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Livre : Sous la plume - Petite exploration du pouvoir politique

Par Plumesolidaire

 

      Retour sur la Première rencontre entre écrivains publics
d'Ile-de-France

"Les politiques sont des gens relativment vides.
Ce sont des forces, des énergies,des corps.
Il faut les remplir."
Marie de Gandt

Brillante, intelligente, cultivée, énergique, courageuse, lucide, claire et intègre, et...jolie.

Marie de Gandt a tout pour plaire et exprime bien des qualités.

Elle en manifeste une dans laquelle je me reconnais pleinement lorsqu'elle évoque ces origines sociales et son éducation de gauche, et son impossibilité de s'identifier à la gauche socialiste.

Ma problématique est différente mais conduit à la même impasse : élevé dans une famille de droite, je suis passé par la case gauchiste libertaire, puis par celle du Parti Socialiste.

En rupture avec la gauche de gouvernement, j'ai aussi fait l'expérience du travail avec des mairies de droite.

Sans succès.

Peut-on concilier les contraires et trouver le bon positionnement du curseur ?

Je le pense, à condition de déconstruire chaque problématique en tentant de la dé-politiser, de l'extraire des influences idéologiques partisanes.

En lâchant prise avec les myopie partisanes, ses clans et ses intérêts, il devient possible de rompre avec l'éternel désir d'être accepté des uns et des autres, pour mieux se retrouver concilié avec soi-même.

Plume Solidaire

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Marie de Gandt. Je te plumerai…

PORTRAITCette universitaire venue de la gauche s’est retrouvée à écrire les discours de Sarkozy et à ne pas détester cet univers inconnu.

ParCHLOÉ AEBERHARDT

Si le fond engageait nécessairement la forme, ceci ne serait pas un article de presse, mais une dissertation. Oubliée la trilogie thèse-antithèse-synthèse, trop petit bras pour Marie de Gandt. La cérébralité de cette ancienne plume de Sarkozy appellerait une dialectique tendue vers la réconciliation des contraires. Bref, si le fond engageait la forme, il faudrait écrire Marie de Gandt culturé et compliqué.

Evidemment - ce serait trop facile -, la dame n’a pas la tête tristoune de l’emploi, si bien que, la première fois qu’on la voit, on se frotte les yeux : quoi, une plume élyséenne peut être autre chose que gris pigeon ? Double solaire du peu riant Guaino, qui conjuguait sous Sarkozy les fonctions de scribe et de «conseiller spécial», l’oiseau de Gandt a les cheveux blond paradis, sautille sur des échasses python et déploie créoles, bague à phalange et sac argenté Chanel. Dans son livre, elle raconte son quinquennat passé à écrire des discours pour trois ministres, dont Xavier Bertrand, puis un président, Nicolas Sarkozy. A l’Elysée, Guaino rédige les textes mémoriels, elle, les allocutions techniques. «Pour moi, au début, les hommes politiques, c’étaient des pingouins», avoue-t-elle dans un éclair de simplicité.

Dans la vraie vie, Marie de Gandt, 37 ans, enseigne la littérature comparée à l’université de Bordeaux, où elle passe deux jours par semaine. Accro aux Haribo et violoniste à ses heures, elle est spontanée et drôle. «Joyeuse», estime son ami Laurent Wauquiez, camarade d’hypokhâgne au lycée Henri-IV aujourd’hui vice-président de l’UMP. En interview, elle se révèle concentrée, limite sévère. Ce qui ressort de notre échange étrangement formel : rien, pas même ses escarpins, n’échappe à sa réflexion. «L’état perché me permet de ne pas adhérer au sol», analyse-t-elle sans rire. Là est l’obsession gandtienne : ne pas se laisser emprisonner par un corpus idéologique, ni un héritage psychique, quitte à surjouer le détachement en défiant la gravité et sa fichue manie de contraindre les esprits élancés à coller vulgairement au sol. Elle résume : «J’ai cette envie de ne pas appartenir.»

Sa liberté est avant tout politique. Marie de Gandt a servi la droite au pouvoir, pourtant elle «vient de la gauche». Pourquoi ne pas dire simplement qu’elle «est de gauche» ? Petit 1, l’expression fleure une«bienpensance»que l’intellectuelle réprouve. Petit 2, elle ne traduit pas le «désancrage» qu’elle cultive et (merci Cahuzac) dans lequel beaucoup se reconnaîtront : «J’ai des principes de gauche, malheureusement je trouve la gauche d’une nullité affligeante.» Elle rêve d’un «aggiornamento» du PS qui donnerait naissance à un groupe social-démocrate composé de «gens responsables et rationnels, de gauche comme de droite».Le centre n’a pas sa faveur. Trop dépendant de ses voisins, précise-t-elle. Pas assez flamboyant pour elle, pense-t-on. Elle ne dira pas pour qui elle a voté en 2012, encore moins en 2007, année de son arrivée surprise sous les ors ministériels.

