Provins est l'une des quatre villes du territoire des comtes de
Champagne (avec Troyes, Lagny et Bar-sur-Aube) où se tenaient, entre le
XIe et le XIVe siècle, les grandes foires
commerciales annuelles qui mettaient en contact le nord de l'Europe avec
le monde méditerranéen. Mais elle est la seule à avoir admirablement
conservé l'architecture et l'urbanisme qui caractérisaient ces grandes
villes de foires médiévales.
Au cours de la période gallo-romaine, le site actuel de Provins se
trouvait sur deux importants axes régionaux : la route de Soisson à
Troyes vers le nord, et la route vers Sens en direction du sud-ouest. Le
plus ancien document mentionnant Provins, une ordonnance de Charlemagne
datée de 802, montre que le site était déjà une place fortifiée. En
raison de son importance politique et commerciale, le château, placé sur
une éminence, fut fortifié aux XIe et XIIe siècles. Son enceinte d'origine (castrum)
était petite, mais l'habitat se développa rapidement en dehors de ces
fortifications et fut à son tour entouré par une palissade en bois à la
fin du XIIe siècle. Une troisième ligne de fortifications,
cette fois construite en pierre, vint s'y ajouter dans la première
moitié du XIIIe siècle.
La ville s'est développée au sud du plateau crayeux de Brie, dans une
région de collines basses, au confluent de la Voulzie et du Durteint.
Elle est formée de la ville haute, qui s'est implantée sur un éperon du
plateau de Brie, et de la ville basse qui s'étend plus à l'est, au
confluent des deux rivières. La ville haute se caractérise par ses
petites maisons construites en pierre et à colombage, et par ses espaces
verts et ses jardins. Elle comporte deux grands édifices, la « tour de
César », ou Grosse Tour, édifice en pierre remontant au XIIe siècle et formé de trois grandes salles superposées couvertes par un toit conique du XVIIe siècle ; l'église romano-gothique Saint-Quiriace. La construction de l'église a commencé au XIIe
siècle par celle d'un chœur de dimensions impressionnantes et se
poursuivit jusqu'au déclin de Provins, en 1320, avec celle de la croisée
de la nef et de ses deux premières travées. La voûte qui surmontait la
croisée, endommagée par un incendie au XVIIe siècle, fut
remplacée par une coupole. Le centre de la ville est occupé par
l'ancienne place du marché, entourée par des maisons qui se sont
développées en fonction des foires, et dont chacune comporte de vastes
caves.
Les remparts du XIIe siècle ceignent encore aujourd'hui
la ville haute sur trois de ses côtés. Ils sont relativement bien
conservés, alors que l'enceinte de la ville basse a été démantelée au
XIXe siècle. Le secteur de la ville basse fut d'abord occupé par des complexes ecclésiastiques, dont les églises Saint-Ayoul et Sainte-Croix.
Lorsque la ville se développa dans la vallée, les ordres religieux
créèrent des lots, construisirent et vendirent des maisons en suivant un
modèle répondant aux besoins suscités par les foires. Comme la
consistance du terrain ne permettait pas de créer des salles entièrement
souterraines, les aires de stockage furent construites au niveau du sol
en utilisant un type de construction voûtée semblable à celui mis en
œuvre dans la ville haute. Les constructions privées des XIIe et XIIIe
siècles peuvent être subdivisées en deux groupes : celles dont la
fonction était multiple, et celles qui n'avaient que des fonctions
commerciales. Indépendamment de cette distinction, toutes les anciennes
maisons de Provins présentent un point commun : leur système de caves
voûtées, construites entre le XIIe et le XIVe
siècle. Celles-ci ont pu être soit entièrement souterraines (ville
haute), soit partiellement construites au-dessus du sol (ville basse),
mais toutes ouvrent sur la rue par une grande porte au-delà de laquelle
la différence de niveau est compensée par un large escalier de pierre.
Le plus ancien édifice de la ville est probablement la Maison romane du
XIIe siècle (c'est aujourd'hui le musée), construite en
pierre de taille. Sa position dans l'ancien quartier juif suggère qu'il a
pu s'agir à l'origine d'une école rabbinique, ou même d'une synagogue.
La ville basse de Provins témoigne plus particulièrement de la
transformation de différents processus artisanaux en une fabrication
industrielle, mutation dont les lieux mêmes existent encore aujourd'hui.
L'argile utilisée pour éliminer la graisse de la laine était extraite
de trois carrières situées sur les pentes du plateau ; leurs galeries
souterraines au tracé compliqué, creusées à différents niveaux, ont
également été utilisées par la suite pour le stockage du vin ou d'autres
marchandises.