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My Dark Angel – Chapitre 32

Par Artemissia Gold @SongeD1NuitDete
Elijah

— Vous n’avez pas perdu de temps, constata-t-il en remontant les stores qui occultaient la vitre qui séparait son bureau du vaste espace dans lequel travaillait le reste des inspecteurs de la brigade criminelle.

Leurs yeux cernés et leurs chemises froissées attestaient de leur présence entre ces murs depuis longtemps malgré l’heure matinale. Assis derrière leurs bureaux encombrés, ils jetèrent un coup d’œil en direction de leur lieutenant qui se tenait debout devant la baie vitrée. A défaut de nous entendre, tous les hommes présents dans la grande salle pouvaient nous voir. Sans doute une manière de me signifier que j’étais sur son terrain cette fois et qu’il n’avait aucune intention de s’adonner à une autre rencontre officieuse.

— Inutile de vous demander ce que vous êtes venu faire, poursuivit-il en prenant place dans son fauteuil qu’il approcha du bureau pour s’y accouder.

Il désigna d’un geste poli le siège qui lui faisait face.

— Allons Monsieur Mikaelson, nous avons des tas de choses à négocier ; autant nous mettre à l’aise, m’enjoignit-il devant mon manque d’empressement.

— Si je comprends bien vous n’avez même pas l’intention de démentir votre implication dans le meurtre de Tony, constatai-je.

— Votre obstination m’a fait déjà perdre suffisamment de temps et d’énergie.

Il s’adossa au dossier du fauteuil et me toisa avec un mépris que je lui rendis au centuple.

— Vous l’avez tué ? lui demandai-je sans détour.

— Il ne manquera à personne.  Mais ce qui est important ce n’est pas tant  qui  l’a tué  mais qui on soupçonnera.

Je tachai de rester impassible face à cet homme arrogant, si sûr de lui que cela en devenait une réelle provocation. Je bouillonnai intérieurement, contenant difficilement cette envie grandissante d’effacer définitivement de son visage ce sourire satisfaisait qu’il arborait depuis que j’avais mis le pied dans son bureau. Ma présence aux aurores dans le commissariat ne l’avait même pas surpris comme s’il l’avait anticipée ; comme tout le reste d’ailleurs. Cette totale absence de réaction à mon arrivée avait levé les derniers doutes que je pouvais encore avoir sur son implication dans toute cette histoire.

— Asseyez-vous Monsieur Mikaelson et laissez-moi vous exposer à quelles conclusions aboutira l’enquête sur le meurtre d’Antony Kostas.

Je m’obstinai à rester debout. Il finit par se lever à son tour pour aller se planter devant la fenêtre frappée par une pluie battante. Il devait être dans les huit heures du matin. Il aurait dû commencer à faire jour mais un ciel de plomb obscurcissait encore totalement le ciel.  Je le vis tirer une cigarette de sa poche revers et la porter à sa bouche. Il exhala longuement quelques bouffées. Il prenait son temps, jouait avec mes nerfs.

— Commençons par le commencement. Samedi soir dernier, aux alentours de minuit, Mademoiselle Clarkson a quitté votre domicile pour un départ apparemment définitif puisque le portier de votre immeuble témoignera qu’elle a laissé à l’accueil les clés de votre appartement. Le lendemain soir, elle s’est rendue dans un hôtel en face du  Cheetah’s club. Là, les hommes qui vous surveillaient ont assisté à une légère altercation entre Angel et vous au beau milieu de la rue alors qu’elle s’apprêtait à retourner au club. D’après l’un de mes inspecteurs, Mademoiselle Clarkson avait l’air quelque peu énervé. Peut-être contre son employeur ? Après tout, quand on sait à quelles activités s’adonnent les filles travaillant pour Monsieur Kostas, on peut facilement comprendre ce qu’elle faisait dans cet hôtel et pourquoi, vous-même, n’étiez pas ravi de la trouver là. Si l’on ajoute à cela, l’agression de Mademoiselle Thomson et celle d’Angel à l’hôpital, le mobile du meurtre est tout trouvé.

Il ménagea une courte pose pour me jeter un coup d’œil par-dessus son épaule pour admirer ma réaction avant de continuer :

— J’aurais tué Kostas d’une façon ou d’une autre mais Mademoiselle Clarkson m’a donné un sacré coup de pouce sans même que j’ai eu à bouger le petit doigt en se rendant d’elle-même à quelques centaines de mètres du club hier après-midi. J’avais demandé à être averti de chacun de ses déplacements quand je ne pouvais pas m’en charger moi-même. Dans quelques heures, le médecin légiste établira l’heure précise de la mort de Kostas entre 15h et 16h, soit précisément à l’heure où elle se trouvait sur les lieux. Le club était fermé à cette heure, Kostas seul : une occasion pareille était trop belle pour ne pas que je m’en saisisse.

