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Marie Cool et Fabio Balducci / Sans titre - 2003

Publié le 25 septembre 2013 par Laurejaum
Marie Cool et Fabio Balducci  / Sans titre - 2003 Dans leurs interventions, Marie Cool et Fabio Balducci s’attachent à mettre le corps à l’épreuve d’une typologie de contraintes normatives : le ruban de scotch, la feuille de papier A4, le cadre d’une porte… autant de formats standard déterminant les normes d’une existence commune. Sans titre – 2003 est l’occasion d’une expérimentation de l’élémentarité de la matière par le biais d’un geste mécanique et pourtant libre de tout usage[1]. Tendu à hauteur des yeux, un simple ruban de scotch habille l’espace vide de la galerie en en reliant les angles. Imperturbable, Marie Cool se déplace lentement. L’artiste caresse le ruban adhésif, crissant légèrement au contact de ses doigts. Dans l’espace nu, seul subsiste le lettrage de l’exposition précédente au titre énigmatique et difficilement traduisible, EINSAMZWEISAM (Seul / à deux). Apparaissant comme une évocation discrète de la profusion exubérante de l’art de Jürgen Klauke, l’inscription interroge l’altérité, dessinant la présence invisible d’un deuxième acteur. Cet autre dont la présence possible est signalée comme par omission, serait celle de Fabio Balducci, initiateur en retrait, solidaire de l’action. Le spectateur qui, dans le contexte d’une galerie d’art, s’étonnerait presque de ne pas être invité à une quelconque participation, est ici ignoré, l’artiste octroyant à l’acte infime et répété une autonomie troublante. Absorbée dans la répétition de son geste et des mouvements de son corps, Marie Cool s’absente, niant le regard du visiteur et manifestant par la même occasion un refus de toute théâtralité.
Travaillant selon la logique d’une forme de résistance à l’égard du spectacle, Marie Cool et Fabio Balducci dessinent une temporalité vide d’images, dont l’expérience élémentaire réside dans une série de normes imposées à la matière. Oscillant entre la qualité triviale d’un geste mécanisé et l’état de grâce d’un travail délivré de toute utilité, l’action de Marie Cool se poursuit dans le temps de l’absence du spectateur, soulignant le cadre temporel des horaires d’ouverture de la galerie. Sans Titre – 2003 révèle les temps morts de la relation œuvre-spectateur, introduisant le prolongement possible d’une tradition picturale moderniste, selon laquelle le sujet représenté apparaît comme replié sur lui-même, absorbé dans une activité singulière. Cette dernière consistant pour l’artiste à ouvrir une entité close reliant son corps, sa main, le ruban tendu et les angles de la pièce, détachée de tout regard extérieur.
Laure Jaumouillé


[1] Galerie Serge Le Borgne

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