12 novembre 2013
« Lorsque la réalité n’est pas assez forte ou pas assez spectaculaire, on la pousse un peu, on y applique une licence poétique qui la transforme, l’extrapole et la fait glisser vers le tragique, le comique, le grotesque, ou le romanesque. La réalité que je connais où que j’observe est le matériel de départ. » Ainsi déclare la réalisatrice et principale actrice de ce beau film un peu fourre-tout, mais si triste, si sensible qu’on ne sait au juste s’il convient de rire ou de pleurer en le regardant.
C’est un peu – ou beaucoup ? – de sa vie et de ses angoisses que met Valeria Bruni-Tedeschi sur la table. Ce frère violent et possessif (Filippo Timi), qui meurt à petit feu du sida mais se marie quelques jours avant sa mort dans sa chambre d'hôpital, cet ami d’enfance (fantastique Xavier Beauvois) qui a sombré dans l’alcool mais auquel on laisse le mot de la fin, la symbolique de cet énorme marronnier atteint du chancre coloré et qu’on doit abattre …
Et surtout cette mère – Marisa Borini, pianiste de concert et mère de la réalisatrice dans la vie – qui crève l’écran de son élégance, de sa présence, de ses joies simples et de sa douleur. Louise aura bientôt 44 ans, elle s’amourache de Nathan, un jeune acteur de 20 ans son cadet – Louis Garrel, le fils de son père réalisateur comme dans la vie, et le petit-fils de Maurice Garrel, récemment disparu – et tente par tous les moyens d’avoir un enfant pour survivre, pour continuer le destin de cette famille qui a connu l’extrême richesse et se débat dans des difficultés pratiques, doit vendre une partie du patrimoine, et en particulier ce château en Piémont, l’œuvre du père. Une vie pour une mort, c’est le cycle sans fin.
Et la sœur dans tout ça ? Absente, pour les besoins du scénario.
Encore que : d’abord il y a l’extraordinaire ressemblance de Marisa et de son autre fille Carla, ou encore ce qu’elle paraîtra dans 30 ans, et puis une allusion furtive à une relation ancienne entre Louise et le père de Nathan, incarné par André Wilms …
Alors, le tout fait un film émouvant, qui laisse un peu perplexe, pas tellement gai mais pas si triste non plus, de temps à autre burlesque, où tous les acteurs jouent juste, y compris, et c’est là la performance de Marisa Borini, lorsqu’ils jouent leur propre rôle.