Magazine Journal intime

Où il est question d’alerte rouge!

Par Vivresansargent

20/10/13

Je quitte Joux la ville et le charmant studio tout confort que les sœurs mettent à la disposition des familles de détenus, venues visiter leurs proches enfermés dans la prison du village et des quelques pèlerins de passage.

La nuit a été reposante et animée, en son cœur, d’un magnifique orage. Les éclairs, le bruit, le vent, les trombes d’eau, tout y était. Séance de cinéma offerte par la maison. Le nez collé à la fenêtre, les genoux collés au radiateur et l’émerveillement collé aux yeux, je reste de longues minutes à contempler le spectacle de ces milliers de feuilles qui volent, arrachées aux branches et balayées de la cour.

C’est décidé, je me sépare de ma tente dès demain. La prochaine étape est Vezelay, village mondialement connu comme étant la première étape du chemin de Compostelle nommé justement, chemin de Vezelay. Ma tente montre des signes de fatigue. Un des arceaux composant sa structure ronde a cassé, il y a quelques jours, m’obligeant ainsi à du bricolage quotidien. Je suis confiant car je pense qu’en étant sur un chemin officiel et connu, je devrais trouver de nombreuses auberges pour pèlerins, des mairies, des presbytères ou même des particuliers, disposés à m’accueillir. Ma secrète démarche, qui ne le sera plus dès que cette phrase aura atteint son point final, est de m’obliger à frapper chez les gens quand je ne trouverais aucune autre possibilité de me mettre à l’abri. Ainsi, je m’offre des chances de rencontrer mon prochain et de lui offrir une opportunité d’ouvrir son cœur et son esprit, en accueillant un pèlerin de passage. Je résonne comme certains moines Bouddhistes qui mendient leur alimentation en frappant aux portes pour donner une chance, une occasion à la personne de l’autre côté de la porte, de donner et d’être généreux. Dans ce pays, le Tibet, ceux qui disent merci, sont ceux qui donnent la nourriture.

Alerte rouge ! Une douleur derrière le genoux gauche me signale l’inflammation d’un tendon. La bouteille d’huile essentielle de lavande que j’ai dans la poche, la joie que j’ai dans le cœur et le repos que je vais prendre, me dis-je, viendront vite à bout de ce problème. Je ne pensais pas que le repos souhaité viendrait dès aujourd’hui. Assis depuis une heure dans le canapé du studio, fenêtre grande ouverte pour guetter la fin de la pluie qui ne cesse de tomber depuis mon réveil, je me dis que si aujourd’hui une voiture s’arrête pour me proposer de n’emmener à Vezelay, j’accepterais. Quelques minutes plus tard, la pluie semble baisser d’intensité. Je vais à la fenêtre et, inquisiteur, je sors la tête. Une sœur approche. On se salue. « Nous allons à Vezealy, me dit-elle. On vous emmène ? » Merveilleux.

Je reste à l’écoute de mon corps. Comme le disait sans cesse mon frère lors de notre périple commun en Espagne : « qui va mollo va sano ! » Il n’est pas question de rester figé par un idéal. Enfant, on m’a appris qu’il est important de faire ce que l’on dit. Dans une certaine mesure, c’est vrai. Plus tard, l’expérience et l’observation ont affiné cet apprentissage. J’ai appris qu’il est encore plus important de ne jamais se laisser emprisonner par ses propres mots ou objectifs. J’en ai vu perdre beaucoup en se bornant à faire ce qu’ils avaient dis qu’ils feraient, ne voulant pas admettre qu’ils marchaient sur un chemin qui n’était pas le bon pour eux. Repos donc.

 


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