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La lettre à Helga de Bergsveinn BIRGISSON

Par Lecturissime

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♥ ♥ ♥ ♥

"La vie n'est que trame et rêve,

calme plat et dur ressac,

écueil et courant rapide,

tempête, neige et brouillard.

Avec fleurs et soleil aussi.

Mais derrière les hautes montagnes -

personne n'est encore allé voir." (p. 102)

L'auteur :

Bergsveinn Birgisson est né en 1971. Titulaire d’un doctorat en littérature médiévale scandinave, il porte la mémoire des histoires que lui racontait son grand-père, lui-même fermier et pêcheur dans le nord-ouest de l’Islande.

Immense succès dans les pays scandinaves ainsi qu’en Allemagne, la Lettre à Helga est enfin traduit en français.

L'histoire :

« Mon neveu Marteinn est venu me chercher à la maison de retraite. Je vais passer le plus clair de l’été dans une chambre avec vue plongeante sur la ferme que vous habitiez jadis, Hallgrímur et toi. » Ainsi commence la réponse – combien tardive – de Bjarni Gíslason de Kolkustadir à sa chère Helga, la seule femme qu’il aima, aussi brièvement qu’ardemment, d’un amour impossible.

Et c’est tout un monde qui se ravive : entre son élevage de moutons, les pêches solitaires, et sa charge de contrôleur du fourrage, on découvre l’âpre existence qui fut la sienne tout au long d’un monologue saisissant de vigueur. Car Bjarni Gíslason de Kolkustadir est un homme simple, taillé dans la lave, pétri de poésie et d'attention émerveillée à la nature sauvage.

Ce beau et puissant roman se lit d’une traite, tant on est troublé par l’étrange confession amoureuse d’un éleveur de brebis islandais, d’un homme qui s’est lui-même spolié de l’amour de sa vie.

Ce que j'ai aimé :

Bjarni Gislason est un vieil homme qui, à l'orée de sa mort, souhaite alléger le fardeau avec lequel il affrontera l'au-delà. Il se confie à Helga, son grand amour inassouvi, celle sui aurait pu être la seule et l'unique, celle qu'il n'a jamais cessé d'aimer, même si leur amour était impossible. Il lui écrit une longue lettre, une déclaration enflammée dans lequel il se souvient avec délices et intensité des premiers émois, des premiers regards, des premiers gestes... Mais il livre aussi sa vie, nue, l'élevage des moutons, son travail de contrôleur de fourrage, et surtout, surtout, son amour inconditionnel pour la nature sauvage si différente des villes telles que Reykjavik.

"Je ne veux pas dire que tout est tellement merveilleux par ici, ni que les gens sont des anges. Bien sûr, ici il y a les ragots, la jalousie, et toutes sortes de conneries qui vont avec l'espèce. Mais ces gens-là vous dépanneront d'un pneu de tracteur en cas de besoin. " (p. 103)

Avec une poésie sans pareille il chante son monde, comme pour enchanter ses choix et abnégations. Parce qu'il ne peut pas partir sans expliquer, sans expier, sans aimer, une dernière fois...

"J'ai appris à déchiffrer les nuages, le vol des oiseaux et le comportement du chien. J'ai éprouve l'étonnement du premier colon et mesuré l'envergure des premiers habitants de ce pays. J'ai perçu l'angoisse du feuillage aux éclipses de lune, j'ai levé les yeux dans les côtes et senti mon âme s'élever hors de moi tandis que je conduisais mon tracteur. (...) Je me suis baigné dans une eau pleine de l'écalt du soleil, et no celle qui sont noires des  tuyaux de lieux civilisés et j'ai perçu la différence. (...) L'amour ne se réduit pas au romantisme citadin où il s'agit de trouver la seule, la vraie qui comblera votre âme jusqu'à la faire déborder et dégouliner telle une pompe intarrissable. L'amour est présent aussi dans cette vie que j'ai menée ici, à la campagne." (p. 105)


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Un magnifique chant d'amour poétique, beau comme un coucher de soleil sur une vallée islandaise. Bjarni s'éteindra peut-être doucement bercé par le bêlement de ses moutons, mais son chant restera longtemps lové dans l'âme de ses lecteurs...

A lire, à relire, à offrir, à savourer, à aimer...

Ce que j'ai moins aimé :

- Rien

Premières phrases :

"Chère Helga,

Certains meurent de causes extérieures. D'autres meurent parce que la mort depuis longtemps soudée à leurs veines travaille en eux, de l'intérieur. Tous meurent. Chacun à sa façon. Certains tombent par terre au milieu d'une phrase. D'autres s'en vont paisiblement dans un songe. Est-ce que le rêve s'éteint alors, comme l'écran à la fin du film ? Ou est-ce  que le rêve change simplement d'aspect, acquérant une autre clarté et des couleurs nouvelles ? Et celui qui rêve, s'en aperçoit-il tant soit peu ?"

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D'autres avis :

Babélio A noter qu'il est rare pour un roman de connaître un tel avis positif quasi unanime.

La lettre à Helga, Bergsveinn Birgisson, traduit de l'islandais par Catherine Eyjolfsson, Zulma, août 2013, 130 p., 16.5 euros

 

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