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Œil tout contre œuvre

Publié le 25 juin 2013 par Lifeproof @CcilLifeproof

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Simon Hantaï, Blancs, 1974. Huile sur toile. © Adagp, Paris

Le défi que je me suis lancée en entrant dans l’exposition de Simon Hantaï était de ne regarder que les œuvres, pas les explications ni les cartels. Faire abstraction de toute médiation et ne regarder que le rendu du travail de l’artiste. Défi bien plus difficile à relever qu’il n’y paraît, tant notre œil est habitué à glisser des textes aux œuvres dans les espaces d’exposition. Parfois il nous arrive même de chercher dans l’écrit une justification à la présence des œuvres que l’on a sous les yeux.

Cela m’a fait beaucoup de bien et m’a rappelé que l’on peut aussi juste regarder, sans chercher à comprendre, sans chercher à expliquer et que si l’on se plonge totalement dans les œuvres, le sens vient de toute façon.

Plusieurs fois, au début, j’ai dû me rappeler à l’ordre en m’interdisant de lire ne serait-ce que les titres. Petit à petit, je me suis mise à ne plus voir que les œuvres, leurs couleurs, leurs formes, leur matérialité. Se concentrer sur la matière, pigments et toile, fut jubilatoire. Avec Simon Hantaï ce sont les traces de la peinture que l’on observe, celles qui se sont posées là où le pliage préalable de la toile le permettait. Exercice simple, résultat fascinant car Simon Hantaï a développé de véritables techniques de pliages d’une grande diversité. Grâce à cette monographie, nous pouvons nous rendre compte de la profondeur de son travail, de ses recherches plastiques. Différents degrés de pliage sont à l’œuvre, les géométriques par exemple, me semblent exprimer le côté méthodique de l’artiste ainsi que son obsession pour cette technique.

Plus poétiques sont les pliages qui recouvrent toute la surface de la toile et font penser au sol des forêts jonché de feuilles. D’autres évoquent de sublimes fonds marins, tout cela dans un rendu dont on se doute que le hasard a toute sa place.

La matière est souvent épaisse, parfois granuleuse. Les tons vifs dominent et sont accentués par la rectitude de certains pliages les transformant en silex tranchants.

Le blanc prend de plus en plus d’importance au fur et à mesure des salles, il devient constitutif de l’œuvre évoquant à la fois le vide et l’espace. Le hasard nous apparaît comme de plus en plus maîtrisé, les formes se synthétisent donnant un travail plus stylisé dont la vision entre plus directement dans l’œil. Disons plutôt que l’œil a l’impression de saisir les formes plus aisément. Le rapprochement avec les anthropométries d’Yves Klein et les papiers découpées de Matisse devient progressivement une évidence sans pour autant qu’on en oublie les œuvres de Simon Hantaï.

D’autres œuvres encore évoquent des visages burinés par le temps et des morceaux de la terre vus de l’espace.

Plusieurs toiles m’ont fait l’effet de confettis lancés près de moi, une multitude de traces de couleurs de tailles modestes les unes à côté des autres. Une explosion de gaieté qui accroche notre œil et descend doucement sur les lèvres pour y former un sourire.

Un vrai moment de peinture !

Christelle.

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Simon Hantaï

22 mai – 2 septembre 2013

Centre Pompidou


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