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Dérochement : ils cherchent l'ours sur l'estive de Pouilh à Salau

Par Baudouindementen @BuvetteAlpages

Et ce n'est pas une contrepètrie! 

Estive de Pouilh (commune de Couflens, Couserans, Ariège) - L'ours est-il coupable de la mort de nombreuses brebis sur l'estive de Pouilh ? C ’est la question posée par France 3 Midi-Pyrénées.

"Mercredi, les agents de l'ONCFS sont venus vérifier une accusation selon laquelle l'ours serait responsable des chutes mortelles dans un ravin de plusieurs dizaines de brebis de l'estive de Pouilh."
Les agents de l’ONCFS ont été “très mal reçus par les éleveurs”: injures, invectives, menaces. L’article, un brin ironique précise que « comme souvent ni griffure ni morsure permettant d'incriminer l'ours avec certitude » n’ont été trouvée. Comme souvent ? Comme chaque fois que les éleveurs veulent charger un prédateur pour toucher les indemnisations, un système pourri qui « oblige » les éleveurs à faire endosser les dommages à un coupable précis, l’ours, qu'il soit ou non le responsable ! Car si le responsable s'avère être la foudre, un chien ou quoi que ce soit d’autre, ils ne touchent rien, nada ! Une assurance et le problème serait résolu...

" Une estive à l'ancienne "

A quoi sert l'expertise ? « Les éleveurs sont exaspérés par les doutes des agents de l'administration. » Et oui, les agents de l’administration ne sont pas là eux pour charger l’ours en fermant les yeux. Ils expertisent et émettent un rapport, qui va ou ne va pas dans le sens des éleveurs. Il n'y a pas de réponse systématique: c’est leur boulot d'expertiser. Et malgré le fait que quand il y a doute, celui-çi bénéficie aux éleveurs, les éleveurs « exaspérés par les doutes des agents », pêtent un cable. Sur l'estive, ils "cherchent des poux à ces salauds!" (facile, je sais) et ne les laissent plus les agents de l'ONCFS faire leur travail. Selon la Dépêche du Midi, bien évidement sur la balle, pardon la brebis : "Ils auraient été sommés de laisser aux éleveurs un double de leur rapport, ce que la procédure ne prévoit pas, sous la menace d’être retenus sur l’estive."

Pourquoi l'ours DOIT-il être le responsable ? Il suffit de lire, le reportage de Laurent Winsback et Pascal Dussol donne la réponse : « Cette estive est une estive à l'ancienne, sans clôture et sans chien de protection ».

De nouvelles menaces contre les ours

Après des menaces de prise d'otage, de nouvelles menaces contre les ours...

Menaces-pouilhUn éleveur éructe en pleine crise: " Dans 8 jours, il faut que la montagne soit libre !"

Claude Duran, président du groupement pastoral d'Oust lance de nouvelles menaces contre les ours :

Incessement sous peu, on mettra fin certainement à toutes ces… , à tous ces ours. Il va falloir remédier à quelque chose puisque personne ne veut s’en occuper. En se prenant par la main, ils ont montrés aujourd’hui, tous les éleveurs, tous les groupements pastoraux, la solidarité qu’il y a entre nous donc on ne se laissera pas manger tout cru...” malgré le style, le sens du message est compréhensible.

Réactions immédiates

L'ADET a réagit en deux temps. Hier (11 septembre 2013), dans un premier communiqué, l'association apporte des précisions :

