T'as préféré éviter le piège les 30 ans du DNA pour diverses raisons, t'avais pas envie d'être une des centaines de pondeuses élevées en batterie, ni de devoir batailler pour espérer te désaltérer et, par dessus tout, tu craignais la présence de la babeltut la plus notoire de Bruxelles, maître RickyBilly, donc tu optes pour le Rock Classic qui, en plus de programmer Nehl Aëlin, a choisi Seesayle pour assurer le support.
Chouette, ça fait une paye que t'as plus croisé Michel et Cécile.
Fred Cerise aux manettes, Mad About Music au comptoir, t'avais rencontré Frédéric Cotton ( Fantastique Nights) rue du Marché au Charbon, il doit déclarer forfait, un important colloque l'obligeant à faire des heures supplémentaires.
Cécile ( pas la gamine de Nougaro): dis nous, il existe RickyBilly?
Elle n'aurait pas dû citer le nom maudit, pas deux minutes plus tard l'animal jaillit...rempli de joie, je suis!
Un planning insolite ce soir, l'affiche dit:
20.00 Doors
21.00 Nehl Aelin - Set n°1 (without drums!)
22.00 Seesayle
23.00 Nehl Aelin - Set n°2 (with drums!).
Une mousse en compagnie de Bernard, tapis au bar et à 21h15': Nehl Aëlin!
Un piano (Nehl Aëlin) , une acoustique/ une basse 5 cordes ( Stéphane Béguier) et...une batterie (Alban Aupert: Moonfingers, The Wop Show, Djene Doumbouya & The Sadio Orchestra, Tree). Les trois musiciens font partie de Akphaezya, rangé sur l'étagère gothic/prog metal!
La chanteuse/pianiste a sorti trois albums sous son nom, le dernier 'Le monde Saha' ( produit par Jean-Pierre 'Amélie Poulain' Jeunet).
Miss Aëlin lève un coin du voile: le premier set sera intimiste, le second plus mouvementé, nous commençons par 'Striking the strings' , titre que j'ai élucubré pour une amie qui ne pouvait concevoir au moment du jet sur la page blanche, depuis, après un pèlerinage à Lourdes, la cigogne est passée pour larguer un mioche dans la cheminée.
Non, ne pleure pas Jeannette!
Nehl l'a probablement entendu et lu des centaines de fois, mais c'est indéniable, Kate Bush, Tori Amos, Regina Spektor effleureront plusieurs esprits.
Onirisme, immatérialité, évanescence... en écoutant la mélodie t'as l'impression de flotter dans un éther floconneux.
La soudaine grossesse ne t'étonne plus, la pythonisse l'avait augurée.
Un duo vocal esthétique ( Nehl/Stéphane) pour une cover apaisée d' Anathema, 'Temporary Peace' puis un second groupe de métal progressif, les Suédois de Pain of Salvation et la plage mélancolique et aérienne ' Undertow'.
Le qualificatif est galvaudé mais il s'impose: beau!
Troisième reprise étonnante, 'Idioteque' de Radiohead.
Ton cerveau a envie de rapprocher le travail de Nehl Aëlin à celui de Jarboe, l'égérie de Michael Gira.
Euh, madame, pensez à relire le manuel des choses à éviter de débiter sur scène, point 6: ne pas poser la question 'comment ça va, X ( ville au choix) ' et surtout ne pas insister lourdement si l'auditoire ne réagit pas.
L'un d'entre vous connaît-il Noa est toléré!
Noa,'Uri', grâce et passion cohabitent avec bonheur.
'Mon petit bonheur' est prévu pour le prochain CD.
Une petite valse à la Thomas Fersen qui narre les confidences d'une fille de joie philosophe, lucide et passablement désabusée.
Bernard a aimé, nous aussi!
'Syren's gate' se trouve sur le premier album, on ne comparera pas avec Bat for Lashes car Natasha Khan jouait encore à la poupée Barbie, mais Kate Bush n'est pas loin.
Le set se termine avec 'Silence' une ritournelle médiévale.
Qui, tu dis?
Coup d'oeil au Facebook: Cécile "Seesayle" Gonay: compositions, chant, piano, violon, guitares, samples.
