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[anthologie permanente] petite anthologie du samedi

Par Florence Trocmé

Extraits de quelques-uns des ouvrages reçus par Poezibao et listés ici.

 
Rainer Kunze
, Invitation à une tasse de thé au jasmin, anthologie personnelle de Rainer Kunze, traduit de l’allemand par Muriel Feuillet et Mireille Gansel, édition bilingue, Cheyne Éditeur, 25€ 
 
L’oiseau douleur 
Maintenant j’ai trente ans 
et je ne connais pas l’Allemagne 
La hache-frontière s’abat dans la forêt d’Allemagne 
ô pays qui se brise 
au cœur de l’homme 
Et tous les ponts dérivent 
Poème, monte, vole vers le ciel ! 
Monte, poème, et sois 
l’oiseau Douleur 
(p. 61) 
 

 
Dorothée Volut, A la Surface, Eric Pesty éditeur, 2013, 13€  
Il y a dans la nature une matière à sauver qui explique que l’homme incessamment, et bien malgré lui, aille à l’arbre. Ce n’est ni une bonne nouvelle, ni une image. La feuille est un tissu : quelle encre y coule ? Ce que transportent nos mains, nos yeux l’ignorent. Cela m’est arrivé quelquefois de marcher pieds nus dans la forêt et c’était bien plus fou que n’importe quelle fête foraine ou grande promotion dans les magasins. Ma tête n’était pas couronnée et personne autour de moi ne sut jamais ce qui s’était passé. Voilà une des formes que peut prendre l’air. 
(p. 49) 
Marie de Quatrebarbes, Transition pourrait être langue, peinture de Michel Braun, Incursion de Caroline Sagot-Duvauroux, Les Deux-Siciles, 2013, 15€ 
 
Comme ça remue, l’herbe 
les feuilles tombelottent nos archives 
le grand vent tonne 
   apparemment 
   dans sa mouillure 
Alors allons, comment va ta façon ? 
« allégeons, allégeons » 
allongez-vous près de moi 
ça bouge l’herbe 
Aujourd’hui : trombes noires 
votre faculté à mourir, allongez-la 
le vent grondelotte sous l’arbre mort 
des feuilles bougent dans mon dos 
ombres et jaunes, 
La différence, ne la pense pas 
de sorte que d’être toujours en mouvement 
ne se pense pas 
(p. 34) 
 

 
Amandine Marembert
, Je fleuris la terre ma robe, coll. Prime abord, Les éditions du petit pois, 2013, 10€ 
dans le dictionnaire 
pommeraie cerisaie pruneraie poireraie 
je trouve oseraie 
imagine l’osier vivant 
qui tresse ses branches 
vannières sur ma peau 
(p. 21) 
L’Atelier contemporain, 1er numéro, été 2013, 20€ 
 
Le trait est conducteur de la vie, de la force vitale. Même en écrivant, le mouvement qui anime le trait est vie, il change selon les états qu’il doit traverser pour manifester le contenu des mots. 
Cette vie traduit d’une part l’inconnu, l’animation secrète de la perception et d’autre part les conditions qui la limitent. Ces conditions sont les miennes : ma force, mon attention, mes capacités de sentir (et ma faiblesse, inattention, mes résistances et d’autres incapacités). 
Le trait naît entre deux mondes, l’inconnu et les limites subjectives. 
(Alexandre Hollan, Carnets, été 2011, p. 159) 


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