"Que l’ours soit ou non à l’origine du dérochement de Pouilh, il n’est pas un hasard que cela soit arrivé sur cette estive ...
Selon les opposants à l’ours, une trentaine de brebis auraient déroché en Ariège ce début de semaine. Que l’ours soit ou non à l’origine du dérochement, il n’est pas un hasard que cela soit arrivé sur l’estive de Pouilh.
Le berger, certes ancien dans la profession, est surtout connu pour être totalement opposé aux mesures de protection des troupeaux. Les brebis y sont donc extrêmement vulnérables et exposées aux nombreux risques liés au milieu montagnard : chutes, maladies, parasites, foudre … et prédation.
Ailleurs en Ariège comme partout dans les Pyrénées, de plus en plus de bergers regroupent les troupeaux chaque nuit et les protègent avec des chiens patous. Et à chaque fois, le résultat est le même : une baisse très significative des pertes et prédations.
Il n’y a plus guère que l’ADDIP et l’ASPAP pour nier l’évidence et dissuader les éleveurs et bergers de protéger leurs troupeaux, avec les risques et conséquences insensés que cela implique, comme on le on voit à Pouilh.

Que ce soit l’ours ou non, cela importe peu. Le risque de dérochement est réel en montagne, potentiellement provoqué par des chiens, la foudre, un sanglier … ou, cas rare mais toujours monté en épingle, l’ours. 


La seule différence, c’est que les pertes sont indemnisées seulement si l’ours peut être mis en cause. D’où peut être l’empressement de monter l’affaire en épingle, avant même l’expertise qui seule pourra conclure sur les causes de l’accident.
N’en déplaise à l’ADDIP et à l’ASPAP, l’histoire est en marche, et elle va dans le sens de la cohabitation.
Qui peut encore croire que la solution pour limiter les 25.000 morts de brebis dans les Pyrénées chaque été (dont moins de 1% est dû à l’ours) est de ne pas protéger les troupeaux, alors que l’Etat met à leur disposition les moyens, techniques et financiers ?"

Aujourd'hui, dans un deuxième communiqué, l'ADET et FERUS dénoncent "des mensonges et une violence inadmissibles."

" Lors de l’expertise sur le prétendu dégât d’ours du week-end dernier en Ariège, l’Aspap-Addip a été incapable de présenter aux agents de l’ONCFS le moindre élément accréditant la responsabilité de l’ours comme le dénonçait pourtant leur communiqué il y a deux jours. La violence de leur attitude n’était là que pour masquer l’absence d’arguments.

Nos interrogations étaient donc fondées et leur communication n’est une nouvelle fois qu’un tissu de mensonges : ni agneaux lacérés, ni ourse accompagnée d’oursons, les agents n’ont relevé aucun indice de prédation ou de consommation par un ours.

Ces brebis situées dans une zone à risques ont chuté pour une cause indéterminée, comme cela arrive malheureusement, et l’Addip-Aspap cherche à tout prix à les faire passer « sur le dos de l’ours » car c’est la seule cause de mortalité qui soit indemnisée.

Toute cette opération est une manipulation montée de toutes pièces pour faire pression sur l’Etat, obtenir l’indemnisation des brebis mortes, et dissuader le gouvernement de prendre quelque initiative que ce soit pour la conservation de l’ours dans les Pyrénées.

Sous la pression des opposants, « l’indemnisation au bénéfice du doute » pour les pertes à l’origine incertaine est entrain de devenir une « assurance tous-risques » qu’il suffit de réclamer assez fort pour l’obtenir sans justification.

Depuis des mois, nous dénonçons le laisser-faire de l’État dans ce dossier. L’attitude violente et menaçante des opposants à l’ours envers les agents de l’Etat venus faire le constat est inadmissible. S’il continue à tolérer ces propos et actes illégaux, la situation va rapidement dégénérer.

Nous demandons instamment au Ministre de l’Écologie et aux Préfets de faire respecter la Loi dans les estives pyrénéennes afin de mettre un terme à ces exactions insupportables en démocratie."

Un pastoragate ! Des précédents !

Attendons le résultat de l'expertise..., qui visiblement risque bien d'être attribuée à l'ours "au bénéfice du doute", une fois de plus. Ce ne sera pas la première fois que les ultrapastoraux montent une escroquerie de toutes pièces.

