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Ironside (2013): un policier… assis

Publié le 29 octobre 2013 par Jfcd @enseriestv

Ironside est une nouvelle série diffusée depuis octobre sur les ondes de NBC aux États-Unis et Global au Canada. Série policière typique, chaque semaine on suit les enquêtes d’une brigade de New York avec à sa tête, Robert Ironside (Blair Underwood), un homme qui n’a pas froid aux yeux, mais qui est devenu paraplégique à la suite d’une intervention avec un collègue. Après 4 semaines de diffusion, NBC a annoncé qu’elle annulait la série; les cotes d’écoute périclitant dangereusement. Dans ce cas-ci, c’est la lourdeur du scénario, des mises en situation peu crédibles et des personnages fades qui expliquent un (autre) échec de la chaîne. Comme si ce n’était pas assez, la controverse s’est emparée de la série au printemps dernier lorsqu’on a annoncé que l’acteur Blair Underwood avait été sélectionné pour le rôle principal. C’est que plusieurs paraplégiques se sont offusqués qu’encore une fois, ce soit un acteur avec toute sa motricité qui ait été choisi.

Ironside (2013): un policier… assis

Enquêter en fauteuil roulant

En 1967, NBC a commencé à diffuser au petit écran Ironside, mettant en vedette le très célèbre Raymond Burr dans le rôle d’un détective handicapé travaillant à San Francisco. La série a connu un succès considérable et a duré jusqu’en 1975. Pourquoi en faire un remake en 2013? Plus particulièrement, en est-ce un? Outre le titre et que le personnage principal soit en chaise roulante, les crimes à résoudre n’ont rien à voir avec ceux des années 60-70 et il n’y a aucune ressemblance entre la personnalité des deux Robert, ce qui est loin d’avantager la version de 2013. Comme l’écrit Neil Genzlinger dans le New York Times : « (…) Burr played the main character, Robert Ironside, with sternness but heart. That’s how you get eight seasons out of a concept. In the new “Ironside,” Blair Underwood makes the title character an unpleasant combination of macho and brusque. That’s how you get people to go looking for something else to watch. » Ce coup de publicité est peut-être à l’origine de bons résultats en termes de cotes d’écoute pour le pilote (presque 7 millions de téléspectateurs), mais passé cette éphémère euphorie, il aurait fallu un scénario et des personnages accrocheurs, ce qui n’a pas été le cas; reflétant le désintérêt progressif de l’audience.

Comme tout policier qui se respecte, tous les épisodes commencent par un crime que les enquêteurs auront à élucider. Dans le premier, il s’agit d’une femme retrouvée ensanglantée sur le trottoir, mais qui aura commis un suicide. Dans le deuxième, l’enquête sur le meurtre d’un jeune étudiant amène la police sur une autre piste; celle d’une jeune fille portée disparue depuis plus de dix ans. Dans le troisième, le vol d’un montant considérable lors d’une partie de poker incite la brigade à s’infiltrer dans le monde du jeu clandestin. L’intérêt premier en commençant à suivre la série n’est pas de les voir pincer le criminel, mais bien de savoir comment Robert s’est retrouvé en chaise roulante. C’est que tous les épisodes sont ponctués de flashbacks, où on voit le protagoniste travailler debout. À la fin du premier épisode, Robert est à la poursuite d’un dangereux criminel et son collègue (Brent Sexton) qui peine à voir à cause de la noirceur des lieux, tire accidentellement sur lui. Une fois cette partie du scénario expliquée, la série perd de beaucoup son intérêt. Au cours des épisodes suivants, on en vient à oublier que Robert est en chaise roulante : c’est que sa condition n’entrave en rien ses enquêtes. Si la série veut nous montrer que les paraplégiques, même appartenant au corps de police, peuvent travailler et vivre comme tout le monde, au point de vue scénaristique, Ironside se départi du seul élément diégétique qui le différenciait des autres policiers médiocres qui peuplent en trop grand nombre le petit écran.

Ironside (2013): un policier… assis

Où diable les policiers de New York sont-ils formés?

Une des faiblesses d’Ironside, c’est que le groupuscule de policiers sous la gouverne de Robert nous laisse de marbre. Question de donner un peu de piquant à la série, on incorpore dans le scénario plusieurs éléments de violence aussi injustifiés que barbares. Dès les premières minutes de la série, Robert arrête un suspect (je répète : un suspect). Convaincu de sa culpabilité, notre policier n’hésite pas à lui donner un coup de poignard pour le faire avouer. Ses deux assistants, Virgil (Pablo Schreiber) et Teddy (Neal Bledscoe), n’ont pas plus d’éthique. Ils prennent plaisir lors des perquisitions à causer le plus grand désordre possible et à ruer de coups ceux qu’ils arrêtent. L’ancien collègue de Robert procède de la même façon à l’égard d’un père qui battait son fils. Enfin, lors d’une prise d’otage, Robert tire sur ce dernier afin de le blesser et ainsi déstabiliser le ravisseur. Depuis quand les policiers américains sont-ils autorisés à exercer leur propre justice? Toutes ces mises en situation sont amenées afin de donner un peu de « punch » à la série, mais contribuent plutôt à la discréditer.

Controverse

Ironside (2013): un policier… assis

Auti Angel

En mai dernier, des aspirants acteurs souffrant d’un handicap tels Kurt Yaeger,  Auti Angel et Tobias Forrest se sont offusquées du fait qu’encore une fois, ce soit un acteur non handicapé qui ait obtenu le rôle principal dans Ironside. Les agents de communication de NBC ont alors rétorqué que d’une part, ils avaient besoin d’un acteur qui puisse marcher pour les scènes de flashback, et que d’autre part,  ils avaient besoin d’une tête d’affiche assez connue pour susciter l’intérêt des téléspectateurs. Ces deux points sont tout simplement absurdes. Les effets spéciaux n’ont plus de limites à Hollywood et grâce au montage, on aurait pu surmonter cet obstacle. De plus, si on ne donne pas la chance à un acteur de se faire connaître, comment peut-il aspirer à la notoriété? Comme l’exception confirme la règle, pensons à Sue Thomas F.B.Eye (2002-2005) de Pax Network et diffusée sur CTV et Séries+ au Canada. La série mettait en scène une agente du FBI sourde, mais qui pouvait se débrouiller puisqu’elle lisait sur les lèvres. L’actrice, Deanne Bray, souffrait elle-même de ce handicap, ce qui donnait plus de crédibilité au concept : la réalité rencontrant la fiction. Les émissions l’ont fait connaître du public et elle a depuis enchaîné plusieurs autres rôles au cinéma et à la télévision.

Ironside est l’exemple probant d’un policier qui vient encombrer la grille horaire, démontrant ainsi le manque d’imagination de ses créateurs. Le genre a été exploité à un point tel que de voir un agent enquêter en chaise roulante ne parvient pas à régénérer le concept.  Preuve que NBC n’a rien compris, elle comblera la case désormais vacante  par Dateline, un magazine d’information se concentrant majoritairement sur des histoires de crimes bien réels. Comme si ce n’était pas assez, c’est Chicago P.D. qui prendra la relève en janvier; une série qui mettra en scène plusieurs corps policiers chargés d’enquêter sur des homicides perpétrés dans la ville. On n’est pas sorti du bois…




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