Avec Grigris, le réalisateur Mahamat-Saleh Haroun présentait à Cannes une Afrique en difficulté, loin d’être fantasmée. Pourtant, le spectateur reste un peu sur le côté. Explications.

Il y a des cinéastes qui à travers leurs films aiment défendre leurs couleurs, leurs terres, leur pays. Pour faire avancer les choses. Pour que ça change. Et Mahamat-Saleh Haroun fait partie de ces réalisateurs-politico-sociaux engagés qui aiment se battre pour de nobles causes dans l’espoir que les situations s’améliorent. Comme pour Un Homme Qui Crie, Haroun a pu se servir une nouvelle fois du tremplin médiatique que représente le Festival de Cannes.
Avec Grigris, il dépeint une Afrique austère, bien loin de nos fantasmes européens. A travers l’histoire d’un jeune homme paralysé d’une jambe (Grigris, interprété par Souleymane Démé) qui renonce à ses rêves de devenir danseur pour pouvoir aider un oncle tombé gravement malade. Par manque d’argent, il rejoindra des trafiquants d’essence à ses risques et périls.
L’histoire semble classique, toutefois Mahamat-Saleh Haroun adopte un style très réaliste, parfois documentarisé, et confère au film une dimension qui lui est propre. La mise en scène, pourtant très sobre, est de qualité, et est bien servie d’une part par la jolie prestation de Souleymane Démé, et d’autre part par la magnifique photographie.
Toutefois, il manque peut-être un lien d’attachement entre les personnages du film et le spectateur, qui finalement reste un peu à l’écart et ne s’implique peut-être pas assez dans le drame créé par Haroun. Difficile donc de pénétrer au cœur des problèmes sociaux abordés par le réalisateur, de ressentir la force de ses mots, et de se laisser transporter ainsi dans son univers.