Magazine Journal intime

Où il est question de tartes et de lingettes!

Par Vivresansargent

16/10/13

 Deux tartes « Tatin » ! Aujourd’hui, chose peu probable pour un pèlerin, j’ai fais deux tartes « Tatin » ! Merveilleuse journée pleine de surprises. Ça faisait quelques jours que rien ne m’était arrivé. Évidemment, c’est parce qu’au sortir des vendanges, je me suis un peu replié sur moi même et que ce matin, j’ai repris mes bonnes habitudes de pèlerin. Dès que je j’embrasse le monde, il me rends mon baiser, sur les deux joues.

A six heures environ, en forme comme jamais, je suis sur la route. Je marche de nuit sur la D6 en direction de Briènne le Château. Comme à mon habitude, j’ai dormi au pied d’une église, sous le porche de l’entrée principale. Cette fois, les cloches étaient juste au dessus de moi. Dans ce village, Chavranges, les cloches sonnent toutes les heures et les toutes les demies heures ! Il n’y a que les cloches de trois heures du matin que je n’ai pas entendu. J’ai vu passer la nuit, comme ça, tranquille, relax, faisant son boulot, dans le noir, sans gène aucune, en me regardant droit dans les yeux à chaque tour du cadran, comme pour vérifier si son petit numéro me faisait bien marrer aussi. Et bien oui ! J’ai pas moufté. Sans la moindre trace d’énervement, j’ouvrais les yeux, écoutais les cloches, changeais de position puis refermais les yeux pour me blottir dans les bras de la douce Morphée, tel l’enfant qui, confiant, se blottit dans les bras fluets mais chaleureux de sa mère. C’est pour ça que ce matin, malgré un sommeil sur un fil, je suis plein d’énergie. Quand le sommeil est perturbé, j’ai découvert que ce qui nous fatigue, c’est l’agacement et l’énervement de voir sa nuit perturbée et pas le fait de dormir moins profondément. Si je reste calme, mon corps et mon esprit se reposent tout de même. Un corps en bonne santé n’est pas mis sans dessus dessous à cause d’une nuit perturbée.

Le ciel est menaçant quand j’arrive à Briènne le château, après quinze kilomètres de marche. Je cherche un bar avec un accès à internet et on m’indique le bar « Sacré Pierre ». Une seule table est occupée à l’intérieur. Le patron, Pierre, est très sympathique et très vite, on discute de la taille de mon sac à dos et du pourquoi du comment je suis là. La conversation devient rapidement générale. Les questions fusent. On échange ainsi quelques mots, simplement. Plus tard, le patron, aux fourneaux, s’active et prépare son service du midi. Je lui dis que je suis cuisinier et à ce moment là, une voix derrière moi tonne : « T’es cuisinier ! Je t’invite à manger ce midi et c’est toi qui cuisine ! ». Je me retourne et accepte spontanément la proposition d’Élisabeth. Merveilleux. Une heure plus tard, Élodie, une amie d’Élisabeth et moi même, allons rejoindre Arnaud, le mari d’Élisabeth, dans leur ferme.

Une bière et des pommes sont posées sur la table. Un économe à la main, on se lance dans l’épluchage des pommes pour confectionner ce qui sera ma première tarte « Tatin » de la journée. Le moment est simple et chaleureux. Quelle joie de voir que tant de gens sont prêt à ouvrir leur porte à des inconnus, spontanément. Nous avons mangé un bon steak frite et la moitié de la tarte. Un festin pour un pèlerin qui ne mange que des casses-croûtes.

Après le repas, une blague devient réalité. Les filles lancent l’idée de m’accompagner jusqu’au prochain village, Dienville, à cinq kilomètres. Je leur dis que l’idée est super bonne et que ça me ferait vraiment plaisir de partager un bout de mon chemin avec elles. Avant de quitter la ferme, Élisabeth me dit qu’elle connaît bien le prêtre de Dienville et qu’il accueille parfois des pèlerins. Merveilleux ! Elle lui téléphone et deux minutes plus tard, le rendez vous est fixé, Xavier nous attends.

Monsieur le curé est estomaqué de nous voir arriver tous les trois à pied ! Dans un grand sourire il nous dit que c’est bien la première fois qu’il voit un pèlerin ainsi  accompagné! Notre marche est passée à la vitesse de la lumière. C’est vrai, je reconnais que j’ai beaucoup parlé ! Avec toutes ces journées de silence, ça fait une moyenne.

Au milieu d’une phrase, mon regard est attiré par quelque chose sur le bas côté. Un paquet de lingettes tout neuf ! Ravi de ma découverte, je fanfaronne. Quand je me retourne, je vois qu’Élisabeth à aussi a fait une découverte. Et quelle découverte ! Croyez moi ou pas, juste à côté des lingettes, le carnet de santé de son neveu, le tout, perdu par sa sœur il y a deux mois !  Incroyable ! C’est du délire dans l’assemblée ! C’est vraiment étourdissant tous ces micro-événements qui font que la vie devient un collier en fil d’argent, sur lequel s’enfile, une à une, de belles perles de miracle nacrées !

Autour d’une boisson chaude, la conversation file bon train autour de la table de bois de Xavier. Il nous raconte ses aventures passées de pèlerin et me donne une information en or massif. Il me dit que sur le chemin, il a beaucoup dormi chez l’habitant et qu’a chaque fois qu’il a demandé au maire du village, une pièce lui était ouverte pour dormir à l’abri ! Merveilleux. Avec la découverte, pendant les vendanges, que des douches sont accessibles et pas chères, dans les restaurants pour routiers et cette nouvelle information, je me dis que je vais bientôt me délester d’un autre poids, ma tente !

L’eau qui coule sur mes épaules est merveilleusement chaude, à quelques degrés d’être bouillante. Je laisse le robinet ouvert longtemps. Le jet de bonheur réchauffe mes chairs et mes os, depuis deux jours molestés par le froid et l’humidité. Le bonheur, c’est pas grand chose. Une douche après deux jours de marche.

Bien reposé, je vais jouir de la chambre que Xavier a mis à ma disposition. On partagera un petit moment demain, à l’heure du premier café de la journée car ce soir, je suis seul chez lui. Son devoir l’a appelé. Il doit se rendre à une veillée funèbre.

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