— C’est vous qui avez orchestré l’agression de Charlène ? soufflai-je en peinant de plus en plus à conserver mon calme.

— Je ne voulais pas risquer de vous voir disparaître avec votre petite protégée. Je voulais m’assurer que vous resteriez à New York encore un temps. Quand je l’ai vue quitter votre appartement le même soir pour se rendre dans un hôtel miteux cela m’a causé quelques sueurs froides, je dois bien l’avouer.

— C’est pour cette raison que vous m’avez abordé ce soir-là. Vous vouliez être sûr que je chercherai à la retrouver, sachant qu’elle risquait d’avoir des problèmes par ma faute, en déduisis-je.

Il se tourna légèrement vers moi pour me gratifier d’un sourire narquois.

— Etant donné ce qu’elle représente pour vous, il y avait peu de chances pour que vous la laissiez partir de cette manière. Cette jeune femme est  une sacrée faiblesse, dis-moi, me nargua-t-il.

— Une faiblesse que vous avez su exploiter à merveille de toute évidence, lâchai-je avec amertume.

— Tout est une question d’opportunités. Je vous cherche depuis longtemps mais vous étiez toujours si discret qu’à peine avais-je retrouvé votre trace que vous disparaissiez de nouveau.

— Pourquoi moi ? Vous venez de la Nouvelle Orléans : ce ne sont pas les vampires prêts à en éliminer d’autres qui manquent.

— Parce que vous les voyez rendre un service à un humain ? Voyons, Monsieur Mikaelson, vous avez vécu là-bas suffisamment longtemps pour savoir que nous ne sommes que du bétail docile entre leurs mains. De plus, les choses ont changé en vingt ans. Aucun vampire ne s’aviserait de s’en prendre à autre sans l’aval de votre frère ou de Marcel. J’aurais pu tenter de tuer le vampire qui a tué ma femme moi-même mais je ne suis pas encore suicidaire.

— Vous l’êtes suffisamment pour me faire du chantage, répliquai-je.

— C’est beaucoup plus simple de piéger un vampire seul et aveuglé par ses sentiments. Vous vous êtes embourbé tout seul  par vos imprudences répétées et irréfléchies. Je n’ai fait que sauter sur l’occasion.

Il tira à nouveau sur sa cigarette avant de poursuivre :

— Vous êtes un originel : vous ne risquez rien. C’est l’affaire de quelques jours seulement. Faites cela pour moi et je classe immédiatement l’affaire. Angel ne sera pas inquiétée et chacun de nous ira de son côté. J’aurai ma vengeance et vous retrouverez votre précieuse petite protégée.

— Je pourrais aussi vous tuer sur le champ, le menaçai-je ouvertement en m’approchant pour me planter devant lui.

Il jeta un coup d’œil par delà la baie vitrée.

— Vous voyez ce distributeur d’eau là-bas ? me demanda-t-il en désignant l’objet qui trônait dans un coin. J’ai protégé mes hommes contre vos dons en y ajoutant de la verveine. Donc à moins de tuer tous les hommes présents sous l’œil des caméras de sécurité, vous pouvez oublier cette alternative.

— Vous ne pourrez pas rester dans ce commissariat indéfiniment, lui rappelai-je le plus posément possible malgré la colère que je sentais bouillir dans mes veines.

— Cessez de vous entêter et de me prendre pour un imbécile! s’impatienta-t-il. Je sais m’entourer de personnes utiles. S’il m’arrivait quoi que ce soit, je me suis arrangé pour que tout ce que je sais à votre sujet soit révélé et pour que votre frère et Marcel sachent aussitôt où vous êtes.  Ils seront également ravis d’apprendre que vous vous êtes entiché d’une petite humaine toute fragile. Quelle belle vie ce sera pour elle que de devoir fuir en permanence deux vampires sociopathes prêts à tout pour se venger de vous ! Je me demande lequel des deux lui mettra la main dessus en premier….

 Face à cette menace, je perdis le peu de contenance dont j’étais capable. Je l’agrippai par le col de sa veste avant qu’il ne termine sa phrase et l’épinglait au mur comme un vulgaire pantin. La porte de son bureau s’ouvrit presque aussitôt dans mon dos  sur ses inspecteurs. Ils m’intimèrent de le lâcher sur le champ. Je n’avais pas besoin de me retourner pour sentir leurs armes braquées sur moi.

— Ça va, laissez-nous, leur ordonna le lieutenant d’une voix étranglée par ma poigne.

Je détournai mon regard de celui toujours aussi déterminé de Delanay. Ils hésitèrent un instant avant d’obtempérer sans tenter de dissimuler leur perplexité face à cette scène et cet ordre. A nouveau seuls, je le lâchai. Il réajusta sa veste et sa cravate en me gratifiant d’un regard assassin.

