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Lettre à Léa : Mary versus Leonarda - 1

Par Plumesolidaire

 201304 expulsions etrangers

J'ai reçu ce courriel émanant du site generation.org, animé sans doute des meilleures intentions mais dont je ne parviens pas à identifier clairement le projet :

Bonjour,    Nous vous faisons parvenir cette lettre  magnifique de Léa, jeune lycéenne militante à Leonarda, collegienne d'origine albanaise, expulsée il y a quelques jours. Merci de lire ce cri du coeur attentivement de l'appuyer en le signant à votre tour et de le diffuser autour de vous. Benjamin pour Active Generation et la comunauté des utilisateurs de http://www.wesign.it/    Je m'appelle Léa, mon nom est un peu comme le tien Leonarda. Comme toi j'ai 15 ans Comme toi je vais à l'école, Comme toi j'habite en France Comme toi j'ai des bras des jambes, un coeur Comme toi j'ai des amis, Comme toi j'aime, Comme toi j'ai des rêves, des espoirs, Comme toi je ris et je pleure, Je pleure aujourd'hui car j'ai honte, J'ai honte d'avoir fêté le changement, J'ai honte de rester quand toi tu pars J'ai honte de mon gouvernement J'ai honte d'être Léa et pas Leonarda

      

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Chère Léa, 

Ton poème m’a ému et je voudrais à mon tour t’exprimer ce que je comprends, plus que ce que je ressens.

L'expulsion de la famille  Dibrani, l'arrestation et le rôle de Leonarda, jeune fille âgée de quinze ans, m'a fait beaucoup réfléchir.

Je voudrais répondre à ton poème jailli tout droit d'un coeur tendre, de manière circonstanciée.

Si tu le permets, je commencerai par la présentation de la lettre que Mary m'a demandé de rédiger à la Préfecture de Police de Paris.

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36 822 personnes en situation irrégulière ont été reconduites à la frontière l'an dernier, contre 32 921 en 2011 (source : France Info – 22 janvier 2013).

Dans le silence des médias, et des militants solidaires des sans-papiers, Mary fait l’objet d’une mesure d’éloignement du territoire.

Cela ne gène personne, et le Président de la République ne sera pas contraint de prendre la parole en dernier recours pour décider de son avenir.

Je n'ai jamais écrit à Mediapart, au Canard Enchaîné, à Rue 89, à Libération ou au Nouvel Obs, et à beaucoup d'autres journaux de la presse sensible à cette question, pour les alerter sur la situation des personnes en grande difficulté existentielle qui sollicitent mon aide et celles de mes amis.

Il aurait fallu que je lance des alertes chaque semaine, et j'ai toujours trouvé plus de bonheur et d'efficience dans le silence de l'intimité, que dans le vacarme communicationnel et marchand.

J'en viens à ma lettre Léa. 

Mary est de nationalité ghanéenne, pays anglophone.

Elle est arrivée seule sans titre de séjour en France en 2002 pour travailler.

Atteinte d'un diabète, elle avait beaucoup maigri et sa santé a été réellement mise en danger.

Soignée dans le cadre de l'Aide Médicale de l'Etat (AME), sa santé s'est améliorée mais elle n'a pas pu s'insérer sur le marché du travail.

Malgré son français peu compréhensible, elle a tenu à me montrer les traces sur sa peau, de ce que je crois avoir compris être une intoxication alimentaire. Elle élude mes questions concernant ses conditions d'hébergement actuel, mais je crois comprendre qu'elle subit des violences. Elle est manifestement en grande souffrance psychique et je voudrais vraiment pouvoir l'aider.

Quelques jours plus tard, Mary revient à notre permanence d'écrivains publics. Prostrée, elle tient un courrier entre les mains qu'elle n'a pas ouvert et qu'elle me demande de lui lire et de lui expliquer.

Par retour du courrier la Préfecture de Police lui a confirmé sa décision d'Ordre de Quitter le Territoire Français (OQTF) aux motifs que ses attaches familiales (enfants) se situent au Ghana, et que son pays dispose des infrastructures sanitaires qui lui permettent d'assurer le suivi de sa maladie.

La lettre est accompagnée d'une photocopie recto verso des modalités pratiques pour quitter la France.

Mary est effondrée et pleure. Elle n'en peut plus de vivre en France; je lui donne les contacts de la CIMADE et de Ligue des Droits de l'Homme.

Elle me quitte en affirmant son intention de rentrer au pays.

Cette triste histoire que nous connaissons fréquemment doit nous inciter à réfléchir au-delà de la profonde tristesse qu'elle inspire.

Mon observation conduira à l’inverse de ce que les bonnes consciences voudraient toujours affirmer : pour l’étranger sans-papier,  il n’est pas sûr que survivre en France soit mieux que d’être resté(e) au pays.

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Madame ............ Mary

Inser Asaf .......

.....................

750.. PARIS

Monsieur le Médecin Chef

Service médical

Préfecture de Police

7 boulevard du Palais

75195 PARIS cedex 04

Paris le 12 septembre 2013

OBJET : dépôt de rapport médical

Réf :

N° national : ...............

N Dossier : .................

Monsieur le médecin Chef,

Je vous ai adressé par lettre recommandée en date du 26 mars 2013, en réponse à la Notice d’information du 21 mars qui m’a été remise en mains propres, un rapport médical établi par un médecin agréé.

Dans l’attente d’une décision concernant ma demande de titre de séjour, je me permets d’attirer votre attention sur ma situation, et vous transmets ci-joint copie du rapport médical adressé le 26 mars.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le médecin de chef, l’assurance de mes salutations distinguées.

Pièce jointe : copie rapport médical


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