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Hiroshima avant la bombe

Par Aude Mathey @Culturecomblog

Nous ne saurions parler convenablement du Japon sans nous intéresser un tant soit peu à son histoire, par le biais de voyages touristiques. Cette visite de déroulera en plusieurs temps.

Hiroshima, écrite 広島市 – Hiroshima-shi, les kanjis signifiant littéralement grande, large (広) île(島) (le dernier, « shi » signifie ville), fut fondée en 1589 par Môri Terumoto, qui fut un de ceux qui s’opposèrent à Tokugawa Ieyasu aux XVIe et XVIIe siècles, après avoir combattu Toyotomi Hideyoshi et s’être rallié à lui. Homme puissant, il avait, au plus haut de sa puissance, environ 120 000 hommes mobilisables sous ses ordres, ce qui, soyons honnêtes, n’est pas peu dire.
Mais trêve de bavardages, je vous renvoie à vos encyclopédies pour plus d’informations sur le sujet, je préfère en effet limiter les sottises imprimées.

Vue de la ville d'Hiroshima © Laurent Mathey

Vue de la ville d'Hiroshima © Laurent Mathey

Le nom de la ville vient du fait que ledit Môri Terumoto susnommé fit bâtir le château sur la plus grande des îles formées par le fleuve. Peut-être en raison de l’influence de Môri Terumoto, Hiroshima fut considérée comme une ville militaire, devenant une des plus importantes bases logistiques du Japon durant la guerre sino-japonaise de 1894-1895. Cette fonction lui est par la suite restée durant l’ère Showa, de 1926 à 1989. Durant la Seconde Guerre Mondiale, c’est Hiroshima qui servit de plateforme pour assurer la défense du sud du Japon. Notons, pour l’anecdote macabre, qu’une usine de gaz toxiques, prévus comme armes chimiques (et non pour alimenter les chercheurs universitaires dans leurs études), était installée face au port de la ville. Ce caractère martial fortement imprimé dans l’esprit de la ville est une des explications du choix pour le largage de la bombe le 6 août 1945. Mais pas uniquement. Nous y reviendrons.

Balayée par la bombe, Hiroshima fut reconstruite, devenant une ville neuve pourtant assez intéressante.

Premièrement, le château.

Vue du château Hiroshima © Laurent Mathey

Vue du château Hiroshima © Laurent Mathey

Construit, comme il a été dit, en 1589, il fut fini entre 1592 et 1599, la date exacte étant inconnue. Comme nombre d’autres château japonais, il fut construit en bois, en pin, et s’élève jusqu’à près de 27 mètres, sur quelques 5 étages. Il existe encore un fossé rempli d’eau, sorte de douve, autour de cette bâtisse qui en comptait trois à l’origine. Rasé par la bombe en 1945, le Honmaru (本丸) – la tour principale, le donjon – fut reconstruit en 1958 en béton.

Vue d'Honmaru © Laurent Mathey

Vue d'Honmaru © Laurent Mathey

Il est intéressant de savoir que ce château est aussi appelé Château de la carpe. De même, trois arbres seulement ont survécu à la bombe : un eucalyptus et un saule, à 740 m de l’hypocentre, ainsi qu’un ilex, situé à 910 m, tous présents à l’intérieur des murs du château.

Le château est splendide, et la présence d’un sanctuaire Shinto, le Gokoku-jinja, apporte une touche spirituelle peu habituelle sous nos horizons, mais Ô combien fréquente au Japon. Ce sanctuaire fut déplacé en ce lieu après le bombardement de 1945, en 1965 pour être précis. Originellement construit en 1868, il avait été élevé pour honorer les victimes d’Hiroshima lors de la guerre du Boshin, guerre civile durant de 1868 à 1869.

Gokoki Jinja © Laurent Mathey

Gokoku Jinja © Laurent Mathey

Le Honmaru en lui-même est devenu un musée, et contient toujours le bunker à partir duquel la première transmission radiophonique d’Hiroshima fut faite après le bombardement.

Sur une note toujours aussi culturellement riche, et esthétiquement intéressante, le Shukkei-en (縮景園, traduisible par « jardin du petit paysage » qui est la meilleure traduction que je puisse vous offrir) porte bien son nom, tant ce dernier représente vallées, montagnes et arbres de manière, vous l’aurez compris, miniaturisée. Shukkeien fut construit en 1620, après, donc, bien évidemment, l’accomplissement du château. Quelques maisons de thé permettaient aux visiteurs de profiter de la vue qu’offrait ce magnifique espace.

Sukkeien © Laurent Mathey

Sukkeien © Laurent Mathey

Sukkeien © Laurent Mathey

Sukkeien © Laurent Mathey

Le jardin fut évidemment soufflé par la bombe et servit de refuge aux victimes de la guerre. Il réouvrit ses portes en 1951, la ville considérant qu’il était de son devoir de le réaménager.

Un chemin fait le tour de l’étang et permet de voir le jardin sous différents angles et d’en apprécier la beauté, havre de paix au cœur d’une ville tourmentée. Pour peu que l’on soit sensible aux promenades solitaires et que l’on se laisse facilement aller à la méditation, l’endroit est tout indiqué, semblant être comme coupé du monde, les bruits alentours laissant place aux bruissements des arbres et gazouillis des oiseaux, sons uniquement interrompus par le clapotis créé par les voraces poissons qui remontent à la surface ouvrir leur gueule affamée en quête de quelque pitance. Ne vous inquiétez pas, ces animaux aquatiques sont bien replets.

Après avoir vu ces fantastiques vestiges réhabilités – voire reconstruits – témoins de l’histoire ancienne de la ville d’Hiroshima, une pause peut être nécessaire.

Je ne pourrais parler du Japon sans parler un tant soit peu de la nourriture, étant moi-même ce que l’on qualifierait de petit glouton, et la nourriture japonaise étant aussi délicieuse que variée. Un bon point pour goûter la spécialité locale, l’okonomiyaki (お好み焼き, littéralement « crêpe » avec ceci d’amusant que les kanjis intercalés dans les hiraganas signifient « bien » et « grillé »). A la différence d’Osaka, qui compte aussi bien l’okonomiyaki comme spécialité locale, ceux d’Hiroshima diffèrent légèrement, en ceci que, habituellement, l’Hiroshimayaki (ainsi nommé) contient, en plus du soja, crevettes, chou, œufs, et autres ingrédients habituels des nouilles. Le tout est roboratif et est évidemment le bienvenu. Le lieu de prédilection pour toute personne intéressée serait évidemment Okonomimura, qui, sur 3 étages, propose 28 restaurants-échoppes différentes, chacune avec sa spécialité d’Hiroshimayaki.

Okonomimura © Laurent Mathey

Okonomimura © Laurent Mathey

Ce sera tout pour cette fois. Le prochain article sera évidemment consacré à la deuxième partie de la visite de cette ville, centrée autour de la bombe.


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