— Faites-vous une raison Mikaelson : vous n’êtes pas en mesure de dicter votre loi ici. Angel restera en garde à vue jusqu’à ce que j’aie la preuve que vous vous soyez acquitté de votre tache. Je vous donne trois jours pas un de plus. Passé ce délai, je l’inculpe officiellement pour le meurtre de Kostas. On fera vite le lien entre Angel et les morts de Greg Lawson et de Tom Sanders. Elle croupira en taule jusqu’à la fin de ses jours. Elle y sera sans doute plus en sécurité que dehors ; surtout lorsque votre frère ou Marcel seront avertis de votre présence à New York et de son existence.

— Elle a déjà quitté la ville et vous n’avez pas de preuve contre elle ! fulminai-je.

— Si vous faites allusion à sa petite tentative de fuite, vous pouvez faire une croix dessus. La voiture de votre avocat  a été interceptée avant qu’ils ne franchissent la frontière de l’état. Quant aux preuves, détrompez-vous, j’en ai une et de taille, fabriquée par mes soins, me corrigea-t-il en rejoignant son bureau pour s’emparer de son téléphone portable qu’il me tendit.

Je me sentis blêmir devant la photographie qu’il avait prise sur les lieux du crime. Entre les doigts ensanglantés de Tony s’entrelaçait une chaîne en or familière. L’ange du médaillon, taché de sang, reposait sur le sol.

— Joli bijou, admit-il. Elle s’en est tout même débarrassée chez un prêteur sur gage.  Je me suis dit qu’il pourrait m’être utile et je l’ai récupéré. Il y aura bien quelqu’un pour confirmer qu’il appartient bien à Angel….comme Brian par exemple.  Ce garçon a un casier judiciaire des plus intéressants et me doit encore un ou deux services en plus de ceux qu’il m’a déjà rendus en s’occupant de Charlène et en faisant en sorte que Tony se trouve à l’hôpital en même temps qu’Angel.

Je rejetai la tête en arrière de dépit.

— Espèce de salopard…soufflai-je dans un ricanement forcé et résigné.

Je me mis à arpenter nerveusement la pièce. Il me suivit du regard un moment sans un mot.

— Avons-nous un accord Mikaelson ? me demanda-t-il finalement.

Je restai silencieux, la mâchoire crispée et les poings serrés.

— Je tiendrai mes engagements si vous tenez les vôtres, m’assura-t-il.

— Et je suis censé porter crédit à la parole d’honneur d’un type prêt à tout pour obtenir ce qu’il veut ?

— Vous n’avez pas vraiment le choix, conclut-il en reprenant place dans son fauteuil.

De l’autre côté de la vitre, ses hommes ne nous quittaient plus des yeux. J’étais au pied du mur, contraint de jouer le jeu imposé par un humain dont je n’aurais pas eu le moindre mal et scrupule à me débarrasser en temps normal.

— Elle sera libre dès que ce vampire sera mort et le collier sera malencontreusement égaré au milieu des milliers de pièces à convictions stockées dans les sous-sols. Je vous en donne ma parole, s’engagea-t-il.

— Je veux la voir avant de partir, réclamai-je en donnant ainsi indirectement mon consentement.

Un rictus de satisfaction releva un coin de sa bouche.

— Sûrement pas.  Vous avez trois jours, pas un de plus.

Il griffonna sur un bloc note quelques mots, arracha la page et me la tendit.

— Voici le nom et l’adresse du vampire que vous devez tuer.

L’identité de mon congénère m’était totalement inconnue. En revanche, je ne pus m’empêcher de soupirer de dépit en lisant où il demeurait. En plein cœur du quartier français, bien entendu, là où à chaque coin de rue, je risquais de tomber sur les sbires de Klaus ou de Marcel. Ce dernier sauterait sans aucun doute sur l’occasion pour me mettre le grappin dessus après toutes les pertes que j’avais infligées à ses rangs pendant des années. Quant à mon très cher et très vindicatif frère, il ne m’avait toujours pas pardonné mon départ  qu’il considérait comme une trahison. Ce retour forcé dans cette ville que je haïssais plus que tout était toutefois moins pénible que de devoir laisser Angel seule à New York entre les mains de cet homme qui me dévisageait en attendant patiemment ma réponse définitive.

  — Vous avez conscience que s’il arrivait quoi que ce soit à Angel, je n’aurais plus grand-chose à perdre et qu’il n’y aura alors aucun endroit où vous pourrez vous réfugier. Je vous retrouverai  alors d’une manière ou d’une autre et le sort que j’ai réservé à Greg vous semblera bien tendre en comparaison de ce que je vous ferai subir. Peu m’importera d’être découvert ou retrouvé par mes ennemis, l’avertis-je en appuyant mes deux mains sur le bureau pour le surplomber.

Il recula son fauteuil, se leva et imita ma position.

— Nous avons donc tous les deux intérêt à ce que tout se passe comme prévu


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