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La tentation d’une île, Derrière les caméras de la téléréalité de Philippe BARTHEROTTE

Par Lecturissime

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♥ ♥

Ils pensaient que ce n'était qu'un jeu...

L’auteur :

Philippe Bartherotte, 32 ans, a été journaliste de téléréalité de 2001 à 2008. Il a mis fin à cette expérience en révélant dans la presse les méthodes de production de l’émission Pékin Express. Après L’avocat du diable, toujours sur la téléréalité, il a publié un roman Sugar Baby en 2011.

Quatrième de couverture :

Philippe Bartherotte brise la loi du silence. Ce journaliste de téléréalité nous raconte son quotidien, aux côtés de candidats, exploités, trompés et manipulés par des producteurs de télévision qui ne reculent devant rien pour faire monter l'audimat. L'Ile de la Tentation, Star Academy, Pékin Express, une émission dantesque sur des chômeurs commandée par France 2... On suit son parcours à cent à l'heure, dans les méandres d'une gigantesque supercherie à laquelle il participe activement. En retournant les caméras de la téléréalité, Philippe Bartherotte tend à notre époque un miroir cruel.

Ce que j’en ai pensé :

Philippe Bartherotte a travaillé 7 ans dans le secteur porteur de la téléréalité. Jusqu’à ce qu’un jour il décide de claquer la porte, écoeuré par tant d’agissements expédifs. Il décide par la suite de témoigner de son expérience sur les tournages de « L’île de la tentation » et de « Pékin Express » dans un livre choc.

Su l’île de la tentation il doit interviewer les candidats fortement alcoolisés, privés de sommeil volontairement afin que l’on puisse les manipuler plus facilement par la suite. Acculés, ils deviennent des pantins au service de la production.

Puis sur Pékin Express il prouve comment le jeu est truqué d’avance : la production décide de privilégier tel ou tel binôme en fonction de son pouvoir télégénique pouvant influencer l’audimat.

« Cette émission nous soumet au plus grand décalage qui soit. D’un côté l’extrême pauvreté des gens qu’on rencontre, leur beauté, leur honnêteté, leur dignité, leur générosité… Et de l’autre, le cynisme sans bornes, la vulgarité, la laideur, l’égoïsme, la cupidité d’une production à l’image de notre capitalisme sans morale. L’être humain et la machine. Nous sommes là pour faire de l’audience. De l’audimat. On triche, on trafique, pour mieux vendre de l’espace publicitaire à des annonceurs. Et les gens qui accueillent nos candidats ne savent rien de tout cela. Ce sont des gens sincères qui donnent ce qu’ils ont de bon cœur. On les trompe eux aussi en quelque sorte. Eux sont vrais. Nous, on triche. » (p.246)

Il fera une brève incursion sur les chaînes publiques, pour un reportage sur les chômeurs, mais « finalement avec le docutainment sur les chômeurs et l’émission de Jean-Luc, je me suis rendu compte que le service public était bien plus hard core que je ne l’imaginais. Plus hard core tout en étant moins divertissant. » (p. 155)

 La téléréalité est un monde impitoyable, truqué à la base par des producteurs avides de gains. Des êtres qui ne respecte aucunement l’humain, obnubilés par le matériel, le pouvoir, l’argent facile. Philippe Bartherotte  nous peint un monde de sexe, de drogue, d’argent, de futilités, un monde qui broie tout individu innocent pris dans ses filets. Lui-même a souhaité s’en extraire avant qu’il ne soit trop tard, et le rêve final qu’il raconte fait froid dans le dos quand on repense à l’épisode tragique de la mort de Gérard Badin : des candidats filmés se succèdent devant un homme armé d’une épée qui les combat pour qu’ils ne prennent pas sa place.  « Et entre les rounds, j’étais chargé de faire des ITV (interviews) des candidats, à qui parfois il manquait un bras ou un œil, quelquefois les deux. Alors qu’est-ce que tu ressens ? Tu as mal ? Où tu as mal ? Tu as peur ? A quoi penses-tu maintenant ? Est-ce que tu crois que tu as encore une chance ? Et quand ils agonisaient, je posais toujours la même question : « Alors, ça fait quoi d’être en train de mourir ? » Je relançais avec des « C’est-à-dire ? » » (p. 337)

Glaçant...

Premières phrases :

« Qu’est-ce que tu es prête à faire pour participer à cette aventure ?

Je suis prête à tout.

C’est-à-dire ?

La jolie jeune fille qui est assise en face de moi se lève avec un grand sourire aux lèvres. Elle passe derrière la caméra, que j’ai à peine le temps de faire pivoter sur son trépied, et m’embrasse sur la bouche. Devant l’objectif, bien sûr. Avec la langue, ça va de soi. »

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Du même auteur : L’avocat du diable

La tentation d’une île, Derrière les caméras de la téléréalité, Philippe Bartherotte, Editions Jacob-Duvernet, 2008, 20 euros


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