Il est un air, pour qui je donnerais,Tout Rossini, tout Mozart et tout Weber. Un air très vieux, languissant et funèbre,Qui pour moi seul a des charmes secrets! Or, chaque fois que je viens à l'entendre,De deux cents ans mon âme rajeunit...C'est sous Louis treize; et je crois voir s'étendreUn coteau vert, que le couchant jaunit; Puis un château de brique à coins de pierre,Aux vitraux teints de rougeâtres couleurs,Ceint de grands parcs, avec une rivièreBaignant ses pieds, qui coule entre les fleurs; Puis une dame à sa haute fenêtre,Blonde aux yeux noirs, en ses habits anciens,Que dans une autre existence peut-être,J'ai déjà vue...et dont je me souviens!
Gérard de Nerval, Fantaisie, dans: Claire Julliard, Petite anthologie des plus beaux poèmes du bonheur (L'Instant Cupcake, 2013)
image: Edmund Blair Leighton, The End of The Song (canvaspaintingforsale.com)