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Les couleurs de Virginie, par Virginie Tanguay…

Publié le 23 juillet 2013 par Chatquilouche @chatquilouche

le lecteur anglais

L’histoire débute sur l’Île de Wight que recouvrent des landes sauvages et vertes, parmi les plus belles d’Angleterre.  Y eut lieu une rencontre bouleversante qui allait changer le destin de Mr Carter…

Mr Carter caressait le rêve de visiter la ville de Québec.  Enfant, il regardait l’océan et s’amusait à y lancer des cailloux, tout en s’imaginant poser les pieds de l’autre côté.  Son goût pour la lecture l’avait fait voyager par l’imaginaire au Canada français.  Il affectionnait les romans du terroir.  D’une fière allure, sa prestance attirait les regards.  Sa petite voix intérieure lui rappelait depuis tant d’années ce désir de voyager qu’un jour, il partit à l’aventure.  Le 9 juin 1917, il quitta sa jolie demeure et embarqua à bord d’un cargo de la White Star Line.

Il fut ébloui par l’architecture de Québec et par son Château Frontenac qui dominait le fleuve Saint-Laurent.  Sa hâte de découvrir les villages éloignés le poussa à prendre le train.  Il se rendit jusqu’à Val-Jalbert, dans le nord-est du pays.

À destination, il rangea sa valise dans une chambre du grand hôtel et tira le rideau pour apercevoir les  maisons campagnardes.  La tiédeur de l’air et le parfum des roses sauvages lui donnèrent le goût d’une promenade.  La chute de Val-Jalbert dans toute sa splendeur évoquait en lui le sentiment de la liberté.

Mr Carter entendit ce qu’il croyait être la mélodie d’un oiseau et traversa le voile de brume qui drapait le pied de la chute.  Assise sur un banc de bois, une femme y pleurait.  Sensible à sa détresse, il mit la main sur son épaule.  Le long regard que ces inconnus échangèrent allait donner naissance à une histoire d’amour.

La belle se nommait Blanche.  La tendresse qui l’habitait lui donnait un air coquin.  Une lumière tamisée accentuait la délicatesse de son visage, d’une beauté irrésistible.  Elle parlait français, la langue de chez nous, au Lac-Saint-Jean, avec ses expressions typiques.  Mr Carter en saisissait des bribes.  Les gestes facilitaient la compréhension.  À ses côtés, Blanche se sentait rassérénée et lui se sentait vivre.  Des âmes sœurs s’étaient trouvées.  Toutefois, l’escale de Mr Carter fut de courte durée ; il repartira, gardant en mémoire le sourire de Blanche.

L’étranger retourna donc en Angleterre, ivre de peine et de joie entremêlées.  Blanche voulait oublier cet oiseau de passage, mais elle en était incapable.  Le temps passait, et elle retournait souvent s’asseoir sur le banc de bois, nostalgique.

Les bruyères fleurissaient à nouveau, et l’Anglais, seul dans sa grande maison, avait un regret.  Cette impression d’avoir laissé filer l’amour le tourmentait.  Après plusieurs mois, le souvenir de Blanche le hantait encore.  Il souhaitait rattraper le temps perdu…

Un matin de brume, le messager de l’île apporta une enveloppe.  D’un ocre défraîchi, cette dernière avait traversé l’océan.  Elle contenait un mouchoir de tissu parfumé et quelques mots d’amour écrits maladroitement.  L’anglais huma tendrement la pièce de tissu, et le brouillard se dissipa, en même temps que sa mélancolie.  Il touchait au bonheur et savait maintenant que Blanche partageait ses sentiments.  La Rose des vents lui indiqua à nouveau le chemin du pays lointain.

Après un long voyage en bateau et en train, il arriva enfin à la gare au moment prévu.  Il chercha sur le quai la silhouette convoitée, mais en vain.  L’attente était interminable.  Ses yeux ne quittaient pas les aiguilles de sa montre de poche qui tournoyaient.  Les heures passaient.

Blanche ne se présenta jamais au rendez-vous.  Impatient, il s’empara d’un journal qui trainait sur un banc, et un grand titre le bouleversa : « La grippe espagnole frappe encore à Val-Jalbert ».

L’Anglais comprit qu’il ne la reverrait plus.  C’est à ce moment qu’il saisit le sens du dicton : « Il faut cueillir sur-le-champ les roses de la vie. »

Notice biographique de Virginie Tanguay

virginie-vraie
Virginie Tanguay vit à Roberval, à proximité du lac Saint-Jean.  Elle peint depuis une vingtaine d’années.  Elle est près de la nature, de tout ce qui est vivant et elle est très à l’écoute de ses émotions qu’elle sait nous transmettre par les couleurs et les formes.  Elle a une prédilection pour l’aquarelle qui lui permet d’exprimer la douceur et la transparence, tout en demeurant énergique.  Rendre l’ambiance d’un lieu dans toute sa pureté est son objectif.  Ses œuvres laissent une grande place à la réflexion.  Les détails sont suggérés.  Son but est de faire rêver l’observateur, de le transporter dans un monde de vivacité et de fraîcheur, et elle l’atteint bien.  Elle est aussi chroniqueuse régulière au Chat Qui Louche.

Pour ceux qui veulent en voir ou en savoir davantage, son adresse courrielle :  [email protected] et son blogue : virginietanguayaquarelle.space-blogs.com.  Vous pouvez vous procurer des œuvres originales, des reproductions, des œuvres sur commande, des cartes postales.

(Une invitation à visiter le jumeau du Chat Qui Louche : https://maykan2.wordpress.com/)


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