« Ce ne sont pas les
théoriciens qui peuvent définir le moderne; il faut je ne dirai pas une
sensibilité mais une véritable sensualité attachée à l'usure de la vie - l'usure
pauvre, surtout - dans ce qui est de la pénétration et du renvoi des pierres et
des murs et des êtres et du souffle dans les voluptueuses voussures de la terre
qui font les villes. Il faut aimer les maisons non seulement passionnément mais
passionnellement, jusqu'à éprouver dans cela même une sorte d'usure.
C'est assez dire que le visuel n'est pas tout dans ce domaine. Il faut le grand
palpable humain qui a trop de sens, parce qu'y est dépensé trop d'amour. Les
intellectuels ou les visuels de l'équerre y sont totalement incompétents. Et
aussi ceux qui clament "vitesse", "projecteurs",
"radiateurs" ou Dieu sait quoi de cet ordre. La vie humaine moderne
et ce formidable lyrisme qu'elle entraîne est anonyme et sans moyens de
répercussions assurés. Il y a donc ce luxe sourd pour quoi toute une jeunesse
se tient droit, très forte, à l'aube de temps qui vont changer.
Rousseau [...] fut à proprement parler le premier poète de l'émotion moderne.
Si vous voulez comprendre, lisez et délectez-vous. Jamais on n'a mieux défini
le moderne. ».
site
de Jean-Louis Kuffer : « En
lisant Vouloir être moderne, et autres textes de la section Esthétique,
dans Propos 1, 5e tome des Œuvres complètes en cours de parution.
L'Age d'Homme 2013, 1095p. »