1. En marge, nous trouvons ce qui est hors de la page attestée. En frange. À la périphérie. Blanc du
pourtour. Espace de frontière, où l’on gribouille parfois, où l’on annote — glose. Ce qui n’appartient pas en vrai au texte, ni à l’ouvrage, mais s’ouvre aux notules anarchiques. Ce qui est isolé, épargné par ce mouvement compulsif des yeux, de gauche à droite. Ce qui promet d’autres récits, d’autres aires où s’ébaudiront les mots. Où loge ce qui est réflexions sur, pensées sur.
Périphérie où s’élabore l’impossible à dire ou ce que l’on dira demain.
2. Écrire : se prolonger, donner une extension à sa voix. Espoir de parler au-delà des déserts à tous ces proches sans visage et lointains. Chaque jour rallumer le feu de la solidarité non sectaire, celle qui singulièrement s’évase au-dessous et au-dessus des mots. Tenter de se reconnaître et de reconnaître les autres absents.
3. Comme moyen de création, d’expression, le texte suffit. Il ne suffit pas à la finalité de l’écriture, mais comme outil, il suffit. Déposons nos opinions, nos appétences humanitaires, nos bons sentiments, nos intentions, nos plans, nos drapeaux, nos engagements à la porte de l’officine : le texte ira cueillir tout ça, de par son propre dynamisme — il ira chercher mieux que tout ça, tout ça en mieux.
4. La question la plus fréquente lors de rencontres où l’on a velléité d’écriture : Parfois j’ai de bonnes idées. Il me semble détenir les matériaux pour écrire de grandes choses, de sacrées bonnes histoires… Tout est là, dans ma tête ! Je m’assois, ouvre l’ordi, puis plus rien. Rien ne se passe. Le vide ! Pourquoi ? Et voilà, c’est le problème : la richesse. On se présente embourbé de préjugés, de désirs et d’opinions – même les mieux fondées. On est trop riche. L’espace n’appartient plus au texte, il ne peut respirer. Il étouffe mort-né. Qu’on le laisse vivre, le texte ! Il en sait plus que soi.
(Chants d’août, Éd. Triptyque)
Notice biographique
Auteur prolifique, d’une forte originalité thématique et formelle, Alain Gagnon, ce marginal de nos lettres, a

