"Si seulement elle pouvait abandonner son fichu cerveau, laisser son coeur gonfler, s'enflammer, son cerveau prendre l'air des journées et des saisons entières, et écrire des contes pour enfants. Elle ouvrirait la bouche devant les gens réunis à la bibliothèque, et voilà ce qu'il en sortirait : Il était une fois... [...]
Mais peut-être que l'on pouvait vivre en dessous du cou. Peut-être que l'on pouvait vivre avec les vêtements que l'on souhaitait enlever, tous empilés par-dessus la tête, devant la figure ; pas seulement un pull avec le col étroit, mais tout ce qui se coincerait là - pantalons, chaussures et chaussettes -, un désordre farfelu sur les épaules, à la place de la tête, tandis que le corps, nu comme un ver, se préparerait à vivre le reste de sa vie dans la campagne profonde, la cambrousse, sur une bretelle d'autoroute, sous la pluie. Peut-être était-ce possible. Parce que quand elle dormait contre lui comme ça, le reste du monde se précipitait dans une valise sous le lit. C'était la fin du désir que d'avoir ça. La voilà, la voilà. Il s'enroulait autour d'elle, prenait sa tête comme celle d'un enfant dans sa main et lui soufflait des mots, dans la gorge, dans la poitrine, alors qu'il s'endormait. Endors toi, endors-toi avec moi."
Extrait de Vies cruelles de Lorrie Moore
Pour l'instant, je ne sais que penser de ce titre entre admiration et interrogation. Je crois que je n'avais encore jamais rien lu de pareil. J'avais beaucoup aimé La passerelle du même auteur [clic ici]. Mon billet bientôt.