En 2006, en Haute-Ariège, à Aston, L'ADDIP déjà tente de passer en force pour obtenir dans un interminable feuilleton, des dédommagements pour des veaux. Yves Guillot, alors préfet de l’Ariège publie un communiqué à propos des 8 veaux morts dans l’élevage de monsieur Lagarde sur l’Estive d’Aston. La préfecture a envoyé sur l’estive un docteur vétérinaire afin de procéder à des constats complémentaires et évaluer l’état de santé des bêtes qui y sont présentes. Résultat ? Les veaux de l’estive de Calvière (massif d’Aston) étaient morts de la maladie du charbon et pas à cause de l'ours. L'éleveur qui espérait un remboursement ne surveillait pas son troupeau. Encore une estive "à l'ancienne".

En novembre 2008, un journaliste d’une webTV raconte qu’un montagnard lui explique “comment certains essaient d'obtenir des dédomagements de pertes avec une planche de parquet équipée de 5 fausses griffes d'ours permetant de faire croire à une attaque d'ours.

En août 2011, des dégâts « d’ours » sur chevaux Merens sont rejetés. Bruno Besche Commenge, le stratège de l’ASPAP, commet un communiqué qui fait bien rire dans les facultés vétérinaires. « Après avoir été contacté par un éleveur, un zootechnicien est allé constater les blessures d’un cheval de mérens dans la vallée d’Orle. Les propriétaires du cheval ont jugé nécessaire de faire appel à ce professionnel, venu bénévolement, dans le but de connaitre la vérité, le constat établit par les vacataires de l’ONCFS, n’était pas suffisamment élaboré pour déterminer ce qui était arrivé à ce cheval». L’ASPAP a donc recours à un "zootechnicien, professionnel et bénévole". qui classe le cheval parmi les "grands ruminants" ! Ce zootechnicien est un expert, visiblement bien plus compétent que ces manches de fonctionnaires, des "vacataires". L'ASPAP publiera la queue entre les jambes un communiqué rectifiant l'erreur du zootechnicien.

Le 18 septembre 2011, 58 brebis font le "saut de l’ange" et sont retrouvées mortes à Etsaut au-dessus des estives d'Yèse. La République des Pyrénées écrit : "La Cido n'a trouvé « aucun élément susceptible d'engager la responsabilité de l'ours » dans cet accident. Et pointait, au contraire, des « manquements » dans le gardiennage du troupeau de 1300 têtes, assuré par Bertrand Domengeus."

Louis Dollo s'en prend alors à tout le monde: à la CIDO, la Commission d'indemnisation des dégâts d'ours du Parc National des Pyrénées «constituée d'élus  girouettes », aux agents du PNP déjà: « Les indemnisations de dégâts d'ours se font à la tête du client. Le niveau de compétence des agents de l'ONCFS et du Parc National est discutable et discuté pour réaliser des pseudo-expertises qui ne sont que des constats approximatifs que n'importe quel éleveur est capable de réaliser au premier coup d’oeil».

Fait rarissime, à la suite des délires de Louis Dollo, le PNP ira jusqu'à publier un communiqué. Mais les pressions finissent par payer auprès des élus locaux membres de la CIDO: ils décident de dédommager quand même ! Le 20 décembre 2011, la commission CIDO se réunit à nouveau :

« …. la Commission d’Indemnisation des Dégâts d’Ours du Parc national des Pyrénées rappelle qu’elle ne traite que les cas pour lesquels il y a un doute. Elle a constaté qu’il n’y avait pas de faits nouveaux pour ce dossier. Cependant, considérant les incidences économiques désastreuses pour certains éleveurs et compte tenu de l’absence de certitude de la non responsabilité de l’ours, la commission a décidé d’indemniser ce dégât ».

"Cependant"... BINGO! Cela marche.

Cela a déjà marché. Alors ils recommencent. Le système de dédommagement des dégâts est pourri...

Question : y a-t-il encore un pilote dans l'avion, quelqu'un dans les ministères ?


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