendant l’échange ?

-   Pas tant qu’elle respecte les règles. A toi de la convaincre.

 Contraint, Elijah consentit d’un simple signe de tête et fit mine de partir. Il fit quelques pas vers la porte lorsqu’il s’arrêta soudain et fit volte face pour se diriger à nouveau vers son frère.

- Une dernière chose avant que je ne parte lui faire part de ta proposition….

Klaus ne vit pas le coup venir. Le poing d’Elijah vint si violemment frapper sa mâchoire qu’il en perdit l’équilibre et retomba brutalement contre un des montants  de la cheminée. Klaus, sonné et interloqué,  dévisagea son frère.

  –  Ça, c’est pour ce que tu as fait à Noura, lança-t-il par-dessus son épaule.

Klaus se releva péniblement et porta une main à sa mâchoire douloureuse en lançant un regard noir en direction de la porte que venait d’emprunter son aîné.

- Je suppose que je n’ai plus besoin de la localiser maintenant, lança une voix derrière lui.

Le vampire se retourna pour faire face à la sorcière qui le considérait avec mépris.

- Oui…effectivement ce n’est plus la peine. A se demander à quoi tu pourrais me servir maintenant. A part peut-être…

Véra eut un sursaut de surprise en voyant soudainement le vampire à quelques centimètres de son visage, des veines saillantes entourant ses yeux injectés de sang. Elle n’eut pas le temps de réagir. Il planta violemment ses crocs dans sa gorge. Elle poussa un cri de douleur et tenta en vain de le repousser. Lorsqu’il la relâcha, elle tomba à genoux, la main posée sur son cou ensanglanté.

- A part peut-être à ça…, reprit-il en essuyant du dos la main le sang qui recouvrait de ses lèvres avant de quitter la pièce sans même un regard vers la jeune femme en larmes.

Elle resta un moment au sol avant de se relever péniblement et de s’appuyer au mur les jambes tremblantes, le souffle court. Son regard se posa sur la malle que Klaus avait laissée ouverte en partant. Elle se dirigea vers elle en chancelant et s’agenouilla pour se saisir du coffret dans lequel le vampire gardait la pierre de lune.


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