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La Bad lettre d’Elisabeth.

Publié le 28 juillet 2013 par Laroberouge @hocinisophia

« Après que les plus hautes autorités religieuses musulmanes ont déclaré que les vêtements qui couvrent la totalité du corps et du visage ne relèvent pas du commandement religieux mais de la tradition, wahhabite (Arabie Saoudite) pour l’un, pachtoune (Afghanistan/Pakistan) pour l’autre, allez-vous continuer à cacher l’intégralité de votre visage ?
Ainsi dissimulée au regard d’autrui, vous devez bien vous rendre compte que vous suscitez la défiance et la peur, des enfants comme des adultes. Sommes-nous à ce point méprisables et impurs à vos yeux pour que vous nous refusiez tout contact, toute relation, et jusqu’à la connivence d’un sourire ?
Dans une démocratie moderne, où l’on tente d’instaurer transparence et égalité des sexes, vous nous signifiez brutalement que tout ceci n’est pas votre affaire, que les relations avec les autres ne vous concernent pas et que nos combats ne sont pas les vôtres.
Alors je m’interroge : pourquoi ne pas gagner les terres saoudiennes ou afghanes où nul ne vous demandera de montrer votre visage, où vos filles seront voilées à leur tour, où votre époux pourra être polygame et vous répudier quand bon lui semble, ce qui fait tant souffrir nombre de femmes là- bas ?
En vérité, vous utilisez les libertés démocratiques pour les retourner contre la démocratie. Subversion, provocation ou ignorance, le scandale est moins l’offense de votre rejet que la gifle que vous adressez à toutes vos soeurs opprimées qui, elles, risquent la mort pour jouir enfin des libertés que vous méprisez. C’est aujourd’hui votre choix, mais qui sait si demain vous ne serez pas heureuses de pouvoir en changer. Elles ne le peuvent pas… Pensez-y ».
Elisabeth Badinter

Madame,

c’est avec stupéfaction que je découvre votre lettre à ces femmes qui choisissent de camoufler intégralement leur corps, et j’avoue ne pas bien comprendre votre requête. Vous invoquez des éléments qui à mon sens sont choquants et relèvent d’un mépris sans nom. Mais de quelle supériorité vous revendiquez-vous pour vous permettre de porter des jugements de valeur sur les choix personnels des gens? J’ai défendu bec et ongles mes consoeurs les Femen lorsque de toute part elles étaient attaquées à cause de leur nudité. Je les ai défendues et soutenues car la liberté c’est également celle d’avoir le choix de son corps, de la manière avec lequel le mettre en valeur ou pas, de le mettre en avant, ou pas. Leur choix étaient celui du militantisme torse-nu, celui qui est toléré pour les hommes et bizarrement pas pour les femmes.

Pourtant, mon choix à moi n’est pas celui-ci, ce n’est pas de scander des slogans dévêtue, mais je partage tout de même ces convictions et cette course effrénée à la liberté.
Mais croyez-vous chère madame que le féminisme n’a qu’une seule et une unique définition? Croyez-vous que la liberté est univoque? Croyez-vous vraiment que le combat de chaque femme est standardisé? Oui, les standards, ça doit bien vous dire quelque chose, vous la petite capitaliste sans scrupule?

Non, madame, le féminisme est pluriel, la liberté a une définition propre à chaque individu, à chaque être. La liberté est inhérente à chaque être humain. Et ces femmes qui se couvrent entièrement ne cherchent rien d’autre que l’expression de leur liberté. La liberté et sa revendication son légitimes dans la mesure où cela ne porte atteinte à personne. J’ai l’intime conviction que ni les Femen, ni ces femmes ne font de mal. Pourquoi donc s’attaquer à ces gens, c’est de la poudre aux yeux lorsque l’on voit la quantité de problèmes que rencontre cette démocratie dont vous parle, cette démocratie dont vous vous faîtes la chevalière. Puisque vous l’aimez tant, il serait peut-être temps d’y consacrer un peu plus de temps. Non, sans ironie. Vous vous faîtes passer pour la plus grande humaniste alors que vous êtes son antithèse. Comment peut-on jouer d’un nom pour faire passer des soi-disant messages qui en réalité ne feront qu’embraser cette haine qui est déjà tellement alimentée autour de ceux qui ont le tort d’être différent et qui cultivent leur différence.