A l’époque, elle vient d’accoucher de son premier enfant (elle attend le troisième) et, bien qu’agrégée et normalienne, cherche un poste de maître de conférences. Wauquiez lui propose de devenir plume.«Laurent me donnait la chance d’observer l’envers d’un monde. Cela ne se refuse pas»,explique l’opportuniste. Infiltrée chez l’ennemi, elle tait ses origines discordantes et veille à ne pas céder à «l’empathie intellectuelle». Tâche difficile, l’ogre bleu s’avérant plus séduisant que prévu. «Je suis arrivée persuadée que la gauche, c’était la solidarité collective et la droite, l’égoïsme individuel.»Six ans plus tard, elle préfère «responsabilité» à «égoïsme» et reconnaît à l’UMP une prétendue «droiture morale» qu’en digne fille de soixante-huitards, elle ne soupçonnait pas.

Chez les de Gandt, la particule vient sans majuscule ni mythologie familiale. Adeptes du principe éducatif «Fais ce qui te rend heureux»,les parents de la jeune femme, prof de philo et psychanalyste, se sont bien gardés de critiquer ce choix qu’ils n’ont pas compris. A la grande époque, eux-mêmes avaient fait bondir père et mère, notables et cathos de droite, en déménageant des beaux quartiers à Ivry-sur-Seine pour donner des cours d’alphabétisation à des immigrés maliens. De son côté, son mari Guillaume Erner, journaliste à France Inter, soutient son entreprise «bizarre» «Cela ne l’a pas empêché de faire des éditos à contre-courant de ce que j’écrivais pour le Président !»s’exclame-t-elle. Ni d’aider ses amis socialistes à préparer la soirée du 6 mai 2012, alors même que sa femme cravachait pour le camp d’en face. La gifle vient de ses confrères de Bordeaux, où, après avoir décroché un poste en 2009, elle travaille en parallèle. «Certains allaient jusqu’à quitter la salle lorsque j’y entrais.» Dans les couloirs de l’Elysée, en revanche, ses collègues, pas dupes, la charrient sans plus, préférant lui rappeler ce qu’est une bonne droite lors de leurs séances de combat au dojo du palais. «Marie détonnait totalement»,sourit Wauquiez. N’habite-t-elle pas un loft dans le IIIe? Pour faire vite (elle en convient elle-même), n’est-elle pas «l’idéal type de la bobo» ? Ne croyant pas si bien dire, Sarkozy vante sa «singularité». Elle en conclut que la gauche, «sûre de son bon droit»,est plus sectaire que la droite, «sujette au doute». «Or, s’amuse-t-elle, j’ai de l’affection pour les gens qui doutent.»

Toute l’affection du monde ne suffit pas à lui faire avaler le discours de Grenoble, à l’été 2010, où surgit le concept de déchéance de la nationalité. Ne savait-elle pas où elle mettait les pieds ? Elle se défausse, soudain oie blanche : «Je croyais Sarkozy porteur de la rupture. J’espérais favoriser l’essor politique d’une droite progressiste. J’ai échoué.» Elle refuse de participer à la campagne de 2012. Sarkozy est déçu. Elle aussi. Resté fidèle malgré leurs désaccords, Wauquiez salue son parcours : «Je craignais que le grand loup du cynisme ne la mange. Au final, elle n’a pas perdu son âme, ni sa lucidité.» Quelques illusions, peut-être, et encore. Ni son expérience de plume, ni les affaires actuelles ne l’ont dégoûtée de la politique. Par les temps qui courent, son optimisme est réconfortant : «Je ne crois pas au "tous pourris". En cinq ans, je n’ai pas vu de crapules, mais des gens estimables qui travaillent comme des chiens.»

«Ne pas avoir de famille d’accueil idéologique»lui «manque». Catholique pratiquante devenue laïcarde, elle a un temps envisagé de se convertir au judaïsme, «pour l’esprit de communauté»,puis au protestantisme «pour la conscience morale». Dans son livre, elle ne cesse de s’adresser à elle-même, intégrant le doute et la contradiction. Cette éternelle «scission intérieure», qu’elle combat sur le divan, l’enrichit autant qu’elle l’épuise. Elle cite Michaux : «Moi n’est qu’une position d’équilibre.»

 

Marie de Gandt en 6 dates

Septembre 1975 Naissance à Versailles.1997 Entre à Normale Sup.2007 Naissance de Côme, devient «plume» pour Dominique Bussereau.2009 Plume à l’Elysée, maître de conférence à Bordeaux-III.
2010 Naissance de Tadzio.
2013 Sous la plume. Petite exploration du pouvoir politique (Robert Laffont).


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