Un Roméo et Juliette judéo-chrétien, le son du shofar au coeur de la partition musicale; retour aux sources de West Side Story, l’un des plus grands films de tout les temps.
Au départ, il y a une idée de Jerome Robbins : « En 1949, s’est souvenu Arthur Laurents, Jerry voulait faire une adaptation contemporaine de Roméo et Juliette dans les quartiers du Lower East Side de New York, qui s’intitulerait de ce fait East Side Story. L’action se tiendrait au moment de la Pâque juive et catholique : les Montaigus seraient les catholiques, les Capulets, les juifs
Mais le projet est abandonné pour quelques années avant d’être réactivé :
Nous nous enflammons à nouveau pour l’idée d’un Roméo, note Léonard Bernstein dans son journal. Mais nous avons abandonné l’idée maîtresse de l’opposition entre juifs et catholiques qui n’est pas nouvelle et nous sommes convenus de ce qui à mon avis va vraiment marcher : deux bandes rivales d’adolescents, l’une constituée de nouveaux arrivants portoricains, l’autre d’ »Américains » de l’immigration blanche. Soudainement, tout prend vie : j’entends des rythmes et des pulsations, et, avant tout, je puis me faire une idée de l’architecture de la pièce.
Et même si les quatre créateurs de ce drame musical américain, Leonard Bernstein (musique), Jerome Robbins (mise en scène) , Arthur Laurents (livret) et Stephen Sondheim (paroles) sont juifs et que les identités ethniques des protagonistes ont été modifiées permettant à Léonard Bernstein de satisfaire son amour pour les rythmes latins et les percussions , c’est ce conflit interconfessionnel qui reste au cœur du développement thématique de la partition, l’inspiration originale dans la musique reste ancrée partout.
West Side Story est une illustration parfaite de l’assemblage extraordinairement réussi de sources et d’influences diverses. Il y a, par exemple, la chanson Somewhere qui s’inspire d’une mélodie du Lac des cygnes qui, elle-même, a un parfum hébraïque.
Mais le plus étonnant est la présence des sonneries de shofar, la trompette antique d’Israël tout au long de la partition.
Les premières notes de l’introduction ne sont rien d’autre qu’une évocation orchestrée à pleine gorge du son du shofar. Et ce thème est le noyau musical de Bernstein qui revient le plus dans la musique de cette partition.
ainsi que l’a démontré le musicologue Jack Gottlieb dans son merveilleux ouvrage Funny, It Doesn’t Sound Jewish.
West Side Story demeure, l’un des films musicaux les plus populaires, célèbre dans le monde entier, qui remporta en son temps pas moins de 10 Oscars.