Mon choix n’est pas non plus de dissimuler ma chevelure ou mon visage, mais vous pourriez peut-être faire preuve d’un peu plus de tolérance. Vous savez pourquoi j’admire les sociologue de la nouvelle vague? Parce que tout simplement ils adoptent une démarche compréhensive. Tout est dit. Nous vivons dans une société patriarcale confortée toujours un peu plus par les diktats du capitalisme, et j’avoue que pour ma part, parfois lorsque je me ballade dans la rue, je sens le regard malsain des hommes sur moi, un regard agressif presque cannibale. Nous vivons dans une société une l’individualisme prime sur le lien social, lorsqu’il s’agit d’argent, cela ne vous pose pourtant pas de problème.

Ces gens qui dans la salle d’attente de chez le médecin ou qui vous croisent sur le même trottoir vous dévisagent sans décrocher le moindre sourire vous méprisent-ils pour autant? Prennent-ils une position supérieure à la vôtre de mettre une barrière entre vous?

Je vous demande d’arrêter l’hypocrisie, le jeu des mots, vous ne faîtes qu’alimenter la haine et la division par cette lettre minable censée susciter l’émotion. Mais c’est la colère que vous suscitez en moi. Ce n’est pas le choix de ces femmes qu’il faut combattre, mais ce qui gravite autour. Le danger provient de ceux qui utilisent le nom d’une religion pour porter des discours violents et agressifs, et là, je vous suivrai. J’ai toujours combattu et dénoncé les côtés sombres des religions, le Djihad, les discours contre le recours à l’IVG, au préservatif, la pédophilie au seins des institutions religieuses et j’en passe. Sur ces points, madame, je vous suivrai bien volontiers, mais le fait est que vous vous attaquez à un terrain sur lequel il n’y a pas lieu d’être.

Un jour, on m’a reprochée de me maquiller, de m’épiler et d’être trop féminine pour une féministe. Il est peut être vrai qu’ici en France, pays industrialisé, le combat de mes soeurs féministes est celui des diktats imposés par la société industrielle, celui du regard malsain et agressif de ces hommes celui dont je vous parlais plus haut, mais pour d’autre comme moi, donc l’histoire personnelle est tout autre, mon choix était celui d’assumer mon corps et mon image et de l’assumer jusqu’au bout. Partant de ce principe, je ne peux tolérer que l’on puisse me juger et opérer une anticipation sur ce que je peux penser au vu de mon physique. Juger les autres pour leur tenue vestimentaire est, madame, une attitude réactionnaire et sans réel fondement.

Comme je viens de vous le prouver, prendre pour référence les femmes d’un autre pays n’est pas pertinent, puisque vous ne raisonnez pas toute chose égale par ailleurs. Les patchounes et les françaises sont aux antipodes l’un de l’autre, comment pouvez-vous comparer leurs habitants? Et la démocratie… foutaises. Indignez-vous des autres scandales que vous voyez au quotidien, sauf si évidemment, aussi bien lotie vous ne puissiez pas voir la misère qu’il y a en France, celle de la sous-France, celle des larmes et de la faim et que vous ne vous arrêtiez qu’à des épiphénomènes sans réel enjeu, présentés par ces chiens de garde télévisuels.

Madame, je vous ai trouvée bien injuste dans cette lettre et j’avoue avoir été déconcertée par une telle prise de position.

Le bonheur, la liberté et le féminisme sont des substantifs à définition plurielle, méditez-le.

La Robe Rouge.



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Par Jean-François Diné
posté le 30 juillet à 16:26

En lisant cet écrit de « la robe rouge » on a l’impression que l’objectif premier est celui de faire perdre la crédibilité de cette sublime lettre d’Elisabeth Badinter, quels que soient les arguments qu’il faille employer pour cela… J’ai honte pour vous « la robe rouge » !

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