On ne va pas te retracer un historique fastidieux, mais sache que depuis une dernière rencontre qui date de la nuit des temps ( Barjotvel), Miss Gonay a , enfin, sorti un album ( Stowaway) et continue d'enchanter petits, grands, adolescents, quasi fossiles, philistins ou érudits, tous sexes confondus, avec ses compositions romantico-gothico tolkiennnes lumineuses.
Michel à la table de mix pour créer une alchimie parfaite.
'Intro', des samples, quelques lignes de guitare mises en boucle, un violon, re-loops, une voix mâle en off... le décor est planté, bienvenue, le premier qui dit chez les Ch'tis on lui envoie RickyBilly, dans l'univers de Seesayle.
L'intrigant ' White Lie' précède 'Red' l'histoire du petit chaperon rouge folâtrant dans une noire forêt et se gavant de baies couleur lie de vin.
L'insouciante enfant, Icare en jupon, imagine traverser l'arc-en-ciel et badiner avec de poupins putti.
Dans les grands yeux de Seesayle tu peux lire ce conte de fée faussement ingénu, le rouge discerné aux commissures des lèvres de la fillette pourrait être autre chose que du suc de canneberge.
Pour suivre, un titre sobre au chant en cascades , 'How Far'... le plus loin possible, RickyBilly is much too close, putain, il ne la ferme jamais!
Après ces deux plages au piano, Cécile reprend la guitare et les boucles pour amorcer ' The same' puis 'Butterfly', un élégant lépidoptère ayant un Edgar Allan Poe traînant sur sa table de chevet.
'Joker', tu prononces bouffon, le morceau est chanté dans le vocable de Lautréamont.
Dracula goes Chopin, 'The Vampire' démarre sur des tonalités grand piano virant harmonium désuet, tandis que la cantatrice soupire, expie et expire, t'as des visions de Sharon Tate, serveuse dans une taverne minable quelque part au fin fond de la Transylvanie.
' Child of a winter moon' , t'as cherché mais pas retrouvé dans les 'Kinder- und Hausmärchen' des frères Grimm.
Je termine par un morceau country, 'Sorry my dear'.
Si tu pensais à Dolly Parton, tu t'es fourvoyé, on est plus proche d'une murder ballad des Appalaches que du country twang à la Trisha Yearwood.
Un final au fiddle bien enlevé et rideau!
Yeehaa, on veut un bis!
' Five', les Carpates vous saluent!
Ovation et sourires de la fée!
Nehl Aëlin- Set 2
Un troupeau de boeufs rugissants et passablement imbibés a envahi le coin, Nehl, la maîtresse d'école, lève le doigt et demande aux indisciplinés de la mettre en sourdine.
On démarre par une nouveauté, 'La fée bleue'.
Effectivement, comme promis, la deuxième manche sera plus musclée, la cousine de Carabosse, une copine du grand Schtroumpf, se déhanche sur un fond sonore groove/world envoûtant.
Hier, nous étions aux Pays-Bas, un festival de prog metal, ils ont eu la primeur sur scène de ' A demi mot', pour vous, un second baptême.
Dites donc, les rugbymen, pourriez pas vous abstenir de hurler 'La P'tite Gayole ' pendant cinq minutes.. je disais donc ' A demi mot'.
De la nouvelle chanson française théâtrale, pas du Marie-Paule Belle ( c'est pas péjoratif), mais pas loin!
' So easy' et 'Overdrive', elle n'est pas rousse ardente ( merde, ils sont 5986 à utiliser flamboyant) mais elle est aussi expressive et troublante que Tori.
Quelle voix, quelle profondeur, quelle force de persuasion!
Puis, surprise, changement de registre, le jazzy 'Radio Shit' décoré d'acrobaties vocales dignes de Dee Dee Bridgewater.
Les camionneurs, estomaqués, la bouclent et applaudissent à la performance.
Encore un produit frais, 'Black Hole', et une nouvelle direction.
Du grunge?
Petit, elle a mentionné ' Black hole' pas 'Black hole sun' , en route pour le cabaret, époque l'Ange Bleu, 1930!
Un grand numéro burlesque.
L'iconoclaste ' Coldness', mixant Regina Spektor et Kurt Weill, termine le concert!
Le Rugby Ottignies Club, sous le charme, réclame un rappel à cor et à cri, Miss Aëlin leur propose un titre participatif et, après une fausse queue, leur balance le 'SM' de Rihanna, façon r'n'b purulent.
Très chouette soirée!