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Comptines assassines

Publié le 05 mai 2008 par Lorraine De Chezlo
COMPTINES ASSASSINES de Pierre Dubois
Contes - Nouvelles - 305 pages
Editions Hoëbeke - Avril 2008
Ou comment les histoires de nos veillées d'enfance sont revisitées en contes élégants de cynisme.

Dans une langue très travaillée , avec des phrases ciselées, Dubois nous donne à lire des histoires grinçantes à souhait, qui ne laissent aucun doute sur le plaisir malicieux qu'a eu l'écrivain érudit en matière de légendes et de contes classiques. Avec un talent fou, il crée des ambiances tantôt fantastiques tantôt réalistes, très britanniques ou assez provinciales.

Si je n'ai pas apprécié les huit contes de la même manière - Croquemitaine ou La vieille femme qui habitait dans un soulier m'ont laissée de marbre, sans doute par des références qui m'échappent - je reconnais sans difficulté que je me suis régalée à la lecture de la plupart de ces histoires cruelles et pleines d'humour. ne nous ménage pas la tâche : non seulement on doit se remémorer des souvenirs de lecture (ou d'écoute) mais le tout nous est servi accompagné d'un vocabulaire vraiment riche : dans , vous croiserez des macfarlanes à mantelet, des lycanthropes, une flore rudérale, des hétaïres et autres goulves....

"Il était une fois, il n'y a pas si longtemps, en ces temps incertains quand les horreurs de la Grande Guerre avait réduit celles du Grand-Guignol à d'innocentes pitreries de patronage, un tueur d'infirmes. [...]

Au crépuscule, lorsqu'une indéfinissable impression de petite mort venait embuer les vitres, que la voix cinglante d'un précepteur sadique et claudiquant remontant d'une enfance esseulée scandait en frappant " Ne remets pas au lendemain ce que tu dois faire le jour même", que ses propres ronrons l'étouffaient au fond de ses coussins, Chat sentait l'appel impératif du dehors l'envahir. [...]

Chat chassait. Par les ruelles chaotiques des banlieues populaires, les corons pouilleux, par les rues tranquilles des quartiers modestes, les avenues bourgeoises, les havres cossus des allées residentielles où les familles privilégiées ne laissaient sortir leurs "ratés" qu'une fois l'obscurité tombée, et par la porte de service. "

On retrouve ainsi le chat botté, on se souvient de gravures de cet animal malicieux, et voilà que l'auteur nous le métamorphose sous nos yeux en serial killer des villes et on en tremble ( Le Chat Botté ).
Et puis, ce pauvre Georges Boutonnet qui s'en va chez sa mère pour le repas dominical et qui tombe sur son chemin dans le piège tendu par Blanche Neige, ça ne peut pas se refuser ( Les musiciens de la ville de Brême ). y mélange l'histoire du chaperon rouge à celle d'autres contes, et c'est délicieux, jusqu'au dénouement plus que surprenant !


C'est le cas aussi pour Barbe Bleue ou qui sont là ressuscités dans les comptines à la fois modernes et empreintes de cette forme classique du traditionnel conte pour enfant.

La couverture n'a peut-être rien d'engageant (et pour cause) mais vous auriez tort de ne pas vous laisser tenter par ce petit plaisir démoniaque et remarquablement bien écrit .
[merci Cécile !]

Libellés : Littérature francophone, Livres, Nouvelles


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