Un cap : la transition énergétique. Un véhicule : la loi sur la transition énergétique. François Hollande a prononcé ce matin au Conseil, économique, social et environnemental, le discours d’ouverture de la deuxième conférence environnementale. Un discours avec quelques paradoxes. Qui ressemblait davantage à un discours de clôture du débat national sur la transition énergétique qu’à un discours d’ouverture d’une conférence environnementale au sens large.
De retour de la Conférence environnementale à laquelle j'ai assisté, je retiens deux choses du discours du Chef de l’Etat :
- Une priorité donnée à la transition énergétique
- Une priorité absolue donnée à la loi de transition énergétique « l’une des plus importantes du quinquennat », ce qui représente aussi une prise de risque importante.
Certes, on ne peut que se féliciter de constater que le Chef de l’Etat accorde du temps et de l’importance à la transition énergétique. La culture de l’Etat et de son Chef changent : tant mieux. Par ailleurs, je fais partie des optimistes. Reste un discours surprenant à plusieurs titres.
1. En premier lieu, le discours de François Hollande s’apparentait plus à un discours de restitution du débat national sur la transition énergétique.
Ce qui a fortement déplu à nombre d’environnementalistes présents. François Hollande a choisi de prononcer un discours centré sur l’énergie et a concentré ses déclarations sur le sujet. Deux d’entre elles émergent : le taux de la TVA sur les travaux de rénovation énergétique est abaissé à 5% et la loi sur la transition énergétique devrait comprendre un volet sur le droit nucléaire pour doter l’Etat de nouveaux outils de pilotage de l’avenir du parc. Une correction possible de la loi « Transparence et sûreté nucléaire » de 2006. Plusieurs annonces aussi sur les économies d'énergie : consommation d'hydrocarbures, renforcement de l'éco PTZ et fonds de garantie géré par la caisse des dépôts.
La segmentation de la problématique environnementale n’est pas nécessairement opportune. Il faut tirer sur ce point les leçons des limites du débat national sur la transition énergétique. A titre d’exemple, la question du changement climatique ne peut être isolée de celle de l’effondrement de la biodiversité. La mutation en cours est à la fois sociale, économique et écologique.
2. En deuxième lieu, le Président de la République mise tout sur la loi sur la transition énergétique
La quasi-totalité des objectifs et mesures présentes dans le discours de François Hollande a un point commun : la loi sur la transition énergétique. Ce qui représente un prise de risque : que toutes les revendications et que tous les lobbyings aussi convergent sur ce seul instrument qui va cristalliser les espoirs et peut-être des déceptions selon les intérêts défendus.
La prise de risque est d’autant plus grande que la loi ne sera pas déposée au Parlement avant plusieurs mois. Pendant ce temps, chaque groupe d’intérêt va donc avoir le temps de s’organiser et de tenter de peser : les attentes et la pression seront extrêmement fortes. Et ce d’autant plus que les objectifs annoncés sont ambitieux.
3. En troisième lieu, le Président de la République s’est inscrit, non dans une rupture mais plutôt dans une continuité avec le Grenelle de l’environnement.
La Conférence environnementale avait pourtant été présentée pendant la campagne électorale comme une rupture. Une analyse infirmée ce matin par le Chef de l’Etat qui a même placé la réforme de l’assiette carbone de la TIC s’inscrivait ainsi dans le prolongement de la réforme de la contribution carbone portée par son prédécesseur.
Du point de vue des institutions, la création d'un "conseil d'orientation de la transition énergétique" est confirmée. Reste à savoir comment ses travaux s'articuleront avec ceux du conseil national de la transition écologique qui vient d'être créé.
3. En troisième lieu, le Président de la République a sonné une charge forte contre le «tarif de rachat » des énergies renouvelables.
Un passage du discours du Chef de l’Etat va sans doute susciter une certaine inquiétude chez les professionnels des énergies renouvelables. Celui comportant une charge forte contre le « tarif de rachat », terme généralement utilisé par les opposants aux énergies vertes. Ce tarif est ainsi accusé d’avoir suscité des « effets d’aubaine ».
Je ne suis pas un intégriste du tarif d’achat mais annoncer sa disparition sans tout de suite proposer une solution de remplacement fait courir d’un trou d’air à des filières déjà bien malmenées alors que les statistiques sur la développement de l’éolien ou du solaire sont en chute libre. Un trou d’air qui pourrait se prolonger jusqu’en 2014.
4. En quatrième lieu, le Chef de l’Etat a appelé de ses vœux un « cadre réglementaire stable ».
Pas de transition énergétique sans un « cadre réglementaire stable » s’agissant notamment des normes applicables à la rénovation énergétique du bâtiment. Reste que la loi sur la transition énergétique pourrait aussi, à la suite de plusieurs autres textes, imprimer de profonds changements audit cadre réglementaire.
L’année 2014 devrait donc être celle de la transition énergétique. Le débat promet d’être très intense.
Arnaud Gossement