A propos de Before Midnight de Richard Linklater et Pour une femme de Diane Kurys
Julie Delpy, Ethan Hawkes
Deux films qui n’ont rien à voir si ce n’est qu’ils parlent d’amour, du passé ou plutôt du temps qui passe et que l’on en fera une brève chronique…
Dans Before Midnight de l’Américain Richard Linklater, on prend les mêmes et on recommence. Troisième volet de la trilogie initiée par Before Sunrise (1995) et continuée avec Before Sunset (2005), Before Midnight narre la crise de la quarantaine d’un couple mais se révèle comme un exercice de style long et un brin laborieux pour ne pas dire fastidieux.
On retrouve le même couple joué par Ethan Hawkes (Jesse) et Julie Delpy (Céline) mais cette fois en vacances en Grèce avec leurs jumelles, dans le Sud du Péloponnèse.
Un couple qui a vieilli et qui a du mal à rebondir.
Ethan Hawkes
Des plans tantôt séquences très longs servent à dire la tension latente qui existe au début du film entre Céline et Jesse avant que n’explose une vraie crise entre eux. Les deux personnages parlent dans un flot discontinu de paroles qui laisse peu de respirations. Mais ce qui dérange surtout, c’est le manque de finesse et de recul de la mise en scène, un brin complaisante sur ce coup-là. Le déballage que font Jesse et Céline de leur vie à leurs amis grecs et face à la caméra a quelque chose d’obscène et sonne un peu faux. Trop frontal voire indécent. En dévoilant les moindres secrets de leur couple et de leur existence, les personnages semblent livrer tout haut le fruit de leurs élucubrations et de leurs (re)sentiments intérieurs, mais ils le font avec un tel manque de pudeur et parfois une vulgarité qui empêchent l’émotion d’affleurer. Le réalisateur, qui a co-écrit avec Hawkes et Delpy le scénario, ne fait pas dans la finesse, incapable de prendre une distance suffisante aussi pour filmer ce couple en pleine tempête. Les côtés narcissique des personnages comme artificiel de leurs engueulades gênent et finissent par lasser. Des discussions interminables et barbantes dont on se désintéresse assez naturellement…
Sur le même thème mais dans un style moins tape-à-l’œil et moins clinquant (moins cliché aussi), on vous conseillera le subtil Copie conforme d’Abbas Kiarostami.
Mélanie Thierry
Beaucoup plus subtil aussi, Pour une femme commence à Lyon, dans les années 1980, mais se situe dans son action dans l’après-guerre en France. A la mort de sa mère, Anne (Sylvie Testud) tombe sur la photo de Jean, un oncle mystérieux (Nicolas Duvauchelle) qu’elle ne connaissait pas et que ses parents (Michel et Lena, joués par Benoit Magimel et Mélanie Thierry) ont accueilli après la seconde guerre mondiale. Remontant ses souvenirs, renouant avec les fils d’un passé qu’elle recompose au passage, Anne découvre tout un pan d’une histoire que ses parents lui avaient cachée. Des secrets bien plus lourds qu’on ne croirait…
Au-delà de sa maladroite et parfois artificielle construction en flashbacks (on ne parle pas de sa désastreuse et pompeuse chute), Pour une femme peut s’enorgueillir d’une matière cinématographique et romanesque dense et riche, une matière qui permet à l’émotion d’affleurer comme au spectateur de plonger dans cette histoire familiale trouble et complexe. D’autant que les acteurs sont excellents, à l’image du trio formé par Magimel, Thierry et Duvauchelle.
Benoit Magimel
Sobrement et efficacement reconstituée, l’époque de l’après-guerre est prétexte pour la réalisatrice à reconstituer tout en la romançant l’histoire de sa propre famille.
Ainsi, à Lyon en 1947 débarque de manière la plus impromptue, inattendue et miraculeuse qui soit l’oncle d’Anne, un type taiseux et mystérieux qu’on croyait disparu depuis des années mais qui rejaillit d’entre les morts. Peu à peu, entre Lena et Jean nait une attirance condamnée dans l’œuf comme d’une part, Lena est mariée à son frère Michel et que d’autre part, Jean s’avère être un mystérieux agent / espion à la solde des Américains ou des Russes (on ne sait pas trop) qui a en fait pour mission de liquider les anciens dirigeants nazis avant qu’ils ne s’échappent en Amérique du Sud ou ailleurs dans le monde.
De l’émotion, Pour une femme n’en manque pas (malgré les maladresses de son scénario écrit par la réalisatrice elle-même) qui plonge tout un chacun dans la mélancolie des souvenirs familiaux (très belles compositions d’Armand Amar au passage), la nostalgie du temps qui passe, des gens qu’on ne reverra plus et qui sont morts tragiquement. Magimel est extraordinaire dans ce film à la portée universelle qu’il semble porter sur ses épaules à lui seul même les autres autour sont pas mal aussi, Thierry, Duvauchelle et une galerie de personnages savoureux campés par Clotilde Hesme, Denis Podalydès ou encore Julie Ferrier…
A conseiller donc, on l’aura compris…