Un homme prêt à tout pour s'en sortir accepte un boulot louche, mais lucratif, dont la mission consiste à transporter une mallette aux quatre coins du monde. L'unique consigne est aussi simple que frustrante : ne jamais l'ouvrir. L'idée est farfelue, mais elle permet à Jean-Baptiste Andrea d'en tirer un film efficace et ludique.
De son expérience aux Etats-Unis, Jean-Baptiste Andrea a su conserver une certaine efficacité. Le réalisateur de Dead Dnd et de Big Nothing mise cette fois-ci sur une histoire complètement barrée, une sorte de thriller psychologique un peu surréaliste. Se jouant avec habileté des figures imposées (ancien flic ayant sombré dans un état de déchéance total, qui va essayer de remonter la pente en reprenant du service…), il choisit de filmer l'action principalement en France, en appliquant son savoir-faire aux codes d'un genre habituellement réservé aux productions américaines.
Principalement focalisé sur l'évolution psychologique de son héros, le scénario impose au film un rythme soutenu. On est continuellement dans le présent, la caméra collant aux moindres faits et gestes du personnage, Jean-Baptiste Andrea ne tentant à aucun moment de donner une justification détaillée à ses actions en revenant sur les origines de sa déchéance. Privilégiant le hors-champ, le réalisateur opte pour un format en 1.85, afin de renforcer cette impression de proximité. Une bonne idée de mise en scène, puisque le spectateur se retrouve directement propulsé dans le film, en immersion dès la première seconde.
Jérémie Reniers'avère surprenant dans ce rôle de flic entraîné dans une sombre affaire. Il porte complètement le film sur ses épaules en étant présent tout le temps à l'écran. Loin des stéréotypes inhérents à ce genre de personnage, il apporte une forme d'impétuosité, de nervosité toute en retenue. Sa relation avec sa fille (interprétée par Mélusine Mayance) est l'un des points forts du film. L'identification fonctionne bien, et lorsqu'il commence à transporter cette fameuse mallette, le spectateur est suffisamment attaché à lui pour avoir envie de le suivre et de découvrir le fin mot de l'histoire en même temps. A l'inverse, les autres personnages sont trop peu caractérisés pour être intéressants. Audrey Fleurot, excellente, n'a finalement pas beaucoup de scènes. Son duo avec Jérémie Renier marche, elle apporte une bonne énergie.
Si le casting est bon et la mise en scène dynamique, le scénario, en revanche, pourra décevoir. Pendant une heure, la tension et le suspens maintiennent l'attention du public. Le film est trépidant, l'action prend place dans différents endroits exotiques, le mystère est intelligemment gardé. Mais dès que l'on en apprend un peu plus sur la machination, la simplicité de l'intrigue laisse place à une confusion déroutante. L'aspect volontairement délirant du dénouement de l'enquête, plutôt original, est satisfaisant, mais son traitement est bâclé. On suit un héros qui court, qui accumule une tension, une puissance, mais qui n'a pas vraiment l'occasion de la laisser s'exprimer. On n'a jamais l'impression d'assister au climax, étonnamment sobre et avare en action, la faute à une résolution aux explications brouillonnes.
Mais La Confrérie Des Larmes reste une bonne surprise dans le cinéma de genre en France. Seule la dernière scène manque d'ambition, mais la première heure est suffisamment intéressante pour sortir de la salle satisfait de ce petit thriller à l'américaine avec de bons acteurs.
Nous avons eu l'occasion de rencontrer Jérémie Renier et Audrey Fleurot, l'interview sera disponible lors de la sortie du film.
Ma note (sur 5) :
3
Titre original
La Confrérie Des Larmes
Mise en scène
Jean-Baptiste Andrea
Date de sortie France
09 octobre 2013
Scénario
Jean-Baptiste Andrea & Gaël Malry
Distribution
Jérémie Renier & Audrey Fleurot
Durée
100 minutes
Musique
Laurent Perez Del Mar
Photographie
Jean-Pierre Sauvaire
Image
35 mm, 1.85 : 1
Synopsis : À Paris, Gabriel, la trentaine, élève seul sa fille Juliette. Ancien flic retiré des affaires suite à un drame personnel, l’homme a du mal à joindre les deux bouts. Un jour, une ancienne connaissance lui propose un travail bien rémunéré. S’il accepte le marché, Gabriel doit livrer des mallettes à travers le monde pour des commanditaires anonymes. Les termes du contrat sont clairs : il ne doit poser aucune question sur le contenu des valises et ne jamais essayer de les ouvrir. Intrigué et persuadé que ce job le fera sortir de son impasse financière, Gabriel se lance dans l’aventure. D'Istanbul à Bruges en passant par la Chine, il saute d’avion privé en avion privé avec sa mystérieuse cargaison. L’argent ne tarde pas à affluer. Gabriel est un homme pressé certes, mais riche. Si sa fille se plaint de ce père désormais absent, il ne peut enrayer une machine qui l’étouffe de plus en plus.