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Echos du monde musulman (juillet 2013)

Par Alaindependant
samedi 20 juillet 2013

     Échos du monde musulman N° 194     

19 juillet 2013

L’Égypte

Vous savez tout, inutile de répéter la presse française. La question qui se pose maintenant est de savoir si le nouveau gouvernement prendra des mesures permettant de limiter la casse économique dont les Frères Musulmans sont largement responsables. La condition nécessaire à l’amélioration est le retour à l’ordre public, mais l’armée et la police sont restées extrêmement brutales, ce que le peuple, qu’il soit islamiste ou « laïque », ne supporte plus. Sans ordre public, non seulement plus rien ne fonctionne, mais les touristes ne viennent plus. Et l’argument islamiste selon lequel cela évite au peuple d’être moralement corrompu n’est plus audible.

Remarquons l'embarras des États-Unis. S'il parlent de « coup d'État », ils doivent sanctionner l’Égypte du fait de je ne sais plus quelle obligation juridique, et ainsi se brouiller avec elle, ce qu’ils ne veulent pas faire. Donc Obama n'utilise pas ce terme, mais son électorat démocrate ne comprend pas. En attendant les États-Unis se sont mis à dos aussi bien les Frères Musulmans qui leur reprochent de ne pas protester, que les « laïques » qui estiment que l'Amérique a largement contribué à l'arrivée au pouvoir des Frères (n'oubliez pas que, contrairement aux Français, les Américains ne sont pas choqués par le rôle de la religion en politique). C’est une illustration de plus de la perte de poids des Etats-Unis dans le monde musulman (et ailleurs), miné par son soutien inconditionnel à Israël. Cela mine également les valeurs défendues par l'Occident, que les musulmans jugent hypocrites car non appliquées à Israël. Il ne s'agit pas ici de dire si ce jugement est justifié ou non, mais de constater qu'il existe et rend difficile la promotion de ces valeurs, pourtant attirantes en elles-mêmes.

L’avis d’Olivier Roy

(Extraits résumés de son article dans Le Monde). Les islamistes ont montré qu'ils étaient incapables de gérer l'Etat et ne savaient pas comment islamiser une société qui ne les avait pas attendus pour cela. La population n’a pas protesté contre la mise en place de la charia, mais contre l'incompétence et le népotisme des Frères. La rue n’est pas seulement laïque et libérale, on ytrouve aussi de pieux musulmans, des salafistes, des notables.

Pire, les Frères ont perdu le monopole de l'expression de l'islam en politique. Ils sont concurrencés par les salafistes, la mosquée Al-Azhar et les soufis.

Les Frères ont une vision autoritaire, centralisée et patriarcale de l'autorité religieuse, alors que la population a de nouvelles formes de religiosité, très individualistes et très diversifiées (bref « protestantes », voir http://lecercle.lesechos.fr/node/52809/). On sort du paradigme qui a plombé la vie politique égyptienne et arabe depuis trente-cinq ans : dictatures prétendues laïques contre islamisme prétendu révolutionnaire.

La seule légitimité des Frères musulmans, comme Mohammed Morsi n'a cessé de le clamer dans ses discours, était justement un vote, pas l'islam. L'échec de l'islam politique est démontré. Et c'est pourquoi il faut des élections au plus vite.

Le Liban coincé par la Syrie

Vous savez que la guerre syrienne est en train de s'internationaliser et de virer à l'affrontement chiites-sunnites, les Alaouites de Bachar El Assad ayant l'appui de l'Iran, de l'Irak et du principal parti politique libanais, le Hezbollah, tandis que les sunnites ont ceux des minorités irakiennes et libanaises, sans parler de celui, indirect, des Kurdes, sunnites également, et de l'argent des monarchies du Golfe.

Le Liban est donc coincé géographiquement (il est presque complètement entouré par la Syrie). Il l’est aussi humainement entre chiites et sunnites, sans parler des Druzes et des divers partis chrétiens. De plus, si on oublie les frontières, Druzes, chrétiens et sunnites sont coincés entre les Alaouites au nord et les chiites du Hebzbollah à l’est et au sud. Il ne leur reste comme porte ouverte que la Méditerranée !

Un point sur l'intervention française au Mali

http://lecercle.lesechos.fr/economie-societe/international/afrique/221176753/guerre-trois-mois-intervention-francaise-mali-persp

En Algérie, le « sérieux » historique progresse

Le journal algérois El Watan nous en donne témoignage supplémentaire, avec les articles ci-après. La maladie du président Bouteflika, un de ces dinosaures de la guerre d'indépendance ayant monopolisé le pouvoir depuis 1962 (c'est pour cela que je parle de guerre d'indépendance et non de guerre de libération) a été l'occasion pour le journal de démythifier les présidents successifs. Cela illustre la remise en cause très progressive de l'histoire officielle, histoire qui, à mon avis, est une des raisons du blocage de l'Algérie.

Chaque jour, un article expose comment chaque président a pris puis quitté le pouvoir. Voici les premiers. Je rajoute quelques commentaires très personnels.

Ben Bella

http://www.elwatan.com//une/comment-on-devient-chef-d-etat-en-algerie-13-07-2013-220893_108.php

Les Français « sérieux » connaissaient déjà les grandes lignes de la construction du pouvoir algérien à l’indépendance. En simplifiant : certains se sont battus des années dans les montagnes (avant d'être vaincus par les offensives de Challe, ça c'est moi qui l'ajoute) et leurs survivants pensaient accéder naturellement au pouvoir. Mais ils ont du s’effacer devant des chars de Boumediene qui avaient passé tranquillement la guerre à l'extérieur : les uns se sont ralliés, d'autres se sont faits tuer ou se sont exilés. Et pas d'élections !

Boumediene

http://www.elwatan.com//actualite/houari-boumediene-du-putschiste-a-l-homme-d-etat-14-07-2013-221025_109.php

En complément de cet article, voici mon avis un peu brutal sur l'ère Boumediene.

Le volet économique a été un échec masqué par les recettes pétrolières, mais, à la décharge de Boumediene, il faut dire qu'il suivait l'air du temps, illustré par les Pieds rouges et Le Monde Diplomatique. Néanmoins, les « gauchistes », lorsqu'ils étaient algériens, l'agaçaient profondément par leur côté laïque, libertaire et francophone. Il a donc lancé pour les casser l'arabisation de l'enseignement et les groupes islamistes. Catastrophes dont l'Algérie ne s'est toujours pas remise.

Pour l'arabisation il suivait aussi l'air du temps, comme le faisaient en même temps la Tunisie et le Maroc. Les responsables de cette époque, maintenant à la retraite, admettent que ce fut une erreur énorme.

Beaucoup d'Algériens idéalisent cependant Boumediene aujourd'hui : « un vrai chef, et pas corrompu ».

Chadli Bendjedid

http://www.elwatan.com//actualite/chadli-bendjedid-un-president-nomme-par-la-sm-15-07-2013-221145_109.php

Pendant cette période, l'explosion démographique mal gérée, couplée au contre-choc pétrolier de 85-86 a sérieusement dégradé la situation des Algériens. La fécondité algérienne s'est effondrée 9 mois après la baisse des prix du pétrole (coïncidence ?), mais, comme il faut 30 ans pour que cette baisse change significativement la proportion de jeunes adultes, le pays a craqué dès 1989, et le président suivant s'est retrouvé en pleine guerre civile.

Mais Alger a bien changé depuis

http://www.elwatan.com//culture/la-fievre-salsa-gagne-alger-12-07-2013-220747_113.php

Du moins au Hilton…

Yves Montenay


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