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Centenaire de la Grande Guerre : un rituel de passage dans l'histoire nationale ?

Par Mbertrand @MIKL_Bertrand

 

A l'approche du centenaire de la Première Guerre mondiale, les commémorations s'organisent progressivement : les cérémonies se planifient à l'échelle nationale et internationale,  un site Internet a été créé pour l'occasion, les médias se mettent en ordre de bataille pour produire documentaires et autres émissions thématiques, le monde de l'édition prépare plusieurs centaines de publications et même l'Education nationale propose des concours et référents "mémoire" dans les différentes académies. Bref, tout est en ordre pour une période commémorative à la hauteur du bicentenaire de la Révolution française en 1989.

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Tout... ou presque ! Le député UMP du Nord Gérald Darmanin a interpelé le ministre délégué auprès du ministre de la défense, chargé des anciens combattants au mois d'octobre 2012 sur " la place réelle des diverses associations d'anciens combattants, qui existent sur notre territoire, dans l'élaboration de ces commémorations et dans les travaux de la mission interministérielle".

La réponse est pour le moins surprenante car les services de Kader Arif signalent que "la nature et la forme de la liaison avec des structures permanentes, comme les associations, et de leur participation aux travaux de réflexion n'ont pas encore été définies". En somme, à quelques mois du début des commémorations et malgré un travail de réflexion officiellement lancé en 2011  sous l'autorité de Joseph Zimet, aucun organigramme précis des acteurs devant intervenir n'a véritablement été dressé !...

D'autres éléments de la réponse du ministère méritent qu'on s'y arrête.

En guise d'introduction, le texte rappelle que la mission interministérielle des anniversaires des deux Guerres mondiales a été créée par décret n°2012-1305 du 26 novembre 2012 afin d'impulser et de coordonner les deux cycles commémoratifs "qui s'imposent à notre pays dans les prochaines années". Ainsi, l'acte commémoratif ne relèverait pas selon le gouvernement d'un choix politique mais bien d'un d'une obligation immanente envers le passé ou, en d'autres termes, une sorte de "devoir de mémoire".

Bien que de nombreuses critiques se soient élevées pour dénoncer l'association dans une même mission de la Première et de la Seconde Guerre mondiale, les services du ministères rappellent que les commémorations de ces deux évènements resteront liées, tout en insistant néanmoins sur leurs spécificités respectives : d'une part, "le centenaire sera le moment de l'entrée de la Grande Guerre dans l'histoire partagée des Français" ; d'autre part, "le 70e anniversaire sera le dernier grand rendez-vous entre les Français et les derniers témoins d'une page d'histoire qui a profondément marqué notre nation".

Une telle affirmation n'est pas sans poser question. Elle sous-entend que la Première Guerre mondiale n'était jusqu'à présent pas entrée dans "l'histoire partagée des Français" au motif que tous les anciens combattants de cette époque ne s'étaient pas encore éteints. Dans le même esprit, les commémorations de la Seconde Guerre mondiale ne peuvent être considérées que comme "un rendez-vous entre les Français et les derniers témoins" à défaut d'être l'occasion d'écrire et de renouveler aussi l'histoire de cet évènement.

Un joli camouflet à  Jean-Jacques Becker, Stéphane Audoin-Rouzeau, Jean-Yves Le Naour, Henri Rousso, Robert Paxton, Jean-Pierre Azéma et les dizaines d'autres historiens qui ont cru pendant des années qu'ils avaient écrit l'Histoire de la Première et de la Seconde Guerre mondiale alors que ces évènements n'étaient pas encore entrés dans l'histoire selon le gouvernement.  A moins qu'il ne faille simplement donner un cours d'historiographie aux membres du cabinet du ministre délégué aux Anciens Combattants afin de réviser quelques notions...


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