Magazine Culture

Jimmy P. : amitiés et analyses

Publié le 16 septembre 2013 par Unionstreet

Jimmy P

Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, Jimmy Picard, un Indien Blackfoot ayant combattu en France, est admis à l’hôpital militaire de Topeka, au Kansas, un établissement spécialisé dans les maladies du cerveau. Jimmy Picard souffre de nombreux troubles : vertiges, cécité temporaire, perte d’audition… En l’absence de causes physiologiques, le diagnostic qui s’impose est la schizophrénie. La direction de l’hôpital décide toutefois de prendre l’avis d’un ethnologue et psychanalyste français, spécialiste des cultures amérindiennes, Georges Devereux.

jimmy-p-09-2013-3-g

Jimmy P. était attendu lors du Festival de Cannes 2013 puisqu’il était à la fois le départ d’Arnaud Desplechin vers les USA, et l’adaptation du livre de Georges Devereux publié en 1951. Biographie, adaptation, film en anglais, Arnaud Desplechin se lance dans un périple de deux heures qui peut inquiéter. Il fait donc son grand retour en compétition officielle après Un conte de Noël en 2008 et s’en sort avec les honneurs.

Il n’était pas facile de retranscrire les dialogues entre deux hommes qui ne se ressemblent pas. Et pourtant, les dialogues sont vite passionnants et entraînent le spectateur dans des conversations fleuves et émouvantes. La beauté du film vient de l’amitié qui naît à l’écran, sous nos yeux, entre ces deux hommes que tout sépare. La relation entre les deux hommes devient poignante et l’on remercie ce duo d’acteur impeccable.

En premier lieu, il y a Benicio Del Toro qui est immense en homme d’acier brisé, James Picard, indien des plaines cherchant sa fille et tentant de retrouver un sens à sa vie. Il est gigantesque quand il sourit en voyant une femme, il est gigantesque quand il est bouleversé lorsqu’un détenu essaye de mettre fin à ses jours devant lui. Benicio Del Toro est tout simplement l’un des plus grands acteurs de sa génération, et la Palme d’interprétation aurait pu lui être encore une fois décernée.

Mathieu Amalric, lui, en incarnation de György Dobo (le vrai prénom de Georges Devereux avant de se faire naturaliser français) est savoureux. Vif, drôle, aussi original dans ses analyses médicales que dans son comportement, son Georges Devereux est l’opposé exact de James Picard. Et pourtant, à force de dialoguer, les deux personnes ne forment plus qu’une amitié. Le film est tout aussi intéressant lorsqu’il envisage d’expliquer le rapport entre Georges Devereux avec les femmes. Le film est étonnamment très émouvant lorsqu’il se détache de son duo masculin lors du monologue face caméra de Madeleine (La craquante et élégante Gina Mckee), retournant à Paris.

L’image est sublime quand le réalisateur pose sa caméra dans les immenses paysages américains. Nous pouvons remercier le directeur photo, Stéphane Fontaine, qui avait également fait des merveilles pour Un prophète. Tout le film est d’ailleurs joli visuellement, et la reconstitution de l’hôpital dans lequel est interné James Picard semble authentique. Arnaud Desplechin a justement réussi à rendre cet hôpital très inquiétant dans le début du film, faisant ressentir au spectateur la solitude de son héros.

La musique composée par Howard Shore ne prend jamais le pas sur les dialogues et se fait, heureusement, très discrète. Mais quand il faut écouter la musique, lorsque plus personne ne prononce un mot, Howard Shore nous offre le meilleur. Il est drôle d’ailleurs de rappeler qu’Howard Shore a composé les musiques de plusieurs films de David Cronenberg. Car souvent nous pensons à son Dangerous Method. Mais rassurez vous car Jimmy P. possède peu de points communs avec A Dangerous Method, si ce n’est son sujet. Et possède beaucoup plus de qualités.

En travaillant le duo que tout oppose et en maîtrisant entièrement ses dialogues, Arnaud Desplechin arrive petit  à petit à devenir un élément indispensable du cinéma français. Après chacun de ses films, et encore une fois, une seule remarque me vient en tête : vivement son prochain film !

Image de prévisualisation YouTube

Comments

comments


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Unionstreet 88609 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine