(Domino)
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Que reste-t-il de nos amours ? Arctic Monkeys n’a eu de cesse d’évoluer au fil que leur discographie s’épaississait passant de phénomène indé avec un premier disque passé à la postérité jusqu’au statut de machine de guerre commerciale depuis Humbug en 2009, et un virage américanisé. Et ce en signant l’exploit de ne pas trop perdre de fans en route, au contraire. Mais les plus connards, dont nous faisons parti intégrante, sentent le vent tourner défavorablement avec un Suck It & See mi-figue mi-raisin en raison d’une accointance à jouer la carte de la facilité de la part d’Alex Turner et ses petits copains. Et d’imaginer que le groupe ne va malheureusement pas s’arrêter en si « bon chemin » pour nous avec AM, cinquième album déjà…
Et les craintes deviennent autant de certitudes dès les deux premiers singles, qui sont également les deux premiers titres du disque. R U Mine c’est la caution rock gras tandis que Do I Wanna Know est LE tube de l’album, dans un registre musique de stade que le groupe n’avait pas encore atteint jusque là. Pas très saint d’esprit mais diablement efficace dans les deux cas, il faut bien le reconnaître.
Plus de doute donc, les mecs de Sheffield ont sans surprise franchi définitivement la barrière du mainstream. Pas forcément une insulte hein, il y a des formations qui réussissent très bien dans ce domaine. Ce qui n’est pas encore le cas d’Arctic Monkeys.
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Arctic Monkeys – Do I Wanna Know ?
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On est parfois soit dans la facilité (One For the Road, I Want It All, des titres honnêtes mais loin d’être mémorables), soit dans le mauvais (N°1 Party Anthem, Mad Sounds) et parfois même les deux (le tout caca Why’d You Only Call Me When You’re High). A trop vouloir faire de tubes, le groupe en a oublié de faire de la musique. Parce que de morceaux à potentiel de hit de qualité, il y a seulement le sus-cité Do I Wanna Know et Snap Out of It. Ce dernier parce que l’espace de 3 minutes, les anglais refont du rock anglais. Il n’y a pas de secret.
Le reste est trop à l’américaine, trop propre, trop strict, n’offrant aucun espace pour un peu de folie. On le redit, on est face à de la musique de stade comme peuvent le faire des Muse et Coldplay dans l’esprit (bon, avec plus de crédit tout de même, du moins pour le moment..) ou Queens of the Stone Age dans le fond.
On retrouve d’ailleurs Josh Homme sur deux titres (One for the Road et Knee Socks) et l’esprit de son groupe plane sur ce AM. Parfois même un peu trop.
Et même sans vouloir jouer aux aigris pointilleux, à part les fans hardcore forcément aveugles, une oreille neutre s’ennuiera rapidement face au manque de pep’s et d’originalité ambiant. Les mecs jouent trop la sûreté, Alex Turner se caricature lui-même et tout tourne trop en rond. Et même les apports de vieux de la vieille comme Homme, Bill Ryder-Jones ou le batteur d’Elvis Costello, Pete Thomas, ne suffisent pas à relancer la machine grippée. Le groupe s’est empâté dans son lit de coton et n’arrive que trop rarement à se remettre sur pieds et se rappeler à nos bons souvenirs passés (Knee Socks). Prévisible, mais forcément malheureux.
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Arctic Monkeys – Snap Out of It
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Arctic Monkeys – Knee Socks
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Parce qu’intrinsèquement, on connait le potentiel d’Arctic Monkeys, on sait ce qu’ils sont capables de faire et on ne peut pas leur enlever qu’ils ont une signature, un style reconnaissable. Les mecs savent faire de la bonne musique et la frustration est d’autant plus importante quand on les voit se la couler douce. Peut être même qu’un album comme celui-ci, fait par un groupe de seconde zone, aurait une meilleure appréciation au final. Encore que..
Il a quand même des lacunes certaines qui peuvent aussi rappeler le groupe à la réalité de la chose et qu’il n’est pas donné à tout le monde de servir de la soupe pour grand public. Trop commercial pour nous émouvoir, pas assez pour toucher le plus grand nombre. Le cul entre deux chaises.
Nul doute que les fans de The Kooples ou même des nouveaux fans de rock qui ont délaissé BB Brunes « parce que c’est trop nul » pour aller vers la lumière y trouveront leur compte. Tant mieux pour eux. Pour les autres, ça ressemble à un film érotique du dimanche soir sur M6. Au mieux, une demie demie-molle à la première fille dénudée mais aucun véritable intérêt final.
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Tracklist: 1. Do I Wanna Know ? 4:32
2. R U Mine ? 3:22
3. One For the Road 3:26
4. Arabella 3:27
5. I Want It All 3:04
6. N°1 Party Anthem 4:03
7. Mad Sounds 3:35
8. Fireside 3:01
9. Why'd You Only Call Me When You're High ? 2:41
10. Snap Out of It 3:13
11. Knee Socks 4:18
12. I Wanna Be Yours 3:04
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